Avec les cas de coronavirus identifiés dans les élevages de visons, la place de ce mustélidé dans l'émergence de la pandémie actuelle de Covid-19 est remise en question. Est-il l'hôte intermédiaire que les scientifiques recherchent ?


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    Comment le SARS-CoV-2 a-t-il fait son chemin jusqu'à l'Homme ? C'est une question qui n'a toujours pas de réponse claire. Ce qui semble le plus probable, en l'état actuel des connaissances, est que l'ancêtre du SARS-CoV-2, responsable de la Covid-19, évoluait dans les chauves-souris, notamment dans celles du genre Rhinolophus. À partir de là, le coronavirus a infecté une autre espèceespèce animale, dans laquelle il s'est répliqué et a muté pour mieux s'y adapter. Au fil du temps et des contacts êtres humains-animaux, le coronavirus a franchi la barrière des espèces pour provoquer la pandémie actuelle.

    Les recherches se concentrent aujourd'hui sur l'identité de cet hôte intermédiaire. Plusieurs hypothèses ont été formulées depuis le début de la pandémie, celle du pangolinpangolin étant la plus sérieuse. Les souches de coronavirus isolées de ce mammifèremammifère en danger d'extinction sont proches du SARS-CoV-2, mais trop éloignées pour en être les parents directs. Si ce n'est pas le pangolin, quel animal a donc joué le rôle d'intermédiaire entre les chauves-sourischauves-souris et l'être humain ? Beaucoup d'animaux sensibles à l'infection et en contact rapproché avec l'Homme pourraient avoir joué ce rôle. Le virus a été isolé chez les chiens, les chats, les furets, ou encore chez des lionslions et des tigrestigres vivant dans des zoos, et enfin chez des visons élevés pour leur fourrure.

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    Le SARS-CoV-2 serait un mélange de coronavirus de pangolin et de chauve-souris

    Assez récemment, une flambée épidémique de coronavirus a été identifiée dans une ferme de visons au Danemark, conduisant à l'abattage de millions d’animaux. C'est aussi le cas en France. Des scientifiques des services sanitaires des Pays-Bas ont étudié des cas similaires dans leur pays. Là-bas, les premiers cas de contaminationcontamination au SARS-CoV-2 liés aux fermes de visons ont été rapportés dès le printemps 2020. Grâce à une technique de séquençageséquençage génomiquegénomique appelée WGS (whole genome sequencing), les scientifiques hollandais ont essayé de retracer l'histoire évolutive des souches isolées dans ces élevages.

    Voici comment certains scientifiques imaginent l'histoire du SARS-CoV-2 à la suite des derniers éléments concernant les visons. Le SARS-CoV-2 a émergé d'un ancêtre évoluant chez les chauves-souris ou le pangolin et qui nous a contaminé par l'intermédiaire d'un animal domestique, peut-être les visons. Les SARS-CoV-2 humains peuvent infecter les animaux domestiques et inversement. L'humain a pu se contaminer lors d'un contact rapproché avec ces animaux ou en mangeant de la viande mal préparée. Peng Zhou, Zheng-Li Shi, <em>Science</em>
    Voici comment certains scientifiques imaginent l'histoire du SARS-CoV-2 à la suite des derniers éléments concernant les visons. Le SARS-CoV-2 a émergé d'un ancêtre évoluant chez les chauves-souris ou le pangolin et qui nous a contaminé par l'intermédiaire d'un animal domestique, peut-être les visons. Les SARS-CoV-2 humains peuvent infecter les animaux domestiques et inversement. L'humain a pu se contaminer lors d'un contact rapproché avec ces animaux ou en mangeant de la viande mal préparée. Peng Zhou, Zheng-Li Shi, Science

    Le vison, un hôte intermédiaire ?

    Leur étude, publiée dans Science, porteporte sur les 16 premières fermes à avoir connu une flambée épidémique aux Pays-Bas. La première est intervenue le 23 avril 2020, alors que quatre des cinq employés de l'élevage ont eu des symptômessymptômes respiratoires. Le coronavirus a été isolé des visons après coup. Dans la seconde ferme inspectée, la flambée épidémique a été attestée le 25 avril 2020. Les huit employés ont été testés cinq jours plus tard, le 30 avril. Tous avaient des anticorpsanticorps dirigés contre le SARS-CoV-2 dans le sérumsérum.

    Au total, les scientifiques ont obtenu 18 génomesgénomes exploitables, isolés des visons et des employés, provenant de sept fermes différentes sur les seize visitées. Les génomes ont été classés dans 5 clusters, notés de A à D en fonction de leur séquence. Par exemple, les coronavirus du cluster 1 ont en commun jusqu'à 9 polymorphismes nucléotidiques par rapport au coronavirus humain qui circule majoritairement aux Pays-Bas (dans un rayon de 19 km2 autour des élevages). Certaines souches issues des visons portent la fameuse mutation D614G, le variant dominant en Europe, alors que d'autres montrent le même profil que le variant historique qui a infecté les premières personnes à Wuhan.

    Les scientifiques avancent aussi une autre donnée : 68 % des employés dans les élevages de visons ont contracté la Covid-19. Dans 51 % des cas, ce sont des anticorps qui ont été identifiés et dans les 49 % restant, des tests PCRtests PCR qui sont revenus positifs.

    L'OMS enquête

    Pourquoi les élevages de visons semblent-ils être si favorables à l’émergence du coronavirus ? Dans ces endroits, la densité animale est très importante. De plus, les visons peuvent éternuer, ce qui facilite la propagation d'une maladie respiratoire comme la Covid-19 entre les animaux et les Hommes. 

    Sont-ils pour autant à l’origine de la pandémie mondiale ? S'il est impossible de conclure formellement à l'heure actuelle, la question mérite d'être posée. La Chine élève en massemasse ces animaux pour leur fourrure, mais aussi pour leur viande, des produits qui auraient pu être vendus sur le marché exotiqueexotique de Wuhan, l’origine admise de la pandémie.

    La Chine vient tout juste d'autoriser les scientifiques de l'Organisation mondiale de la SantéOrganisation mondiale de la Santé (OMS) à enquêter sur les origines du coronavirus sur son territoire. Ils devraient commencer leur travail jeudi, en espérant qu'ils amassent assez d'indices pour boucler cette enquête qui dure depuis un an maintenant.