L’utilisation des inhibiteurs de pompe à protons (IPP) de façon chronique augmenterait le risque d’infarctus du myocarde. Ces médicaments commercialisés sans ordonnance servent à traiter le reflux gastro-œsophagien et les brûlures d’estomac.

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    Certains médicaments contre les brûlures d’estomac auraient des effets nocifs sur la santé cardiaque. © Victor, Flickr, CC by 2.0

    Certains médicaments contre les brûlures d’estomac auraient des effets nocifs sur la santé cardiaque. © Victor, Flickr, CC by 2.0

    Les inhibiteurs de pompe à protons (IPPIPP) sont des médicaments servant au traitement du refluxreflux gastrogastro-œsophagien qui agissent sur l'acidité gastrique. Or il a été observé chez des personnes ayant des antécédents de syndrome coronarien aigu que les IPP semblaient réduire l'efficacité d'un traitement antiplaquettaire : le clopidogrel. Les IPP pourraient interférer avec la capacité du clopidogrel à prévenir la formation de caillots chez des personnes à risque de thrombose et d'infarctus.

    C'est pourquoi des chercheurs de la Stanford University, en Californie, ont voulu savoir si les risques liés aux IPP s'étendaient à la population générale. Dans un article paru dans PLOS One, ils expliquent qu'ils ont passé en revue plus de 16 millions de documents cliniques portant sur 2,9 millions de personnes, en utilisant une nouvelle approche d'extraction de données cliniques de pharmacovigilance.

    Les scientifiques ont ainsi constaté que les patients souffrant de reflux gastro-œsophagien qui avaient été exposés aux IPP avaient une augmentation de 16 % de leur risque d'infarctus du myocarde. Le risque de mortalité cardiovasculaire était même multiplié par deux. De plus, les patients qui prenaient un autre type de traitement antireflux (les anti-H2) n'avaient pas de risque cardiaque accru. Les IPP étaient donc associés à un risque élevé d'infarctus du myocarde, mais pas les anti-H2.

    Probabilité de survie (<em>Survival Probability</em>, en anglais sur le schéma) en fonction des années de suivi (<em>Years of Follow-up</em>) avec les IPP (<em>PPI use</em>). L’utilisation des IPP est associée à la multiplication par 2,2 du risque de mortalité cardiovasculaire par rapport à un groupe témoin (<em>Control</em>). © 2015 Shah <em>et al., PLOS One</em>, cc by 4.0

    Probabilité de survie (Survival Probability, en anglais sur le schéma) en fonction des années de suivi (Years of Follow-up) avec les IPP (PPI use). L’utilisation des IPP est associée à la multiplication par 2,2 du risque de mortalité cardiovasculaire par rapport à un groupe témoin (Control). © 2015 Shah et al., PLOS One, cc by 4.0

    Les IPP auraient un impact sur la fonction vasculaire et le risque d’infarctus

    Les associations trouvées étaient indépendantes de l'utilisation du clopidogrel, ce qui suggère que les IPP agiraient par un mécanisme qui n'implique pas directement l'agrégation plaquettaire. Dans leur article, les chercheurs proposent que les IPP agissent sur la production d'oxyde nitriqueoxyde nitrique (NO), qui joue un rôle important dans la santé vasculaire.

    En effet, des données moléculaires, cellulaires et physiologiques montrent que les IPP inhibent l'activité de l'enzymeenzyme DDAH (diméthylargininase), une enzyme nécessaire à la santé cardiovasculaire. La DDAH métabolise un inhibiteur de l'enzyme NOS (oxyde nitrique synthase). Si les IPP altèrent la production d'oxyde nitrique, cela expliquerait l'augmentation du risque d'infarctus du myocarde, y compris chez les patients qui ne prennent pas de clopidogrel.

    Malgré tout, comme l'explique Nicholas Leeper, principal auteur de l'étude, les IPP sont « très efficaces » et, dans une interview à Medscape Medical News, il affirme : « Nous ne recommandons pas que les gens arrêtent le médicament pour le moment ».