En étudiant le foie de souris, des chercheurs danois ont découvert que son état de santé dépendait directement du bien-être de la peau. Ce résultat révèle la connexion étroite entre ces deux organes et devrait inciter les médecins à être particulièrement attentifs aux troubles hépatiques chez les patients atteints d’une maladie de peau.


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    L'organisme est composé de milliards de cellules qui agissent de concert pour assurer la coordination des différents organes. Les cellules peuvent communiquer grâce à des petites moléculesmolécules qui se fixent sur des récepteurs de surface et émettent des informations provenant d'autres cellules. Les neurotransmetteurs, par exemple, sont libérés par les neurones et assurent la circulation de l'influx nerveuxinflux nerveux. Les hormones peuvent quant à elles influencer l'activité de cellules très éloignées. Ainsi, la LH et la FSH, deux hormones sexuelles synthétisées par l'hypophyse peuvent moduler l'activité des organes sexuels et la reproduction.

    Malgré les progrès de la recherche dans le domaine de la communication cellulaire, de nombreux mystères restent à éclaircir. Les scientifiques connaissent certains mécanismes qui permettent aux organes de discuter entre eux mais de nombreux autres sont à découvrir. Une équipe de l'université du Danemark du Sud vient de faire une avancée dans ce domaine. Leur étude, publiée dans la revue Cell reports, révèle que la peau, l'organe le plus grand du corps humain, peut communiquer avec le foie et influencer son fonctionnement.

    Dans cette étude, les chercheurs ont recouvert des souris mutantes de latex (bleu) afin d’empêcher la perte d’eau et de chaleur. © Birgitte Svennevig, université du Danemark du Sud
    Dans cette étude, les chercheurs ont recouvert des souris mutantes de latex (bleu) afin d’empêcher la perte d’eau et de chaleur. © Birgitte Svennevig, université du Danemark du Sud

    Ce résultat a été découvert un peu par hasard alors que les chercheurs travaillaient avec des souris mutantes incapables de synthétiser l'Acyl-CoA-binding protein, une protéineprotéine capable de se lier à des acides gras. Ces souris, d'apparence faible, présentaient une fourrure un peu étrange et avaient des difficultés à être sevrées. Une analyse plus poussée a également montré la présence de dépôts de graisse au niveau de leur foie« Cette accumulation ne nous a pas vraiment surpris, raconte Ditte Neess, la principale auteure de l'étude. Nous pensions au départ qu'elle était due à l'absence de l'Acyl-CoA-binding protein dans le foie. »

    La santé de la peau influence celle du foie

    Pour tester cette hypothèse, les scientifiques ont fabriqué des souris qui ne possédaient plus l'Acyl-CoA-binding protein dans les cellules de peau mais qui continuaient à la fabriquer dans le foie. Contrairement à leurs attentes, l'apparence des souris est restée identique à celle d'animaux mutants ne produisant pas l'Acyl-CoA-binding protein dans le foie : les rongeursrongeurs étaient frêles après le sevrage et continuaient à accumuler de la graisse au niveau du foie. Ces résultats suggéraient qu'un problème au niveau de la peau pouvait retentir sur le fonctionnement du foie.

    Pour mieux comprendre le phénomène, les chercheurs ont regardé les souris mutantes d'un peu plus près. Ils se sont rendu compte que leur fourrure était grasse et que leur peau ne retenait plus l'eau aussi bien que celle des autres rongeurs. « Lorsque l'eau s'échappe, les souris perdent aussi de la chaleur, explique la chercheuse. Nous nous sommes donc demandé si cette perte d'étanchéitéétanchéité cutanée et de chaleurchaleur était à l'origine des dépôts de graisse dans le foie. »

    Pour répondre à cette question, les auteurs ont recouvert la peau des souris avec du latexlatex. Ainsi, l'eau ne pouvait plus s'évader et la chaleur restait confinée à l'intérieur du corps des souris. Ils avaient vu juste : les souris mutantes recouvertes de latex n'ont plus accumulé de graisse dans leur foie. « Ce résultat montre que la santé de la peau influence directement l'activité du foie. »

    Quand la peau communique avec le foie

    Comment la peau peut-elle communiquer avec le foie ? En utilisant des techniques de biochimiebiochimie et de biologie moléculairebiologie moléculaire, les chercheurs ont montré que lorsque les souris mutantes perdaient de l'eau, elles se mettaient à extraire de la graisse dans leurs tissus adipeux et à la transporter dans leur foie. Cependant, le programme génétiquegénétique SREBP, responsable de la synthèse des acides gras dans cet organe, ne fonctionne pas correctement chez ces souris et les graisses s'accumulent progressivement.

    Ces résultats montrent comment deux organes, pourtant séparés physiquement, peuvent s'influencer l'un l'autre. Il est probable que ce phénomène soit plus global et valable pour l'ensemble du corps. De nombreuses études sont cependant nécessaires pour le confirmer. Ces expériences devraient en tout cas inciter le corps médical à être particulièrement vigilant à l'état de santé du foie chez les malades souffrant d'une pathologie de peau.