Au sein des populations du principal vecteur du paludisme en Afrique, un moustique du genre Anopheles, la diversité génétique entre populations est telle qu’il semble bien que deux espèces indépendantes sont en train d’apparaître. Ce qui compliquerait la lutte contre la maladie qui tue un million de personnes par an.

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    Deux études d'une équipe de l'Imperial College, à Londres, publiées dans Science, montrent que le principal vecteur du paludisme en Afrique sub-saharienne, Anopheles gambiae, évolue sous nos yeuxyeux. Mara Lawniczak (de la division biologie cellulaire et moléculaire de l'université londonienne) et ses collègues démontrent que deux souches déjà connues, dénommées M et S, physiquement identiques, sont en passe de devenir deux espècesespèces distinctes. Entre les populations de ces deux souches, les échanges génétiques sont devenus faibles et les génomes des deux variétés de ce moustiquemoustique ont fini par différer largement.

    Deux études pour un palu

    La première étude a comparé de manière très détaillée le patrimoine génétique des souches M et S. Les différences sont apparues très nombreuses, beaucoup plus que ce qui était attendu, et se trouvent éparpillées dans tout le génome. Moins précises, des études antérieures avaient seulement montré des zones particulières où semblaient s'accumuler ces différences. Mais elles concernent en fait l'ensemble du génome, ce qui laisse supposer que les deux souches diffèrent en de nombreux points, pouvant toucher au développement, au comportement alimentaire ou à la reproduction.

    Dans la seconde étude, les biologistes ont analysé le génome d'un grand nombre de moustiques des souches M et S et également d'une troisième variété, baptisée Bamako. Ils ont séquencé 400.000 régions particulières où des différences importantes du code génétique avaient été remarquées. L'idée était de mesurer la variabilité génétique au sein des différentes populations. Les résultats démontrent que les souches M et S évoluent de manières différentes, probablement, expliquent les chercheurs, en réponse aux contraintes environnementales de leurs milieux respectifs : habitats pour les larveslarves, agents infectieux, prédateurs...

    « Nous comprenons que les moustiques évoluent plus rapidement que ce que nous pensions, conclut Mara Lawniczak, et que, malheureusement, les stratégies qui pourraient fonctionner sur une souche pourraient être inefficaces sur l'autre souche. » Dans une prochaine étude, les biologistes tenteront de repérer quelles variations génétiques influent sur la propension des moustiques à se faire infecter par les agents pathogènes, notamment PlasmodiumPlasmodium falciparum, celui du paludisme.