La première étude scientifique sur un vaccin contre la Covid-19, mis au point par la biotech chinoise CanSino Biologics, montre des résultats positifs sur l’immunisation, mais le vaccin induirait aussi beaucoup d’effets secondaires.


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    Le 16 mars, la biotech chinoise CanSino Biologics avait été la première entreprise à débuter les tests d'un vaccin contre le coronavirus de la Covid-19 chez l'humain. Onze semaines plus tard, les résultats de tests de phase I sont déjà publiés (et relus) dans la revue The Lancet. Pour cette première phase, destinée à tester l'innocuité et la sécurité du vaccin, 108 volontaires âgés de 18 à 60 ans ont été recrutés dans la province de Hubai, en Chine. Ils ont été répartis en trois groupe, chacun recevant une dose plus ou moins élevée.

    Une réponse immunologique à l’efficacité incertaine

    Ces premiers résultats sont jugés « encourageants » par les auteurs. La réponse humorale [production d'anticorps] contre le virus Sars-CoV-2 présente un pic au 28e jour post-vaccination, et une production rapide et spécifique de lymphocyteslymphocytes T a été observée 14 jours après la vaccination, indique l'étude. Les chercheurs ont recherché deux types d'anticorps : les anticorps qui se lient simplement avec la protéineprotéine de surface du virus, et les anticorps neutralisants, capables de le stopper. Or, si presque tous les volontaires ont connu une forte augmentation de leurs anticorps de liaison, seuls 50 % ont vu leur concentration d'anticorps neutralisants multipliés par quatre.

    Le vaccin de CanSino repose sur un adénovirus de type 5 (Ad5) désactivé et modifié pour exprimer l’antigène du virus Sars-Cov-2. D’autres vaccins, comme celui de Moderna, utilisent l’ARN du virus qui est introduit dans la cellule, qui va alors produire les protéines virales. Une autre méthode consiste à injecter des copies de la protéine de surface directement dans l’organisme. C’est notamment le cas des vaccins HPV contre le papillomavirus humain. © AFPGraphics, Twitter

    Autre soucisouci : le vaccin semble être moins efficace chez les personnes de 45-60 ans (la tranche la plus âgée testée). Ce qui est préoccupant, vu que ce sont justement les plus âgés qui sont les plus exposés à la maladie. Cette plus faible réponse humorale proviendrait du type de vaccin utilisé par CanSino. Ce dernier repose sur un adénovirusadénovirus de type 5 (Ad5) désactivé, un virus assez courant et qui provoque notamment des pharyngitespharyngites et des pneumoniespneumonies. Entre 40 et 70 % des personnes seraient ainsi porteuses d'anticorps anti-Ad5 en Europe, et jusqu'à 95 % en Thaïlande, selon une étude de 2015. Ces personnes développent donc une réponse immunitaireréponse immunitaire moindre face au vaccin contre le Sars-CoV-2. Un vrai problème pour l'efficacité du traitement.

    Beaucoup d’effets secondaires

    L'autre point négatif concerne la tolérance du vaccin : 70 % de volontaires ont ainsi présenté des effets secondaires légers tels que de la fièvrefièvre, des maux de tête, de la fatigue et des douleursdouleurs musculaires et ce, quelle que soit la dose reçue. Toutefois, « aucun événement grave n'a été observé », modèrent les auteurs de l'étude. Ces résultats mitigés n'ont pas découragé CanSino, qui a déjà débuté la phase II des essais cliniquesessais cliniques, incluant 500 personnes et portant sur l'efficacité du vaccin contre un placeboplacebo. Elle comprend, cette fois-ci, des personnes âgées de plus de 60 ans.

    Une communication prudente, à l’opposé de celle de Moderna

    À la suite de cette étude, la réaction de CanSino Biologics a été particulièrement mesurée en comparaison des annonces de Moderna, faites en grande pompe, le 18 mai dernier, sur les résultats préliminaires de son vaccin. La start-upstart-up américaine s'était pourtant bien gardée de publier ses données, ce qui n'a pas empêché son cours en bourse de bondir de 35 % pour atteindre 32 milliards de dollars, soit davantage que la moitié des entreprises du Cac 40.

    En étant les premiers à publier leurs résultats dans une revue scientifique, les Chinois jouent donc la transparencetransparence. CanSino peut également faire valoir son expérience en matièrematière de vaccin, sa technologie ayant déjà été testée pour un vaccin contre Ebola en 2017 -- qui n'était toutefois pas allé jusqu'en phase III. Mais, on est encore loin de disposer d'un vaccin crédible, bien que plus d'une centaine de candidats soient sur les rangs à travers le monde.