Devant le stock de vaccins inutilisés (94 millions de doses ont été commandées pour cinq millions de personnes vaccinées), le gouvernement revoit sa stratégie face à l'épidémie de grippe A : annulation de la commande pour 50 millions de doses, revente du surplus et autorisation de vacciner pour les médecins.

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    La campagne de vaccination ne connaît pas un grand succès en France. © DXfoto/Fotolia

    La campagne de vaccination ne connaît pas un grand succès en France. © DXfoto/Fotolia

    Comme la plupart de ses voisins européens (Allemagne, Espagne Pays-Bas...), la France doit céder une partie de son stock de vaccins contre la grippe A(H1N1)grippe A(H1N1). Roselyne Bachelot-Narquin a fait savoir que son administration résiliait purement et simplement la commande (« ni livrée ni payée ») de 50 millions de doses...

    Elle a également fait savoir que les médecins généralistes pourraient eux aussi vacciner dans leurs cabinets, dès lundi prochain. Elle répond ainsi à une demande de longue date, qui constituait une sorte d'abcès de fixation, obstacle lancinant à la campagne vaccinale.

    Alimentée notamment par l'opposition parlementaire (le député PSPS Jean-Marie Le Guen demande rien moins qu'une mission parlementaire d'enquête sur le sujet), la polémique enflait depuis la semaine dernière. Avec le recul, le gouvernement semble avoir acheté de trop grandes quantités de vaccins. Mais pouvait-il faire autrement en juillet dernier, lorsqu'il a commandé 94 millions de doses à quatre laboratoires pharmaceutiques ? Retour sur les faits.

    Le 13 juillet dernier, l'Organisation mondiale de la SantéOrganisation mondiale de la Santé (OMS) a fixé trois objectifs principaux à ses 193 Etats membres :
    • préserver l'intégritéintégrité de leur système de soins ;
    • réduire la morbidité et la mortalité ;
    • réduire la transmission du virus.

    A charge ensuite aux pays de mettre en place leur propre stratégie vaccinale pour atteindre ces objectifs. En France, « la commande de 94 millions de doses était destinée à couvrir la population française sur la base d'un schéma vaccinal » à deux doses, explique le ministère. Des contrats pour l'acquisition de vaccins ont donc été signés à la mi-juillet. A cette époque, « le schéma vaccinal inscrit dans les autorisations de mise sur le marchéautorisations de mise sur le marché des vaccins pré-pandémiques était à deux doses », précise-t-on avenue de Ségur.

    En effet, les stratégies vaccinales ont été élaborées pour contrer le virus H5N1virus H5N1, bien plus dangereux que le virus H1N1 puisque son taux de mortalité est de... 60% ! En ce sens, l'émergenceémergence de H1N1 fut donc, paradoxalement, une bonne surprise. Les experts ont dû toutefois adapter leurs recommandations à cette nouvelle donne.

    Depuis le 20 novembre, une seule dose suffit

    Le 30 octobre dernier, l'OMS recommandait officiellement une dose unique de vaccin chez les plus de dix ans, une position reprise bien plus tard par l'Agence européenne du médicament (EMEA). Celle-ci ne s'est en effet prononcée que le 20 novembre et sa recommandation a été suivie par les autorités, en France et ailleurs. « Depuis cette date, il est devenu évident que la France disposerait à terme, en fonction du rythme des livraisons, d'un excédent de vaccins », note le ministère.

    Gouverner, c'est prévoir. Mais que serait-il advenu si la France s'était retrouvée en pénurie de vaccins ? Au-delà de la polémique actuelle, qui ne devrait pas cesser de sitôt, les véritables réponses ne pourront être apportées que dans plusieurs mois, voire plusieurs années, lorsque la pandémie sera passée et qu'il sera possible de comparer notre situation avec celle des autres pays.

    Pour l'heure, si l'on s'en tient aux faits, la France se retrouve d'un côté avec un surplus de vaccins et de l'autre avec des citoyens qu'elle n'a pas su convaincre du bien-fondé d'y recourir. Résultat, seuls 5 millions de Français se sont fait vacciner alors qu'une seconde vaguevague pandémique est attendue par certains spécialistes. Et cinq millions, c'est bien peu.