Cliff, un beagle mâle de deux ans, est devenu expert pour détecter l’infection à Clostridium difficile, aussi bien dans les selles qu’en reniflant les patients. Cette maladie nosocomiale potentiellement mortelle confère une odeur particulière qui n’échappe pas à l’odorat aiguisé du chien. Les animaux de compagnie établiront-ils bientôt les diagnostics dans les hôpitaux ?

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    La bactérie Clostridium difficile a une double casquette. Cette bactérie de notre flore intestinale se montre inoffensive chez la plupart des personnes en bonne santé. Mais parfois, elle sait aussi se montrer agressive et entraîne une infection potentiellement mortelle. Sa cible de prédilection : les personnes âgées soumises à un traitement antibiotique.

    Ces médicaments affectent les populations bactériennes des intestins. C. difficile s'est montrée capable de développer une résistance aux traitements et profite du vide laissé par ses colocataires pour se développer et montrer son mauvais côté. S'ensuit une diarrhée, associée à de la fièvre, des nausées, des crampes intestinales. Parfois, l'inflammationinflammation des intestins devient si grave qu'elle cause la mort. Les infections à C. difficile constituent l'une des pires maladies nosocomiales.

    Car mis à part la violence des symptômessymptômes, elle a un fort pouvoir de contagion. Plus elle pourra être détectée précocement, plus on pourra soigner efficacement le patient, mais aussi éviter que l'épidémie se répande au sein d'une maison de retraite ou d'un hôpital.

    <em>Clostridium difficile</em> est une bactérie retrouvée fréquemment dans la flore intestinale humaine, sans engendrer la moindre pathologie. Cependant, quand le terrain lui est favorable, elle sécrète des toxines qui rendent difficile la digestion. Aux États-Unis, cette infection devient de plus en plus courante et surtout de plus en plus mortelle. © Janice H. Carr, CDC, DP

    Clostridium difficile est une bactérie retrouvée fréquemment dans la flore intestinale humaine, sans engendrer la moindre pathologie. Cependant, quand le terrain lui est favorable, elle sécrète des toxines qui rendent difficile la digestion. Aux États-Unis, cette infection devient de plus en plus courante et surtout de plus en plus mortelle. © Janice H. Carr, CDC, DP

    Cliff, le chien qui détecte Clostridium difficile

    Des médecins de l'hôpital de l'université libre d’Amsterdam ont eu l'idée d'enrôler des chienschiens pour déceler la maladie. Comme ils l'expliquent dans les colonnes du British Medical Journal Open, les selles des patients infectés par C. difficile ont une odeur particulière qu'un nez humain peut déjà reconnaître. Les compétences olfactives des canidéscanidés étant une centaine de fois supérieures aux nôtres, elles pouvaient une fois de plus être utilisées à notre avantage.

    Ainsi, Cliff, jeune beagle mâle de deux ans, a eu droit à deux mois d'entraînement auprès de son maître, Hotsche Luik, spécialisé dans le dressage des chiens. Le premier test consistait à faire renifler 100 échantillons de selles au diagnosticien quadrupède. La moitié d'entre eux provenaient de patients infectés par C. difficile, l'autre moitié faisait office de contrôle.

    Voici Cliff, le chien renifleur de <em>Clostridium difficile</em>. Il a été dressé pour s’asseoir ou s’allonger lorsqu’il sent la présence de la bactérie. © Bomers <em>et al.</em>, <em>BMJ Open</em>

    Voici Cliff, le chien renifleur de Clostridium difficile. Il a été dressé pour s’asseoir ou s’allonger lorsqu’il sent la présence de la bactérie. © Bomers et al.BMJ Open

    Résultat : Cliff s'est assis ou allongé devant tous les extraits contaminés, signe qu'il les avait reconnus. Il n'a pas commis d'erreur pour 47 des 50 échantillons témoin, soit une efficacité de 94 %.

    Bientôt des chiens en blouse blanche ?

    Une seconde expérience visait à faire sentir 300 participants au chien. Trente d'entre eux étaient malades, les 270 restants étaient en bonne santé. Une épreuve un peu plus délicate pour l'animal de compagnie, qui a tout de même reconnu 25 patients malades (83 %), et 265 des sujets sains (98 %). Une performance déjà impressionnante pour un animal qui n'avait jamais été habitué à ce genre d'exercice auparavant.

    Le modèle canin a ses avantages et ses limites. S'il n'est pas aussi sensible que bon nombre de techniques utilisées et s'il s'avère être un vecteur potentiel de maladies dans les milieux hospitaliers, il a l'avantage de pouvoir renifler une salle remplie de patients en quelques minutes et de manière non invasive. La pertinence de tels procédés doit maintenant être débattue afin de déterminer ce qu'il y a de mieux dans l'intérêt des patients. Verra-t-on bientôt des chiens entraînés en blouse blanche dans les hôpitaux ?