Vous rêvez de manger de la charcuterie maigre, pour éviter les kilos en trop ? Ce rêve pourrait peut-être bientôt devenir réalité grâce à un cochon génétiquement modifié - les chercheurs ont inactivé le gène de la myostatine - qui a vu le jour en Asie.

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    « Dans le cochon, tout est bon... » Mais sans gras, ce serait tellement mieux. © Tim Ellis, Flickr, cc by nc 2.0

    « Dans le cochon, tout est bon... » Mais sans gras, ce serait tellement mieux. © Tim Ellis, Flickr, cc by nc 2.0

    Connaissez-vous la vache blanc bleu belge (voir photo ci-dessous) ? Cet animal massif qui produit de grandes quantités de viande résulte de décennies de sélection. Cette vachevache pourrait bientôt avoir son équivalent porcin grâce à une équipe de scientifiques de Corée du Sud et de Chine qui ont utilisé une méthode bien plus rapide pour aboutir à leur résultat : un cochon très musclé grâce à l'inactivation d'un seul gène dans son génome.

    Pour Jin-Soo Kim, biologiste moléculaire de l'université de Séoul qui a mené ce travail, la technique génétique employée ne fait qu'accélérer un processus qui pourrait se faire naturellement : « Nous pourrions faire cela par l'élevage, mais alors cela prendrait des décennies ». Ces résultats qui devraient bientôt faire l'objet d'une publication sont révélés dans un article de Nature.

    Pour créer de tels cochons, les chercheurs ont dû induire une mutation dans le gène de la myostatine (MSTN), qui inhibe la croissance des cellules musculairescellules musculaires : ce gène contrôle la taille des muscles quand l'embryon se développe et arrête leur croissance quand ils sont trop gros. Si le gène ne fonctionne pas, les cellules musculaires prolifèrent, ce qui produit une massemasse musculaire importante.

    La vache blanc bleu belge est particulièrement musclée et résulte d’une longue sélection. La génétique moléculaire permet d’aller beaucoup plus vite. © Prankster, Robi, Wikipedia, cc by sa 3.0

    La vache blanc bleu belge est particulièrement musclée et résulte d’une longue sélection. La génétique moléculaire permet d’aller beaucoup plus vite. © Prankster, Robi, Wikipedia, cc by sa 3.0

    Les chercheurs ont inactivé la myostatine grâce au système TALEN

    Pour introduire cette mutation chez les cochons, les chercheurs ont utilisé l'édition génomiqueédition génomique, et plus précisément le système TALEN (Transcription activator-like effector nuclease) : il s'agit d'une enzymeenzyme qui coupe l'ADNADN, attachée à une protéineprotéine qui se lie à l'ADN. La protéine guide l'enzyme de coupure vers un site particulier, ici le gène MSTN, et ensuite l'enzyme le coupe. Le système de réparation de la cellule répare ensuite l'ADN mais en commettant des erreurs, ce qui rend le gène non fonctionnel. Une cellule dans laquelle TALEN a rendu les deux copies du gène MSTN inactives a été transférée dans une cellule-œuf qui a servi à créer 32 clonesclones de petits cochons.

    Mais ces cochons avec une viande maigre et un meilleur rendement par animal ont aussi quelques problèmes, comme des difficultés à la naissance à cause de leur taille. Seulement 13 des 32 cochons ont vécu jusqu'à huit mois. Parmi eux, deux sont encore vivants et un seul serait en bonne santé, d'après Xi-jun Yin, chercheur à l'université Yanbian à Yanji (Chine), qui a effectué le clonageclonage.

    L'objectif des chercheurs ne serait pas de commercialiser de la viande à partir de ces cochons, mais plutôt de les utiliser pour fournir du spermesperme qui serait vendu à des éleveurs. La descendance de ces cochons qui n'aurait qu'un seul gène MSTN inactivé serait en meilleure santé. Jin-Soo Kim espère vendre le sperme de cochon à des agriculteurs de Chine, où la demande en porc est croissante. L'équipe essaie aussi de faire la même expérience avec une autre technique d'édition génomique, CRISPR/Cas9.

    Actuellement, aucun animal génétiquement modifié n'a été approuvé pour la consommation humaine, en raison des craintes concernant les effets négatifs sur la santé et l'environnement. Mais certains chercheurs espèrent que l'édition génomique qui désactive un gène pourrait être utilisée en agricultureagriculture. Un argument est que l'édition génomique conduirait à des changements bien moins importants que dans des OGMOGM où des gènes d'une espèceespèce sont introduits dans une autre. D'autres applicationsapplications pourraient voir le jour : un bétail sans corne ou résistant à des virusvirus...