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    Pendant longtemps, les scientifiques ont considéré qu'au cours du MésozoïqueMésozoïque (période comprise entre -250 et -65 millions d'années environ) les climatsclimats terrestres étaient globalement chauds et homogènes à la surface du globe. D'autres travaux ont ensuite permis de mieux comprendre la distribution latitudinale des faunesfaunes de reptilesreptiles et les climats tolérés par les dinosauresdinosaures, révélant ainsi la situation climatique du CrétacéCrétacé.

    Les arguments en faveur de climats terrestres globalement chauds et homogènes durant le Mésozoïque étaient :

    • une distribution particulière des continents ;
    • un important effet de serreeffet de serre dû à la présence de grandes quantités de CO2 atmosphérique ;
    • une étonnante abondance des reptiles à toutes les latitudeslatitudes, de l'équateuréquateur aux pôles.
    Deux Sinosauropteryx dans une forêt du Crétacé. © Chuang Zhao et Lida Xing

    Deux Sinosauropteryx dans une forêt du Crétacé. © Chuang Zhao et Lida Xing

    D'importantes fluctuations thermiques

    Toutefois, d'autre travaux ont ensuite montré que les océans de notre planète ont été soumis à d'importantes fluctuations thermiques, avec notamment des intervalles plus froids durant lesquels des calottes glaciairescalottes glaciaires ont pu se développer aux pôles.

    Mais qu'en était-il sur les continents, dominés par les reptiles, et notamment les dinosaures que l'on trouve sur tous les continents et à toutes les époques ? Deux études, publiées en 2004 et en 2011 ont permis de mieux comprendre la distribution latitudinale des faunes de reptiles et les climats tolérés par les dinosaures.

    Le monde à la fin du Crétacé : quel climat ? © J.-L. Hartenberger, DR

    Le monde à la fin du Crétacé : quel climat ? © J.-L. Hartenberger, DR

    Révéler la situation climatique du Crétacé

    Les compositions isotopiques de l'oxygène de restes de vertébrésvertébrés continentaux (dinosaures, crocodilescrocodiles, tortuestortues, poissonspoissons d'eau douce, reptiles mammaliensreptiles mammaliens) ayant vécu à des latitudes variées et sur deux périodes du Crétacé ont été mesurées. En appliquant les équations de fractionnement isotopiques permettant de retrouver la composition isotopique moyenne de l'oxygène (c'est-à-dire l'abondance relative entre les deux isotopes 18O et 16O que l'on note δ18O) de l'eau bue par ces animaux à partir du δ18O de leur apatite, il a été possible de reconstituer la distribution latitudinale du δ18O des eaux de pluies, et de recalculer également les gradients de températures moyennes de l'air pour la fin du Crétacé (il y a environ 70 millions d'années) et pour une période du Crétacé inférieur (il y a environ 120 millions d'années).

    Ce graphique indique le gradient thermique terrestre du Crétacé terminal (en jaune), celui du Crétacé inférieur (en en bleu) et celui actuel (en rouge). © Ron Blakey et Romain Amiot, DR

    Ce graphique indique le gradient thermique terrestre du Crétacé terminal (en jaune), celui du Crétacé inférieur (en en bleu) et celui actuel (en rouge). © Ron Blakey et Romain Amiot, DR

    Les résultats montrent qu'il y a 70 millions d'années, les climats terrestres n'étaient pas plus chauds que ceux d'aujourd'hui au niveau des régions tropicales, mais que, dans les régions de plus hautes latitudes et les régions polaires, les températures étaient plus élevées qu'actuellement.

    De telles conditions permettaient aux reptiles à sang froid de vivre jusqu'à des latitudes élevées. En effet, on trouve des restes de crocodiles, tortues, lézards et serpents dans des gisementsgisements qui se trouvaient à 60°N au Crétacé terminal, ce qui correspond aujourd'hui à la latitude d'Oslo en Norvège. Au-delà de ces latitudes, on ne trouve plus que des animaux à sang chaud, soit des mammifèresmammifères, oiseaux et dinosaures, seuls capables de supporter les rigueurs polaires.

    <em>Epidexipteryx hui</em> et sa queue formée de quatre longues plumes (d). © <em>Nature</em>, DR

    Epidexipteryx hui et sa queue formée de quatre longues plumes (d). © Nature, DR

    Concernant la période du Crétacé inférieur datée autour de -120 millions d'années, les températures reconstituées sont exceptionnellement basses aux moyennes latitudes, et très proches de celles d'aujourd'hui. Il régnait, par exemple, dans le nord-est de la Chine, zone fameuse pour l'abondance de « dinosaures à plumes » découverts, des climats tempérés frais similaires à ceux que l'on connaît aujourd'hui dans le nord de la France, et caractérisés par des hivershivers rigoureux sous lesquels les reptiles ectothermes doivent hiverner pour survivre.

    Cette découverte montre également que l'abondance de dinosaures couverts de structures s'apparentant à la plume des oiseaux était probablement liée aux climats de l'époque. Les dinosaures profitaient de leurs « plumes » comme isolant thermique afin de les aider à maintenir une activité soutenue tout au long de l'année.

    Un monde froid peuplé d'animaux à sang chaud !

    Ces différents travaux montrent qu'au Mésozoïque les conditions climatiques et la structuration des écosystèmesécosystèmes terrestres avaient déjà des caractéristiques modernes. Ce n'était finalement pas comme on le pensait « un monde chaud peuplé d'animaux à sang froid », mais bien « un monde parfois froid et dominé par des animaux à sang chaud ».

    La géochimie isotopique nous permettra sûrement de faire d'autres découvertes étonnantes et de résoudre de nombreuses questions qui taraudent les paléontologuespaléontologues.