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    Il ne devrait pas y avoir de métauxmétaux lourds dans un poissonpoisson. Une telle présence est anormale, et le professionnel qui rencontre une telle situation a le devoir d'en avertir les autorités.

    Banc de thons. © Richard Carey, Fotolia

    Banc de thons. © Richard Carey, Fotolia

    Schématiquement, chaque individu faisant partie d'une chaîne alimentairechaîne alimentaire doit consommer une dizaine de kilos de matière vivante pour produire un kilo de sa propre chair. De ce fait, si ce qu'il mange contient n grammes d'un composant non biodégradablebiodégradable, ce qui est le cas des métaux lourds, sa chair va se charger de 10n grammes de ce composant. Le prédateur qui le consommera verra sa chair se charger de 100n grammes du composant, celle du prédateur de troisième niveau de 1.000n grammes, et ainsi de suite à chaque niveau ultérieur. On se gardera cependant d'en déduire abusivement que la concentration du composant dans la chair du prédateur va se trouver automatiquement multipliée par 10 d'un niveau à l'autre. Il faudrait pour cela que le prédateur consomme des proies ayant toutes la même charge du composant non biodégradable en cause, donc de même niveau dans la chaîne alimentaire et ayant été soumises à la même exposition. En pratique, le facteur multiplicatif est souvent plus proche dans la réalité de 3 ou 4 que de 10.

    La catastrophe de Minamata, causée par des taux importants de mercure (à l'image) dans les poissons, reste emblématique du problème des métaux lourds dans l'alimentation. © DP

    La catastrophe de Minamata, causée par des taux importants de mercure (à l'image) dans les poissons, reste emblématique du problème des métaux lourds dans l'alimentation. © DP

    Ce niveau de 3 ou 4 est cependant suffisant pour qu'on trouve chez des prédateurs de fin de chaîne, comme les thonsthons ou les espadonsespadons, des taux de métaux lourds, en particulier sous forme de méthylmercure, comparables à ceux qui ont causé la pollution des poissons de la baie de MinamataMinamata (Japon) dans les années 1950. Mais ce n'est pas la consommation annuelleannuelle de cinq steaks de thon ou d'espadon qui produira chez un consommateur français une intoxication comparable à celle qu'ont vécue les populations de pêcheurs de la baie de Minamata, mangeant du poisson de la baie 365 jours par an.

    La réponse à la question posée est donc : oui, il peut y avoir des métaux lourds dans certains poissons et, quelle que soit la quantité, c'est trop ! On y ajoutera que cela n'empêche pas une consommation occasionnelle de ces poissons, étant entendu qu'on évitera d'en faire sa nourriture exclusive.

    Un Minamata aquacole est-il à craindre ?

    J'ai cherché dans la littérature et demandé à des collègues. Aucun de nous n'a trouvé trace d'une intoxication humaine par des métaux lourds présents dans la chair de poisson d'élevage. Par contre, à chaque fois que la question est posée, la catastrophe de Minamata (Japon) revient en référence. Plus de 57 ans après la reconnaissance officielle des faits, c'est toujours, avec 13.000 victimes reconnues, la référence fondamentale du domaine de la contaminationcontamination de l'Homme par la consommation de poisson chargé en mercure. Mais elle contient deux facteurs qui ne sont pas transposables : d'un côté, une usine dont les responsables cachent pendant des dizaines d'années qu'elle rejette en continu dans la baie de Minamata des effluents chargés en mercure, de l'autre, une population de petits pêcheurs dont l'unique source de protéinesprotéines animales est, à longueur d'année, du poisson pêché dans la baie. Cacher un rejet de cette ampleur (400 tonnes de mercure au total) n'est bien heureusement plus possible. Ne manger comme source de protéines animales que du poisson d'aquaculture, d'une source unique, à longueur d'année, me paraît aussi monotone qu'inimaginable.

    La seule leçon à retenir de cela est que diversifier son alimentation en nature et en sources est à la fois un plaisir et une précaution.