La stimulation du cerveau par différents facteurs, voire un stress « positif », auraient un effet dans la prévention du développement du cancer. Cela se passe chez la souris...

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    Les souris de laboratoire sont habituellement élevées par groupe de cinq individus dans une cage relativement étroite. Cet environnement peu stressant ne serait pas un avantage pour la santé du rongeur. © Aaron Logan / Licence Creative Commons

    Les souris de laboratoire sont habituellement élevées par groupe de cinq individus dans une cage relativement étroite. Cet environnement peu stressant ne serait pas un avantage pour la santé du rongeur. © Aaron Logan / Licence Creative Commons

    L'environnement constitue un ensemble de facteurs essentiels dans le développement des cancers chez l'homme. La nourriture, l'exposition à des produits chimiques, la pollution, le tabac... sont tous incriminés, même si les mécanismes moléculaires en cause ne sont pas toujours bien compris. La qualité de l'habitat est-elle aussi un facteur influençant le cancer ?

    Cette question avait déjà été investiguée dans les années 1960. Il avait été montré qu'un environnement enrichi (objets à découvrir, recoins, etc.) favorisait le développement neuronal et l'apprentissage des souris et des rats. De plus, de plus récentes recherches montrent que des souris en fin de vie et présentant des maladies neurodégénératives préservent mieux leur mémoire si elles sont élevées dans un environnement stimulant. Son effet sur le cancer a donc été naturellement testé par une équipe de chercheurs de l'Université de l’Etat de l’Ohio et l'Université Cornell. Les résultats viennent d'être publiés dans le journal Cell.

    Un groupe de souris a été placé dans un environnement standard de laboratoire, à savoir cinq animaux par cage d'environ 50 x 20 x 20 centimètres avec de la nourriture à disposition. Un autre groupe de 18 à 20 souris a été placé dans une cage bien plus grande, de 1,5 x 1,5 x 1 mètre, comprenant de la nourriture et surtout de multiples jeux, un labyrinthe, des roues, des tunnels et des endroits où se cacher.

    Après quelques semaines, un même nombre de cellules d'une lignée cancéreuse issue d'un mélanome a été injecté de manière sous-cutanée à chacune des souris, qui ont ensuite été remises dans leurs cages respectives.

    Les souris de l'étude qui ont bénéficié d'une cage très bien équipée en jouets et objets divers semblent avoir été protégés face au développement du cancer. © <em>Cell</em>

    Les souris de l'étude qui ont bénéficié d'une cage très bien équipée en jouets et objets divers semblent avoir été protégés face au développement du cancer. © Cell

    La masse de la tumeur réduite de 77%

    Le développement du cancer a été estimé par la mesure du volumevolume et du poids de la tumeur après le sacrifice de l'animal, 17 à 19 jours après l'injection. La diminution du volume de la tumeur est de 43% pour les souris ayant passé préalablement trois semaines dans l'environnement enrichi. Chez celles qui y ont passé six semaines, la massemasse de la tumeur diminue de 77,2% par rapport aux souris contrôles. De plus, certaines souris du lot « environnement enrichi » semblent même résistantes puisqu'aucune tumeur n'est observée pour 5 à 17% d'entre elles.

    Les cages améliorées auraient un impact sur le métabolisme des rongeursrongeurs. Les souris contrôles présentent en effet un poids 6% plus élevé alors que les deux groupes sont soumis au même régime. De plus, des prélèvements sanguins ont montré la diminution de 87% du taux de leptine, une hormonehormone liée à l'obésitéobésité et au cancer, dans les souris à l'environnement amélioré. D'ailleurs ces mêmes rongeurs exprimaient dans l'hypothalamushypothalamus davantage de BDNF, un facteur de croissancefacteur de croissance responsable de la baisse de leptine. Quant à la corticostérone, une hormone du stressstress, son taux est plus élevé chez les souris à l'environnement stimulant.

    Les résultats peuvent être interprétés de cette manière : la grande cage améliorée serait une source de stress pour ces animaux. Ils sont en effet confrontés à de nombreux stimulus cognitifs, moteurs, sociaux, une complexité, couplée à une nouveauté, qui entraînent une forme de stress. Les auteurs parlent d'un stress positif ou eustress, et non pas agressif ou distress, comme par exemple la confrontation à un prédateur.

    Une vie stimulante, ponctuée de stress positif, serait donc plus saine qu'une vie ennuyeuse et non stressante. Des critiques émises par d'autres scientifiques indiquent toutefois des biais dans ces travaux. La comparaison de l'exercice physiquephysique, pratiqué par les deux lots de souris, n'aurait pas été assez bien réalisée et il serait donc possible que la différence d'activité physique soit, en fait, la raison de tels résultats...