Pour le traitement de la DMLA, l’Avastin pourrait bien être utilisée à la place d’un médicament beaucoup plus coûteux, le Lucentis. Une nouvelle étude clinique a en effet mis en évidence une efficacité similaire des deux molécules anti-VEGF.

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    La DMLA est une atteinte de la macula, une région de la rétine (ici la macula correspond à la tache sombre au centre de l'image). © Ske, Wikimedia, GFDL 1.2

    La DMLA est une atteinte de la macula, une région de la rétine (ici la macula correspond à la tache sombre au centre de l'image). © Ske, Wikimedia, GFDL 1.2

    Une bataille dure depuis cinq ans entre deux médicaments destinés à traiter la dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLADMLA), première cause de déficience visuelle chez les personnes âgées. L'un, le Lucentis (ou ranibizumab) est connu depuis 2005, date à laquelle son efficacité a été établie par des essais cliniques. En attendant sa validation par la Food and Drug AdministrationFood and Drug Administration (FDA), un autre médicament déjà connu, le bevacizumabbevacizumab (ou Avastin), était proposé aux patients malgré l'absence d'étude cliniqueétude clinique démontrant son efficacité.

    Car les deux moléculesmolécules, fabriquées par la même firme Genentech, ont un mode d'action très similaire. Elles inhibent toutes les deux le facteur de croissance de l'endothélium vasculaire A (ou VEGF-A), une cytokine impliquée dans la formation de nouveaux vaisseaux sanguins. Or c'est justement la formation anormale de ces vaisseaux sanguins dans la macula (une région de la rétine où la concentration des photorécepteurs de type cône est maximale) qui est responsable de l'apparition de la déformation de la perception des images dans les cas de DMLA. L'inhibition du VEGF-A par ces deux molécules empêche donc l'aggravation de la maladie.

    Des molécules très similaires… mais différentes

    L'Avastin est un anticorpsanticorps monoclonalmonoclonal qui possède une grande affinité pour VEGF. Il était au départ utilisé dans le traitement de nombreuses tumeurstumeurs (sein, prostateprostate, ovaireovaire, foiefoie...), qui demandent pour leur croissance un approvisionnement important en oxygène et nutrimentsnutriments, apportés par des vaisseaux sanguins néoformésnéoformés. Le Lucentis, quant à lui, est formé à partir du même anticorps monoclonal que l'Avastin, mais n'en possède que la région de liaison à l'antigèneantigène lui conférant sa spécificité. Les deux molécules se fixent donc exactement au même site moléculaire du VEGF-A.

    Elles possèdent néanmoins des différences, notamment leur taille (l'Avastin est plus grand, avec 149 kilodaltons contre 48 kilodaltons pour le Lucentis), leur affinité pour VEGF-A (meilleure pour le Lucentis) ou encore la rapidité de leur élimination des tissus traités. Mais la différence la plus importante pour les patients reste le prix : si l'Avastin ne coûte qu'une cinquantaine de dollars, il faut débourser bien plus pour le Lucentis, quelque 2.000 dollars... Mérite-t-il son prix élevé, en d'autres termes, est-il plus efficace ?

    Le Lucentis correspond à la partie Fab (fragment de fixation à l'antigène) de l'anticorps monoclonal entier qu'est l'Avastin. © Anypodetos, Wikimedia, domaine public

    Le Lucentis correspond à la partie Fab (fragment de fixation à l'antigène) de l'anticorps monoclonal entier qu'est l'Avastin. © Anypodetos, Wikimedia, domaine public

    Des efficacités similaires

    Une nouvelle étude de comparaison des deux molécules, qui vient d'être publiée dans la revue New England Journal of Medicine, montre que non ! Entre février 2008 et décembre 2009, 1.208 patients atteints de DMLA et âgés de plus de 50 ans se sont portés volontaires et ont intégré l'un des quatre groupes d'étude : ceux qui recevaient tous les 28 jours une injection intravitréenne (directement dans la cavité du corps vitré de l'œil) de 0,5 milligramme de Lucentis ou de 1,25 milligramme d'Avastin, et ceux qui ne subissaient une injection de l'une ou l'autre des deux molécules que lorsque des signes de néovascularisationnéovascularisation étaient observés.

    Au bout d'un an, les deux traitements ont donné des résultats similaires chez les patients étudiés, selon les scores d'acuité visuelleacuité visuelle mesurés, avec une augmentation moyenne équivalente du nombre de lettres visualisées (ou échelle de Snellen) par rapport à ce que les patients étaient capables de voir avant le traitement. L'observation de la macula par tomographietomographie à cohérence optique (un appareil performant doté d'un laserlaser infrarougeinfrarouge qui observe la rétinerétine au niveau microscopique) montre un léger bénéfice pour le Lucentis, qui ne se reflète toutefois pas dans le confort visuel des patients.

    Un choix facile ?

    Au final, le prix des traitements au Lucentis pour chaque patient s'est élevé à 13.800 voire 23.400 dollars pour l'injection mensuelle, contre seulement 385 à 595 dollars pour l'Avastin. Étant donné leurs efficacités respectives, le choix du traitement pourrait être facile à faire... sauf qu'un dernier paramètre entre encore en compte : l'innocuité des molécules. 

    Il apparaît que les effets indésirables des deux traitements ne sont pas totalement similaires. Les scientifiques ont en effet observé la survenue d'un plus grand nombre de maladies systémiques sérieuses dans les groupes ayant reçu l'Avastin. Toutefois, le fait qu'elles soient réellement imputées à la prise de la molécule n'est pas clair puisque les effets ne sont pas ceux typiquement observés lors d'injection de molécules anti-VEGFanti-VEGF. De nouvelles études cliniques devront être réalisées pour s'en assurer.