Surprise, le discoglosse d’Israël, un amphibien anoure, vient de réapparaître plusieurs décennies après avoir été déclaré éteint ! Mais ce n’est pas tout. L’animal était mal classé, car il appartient en réalité au genre Latonia, dont les seuls représentants connus sont des fossiles. Discoglossus nigriventer est donc le dernier représentant de son groupe.

au sommaire


    À l’image, Latonia nigriventer adulte montrant la coloration typique de son ventre. © Sarig Gafny

    À l’image, Latonia nigriventer adulte montrant la coloration typique de son ventre. © Sarig Gafny

    En 1966, le discoglosse d'Israël (Discoglossus nigriventer) a été le premier amphibien classé dans la catégorie « espèce éteinte » par l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). Depuis sa découverte en 1943, l'espèce était donc rattachée au genre actuel Discoglossus, qui est inclus dans la famille des alytidés (dont les crapauds accoucheurs font également partie). Elle était uniquement connue dans la vallée de la Houla, en Israël, et était la seule représentante de son groupe dans la région méditerranéenne orientale. En effet, toutes les autres espèces de discoglosses vivent actuellement en Méditerranée occidentale (péninsule Ibérique, Afrique du Nord, Corse, Sardaigne, Malte et Sicile).

    En octobre 2011, des individus vivants ont été découverts durant une patrouille effectuée par des agents de la réserve naturelle de la Houla. Parallèlement, des restes fossiles présentant une morphologiemorphologie de type discoglosse ont été mis au jour dans plusieurs gisements archéologiques datant du Pléistocène et de l'Holocène (environ entre - 800.000 et - 10.000 ans), toujours dans la vallée de la Houla.

    Les caractères ostéologiques des exemplaires actuels et fossilesfossiles conduisent à reconsidérer le statut systématique et les relations de parenté du discoglosse d'Israël. Ils montrent que l'espèce n'est pas un discoglosse stricto sensu, mais qu'elle se rattache plutôt au genre Latonia que l'on croyait éteint. Jusqu'à présent, il ne comprenait que des espèces fossiles principalement décrites en Europe, qui ont vécu de l'OligocèneOligocène au Pléistocène inférieur (environ entre - 34 millions d'années et - 800.000 ans). Les analyses moléculaires réalisées sur de l'ADN nucléaire et mitochondrial d'individus vivants confirment une divergence génétiquegénétique entre les souches israéliennes et Discoglossus.

    Visualisation 3D du crâne de <em>Latonia nigriventer </em>(HUJ-R-544). © Renaud Boistel, CNRS-IPHEP

    Visualisation 3D du crâne de Latonia nigriventer (HUJ-R-544). © Renaud Boistel, CNRS-IPHEP

    Une espèce à peine réapparue, mais déjà panchronique

    Le discoglosse d'Israël est donc une espèce relique (ou forme panchronique, auparavant plus connue sous le nom populaire de « fossile vivant »), seule survivante du genre Latonia que l'on croyait disparu. Il est le dernier représentant d'une lignée d'amphibiens anoures, dont certains pouvaient atteindre 20 cm de long, et qui a connu une large répartition en Europe et en Turquie durant l'ère tertiaire, avant de subir une forte régression. Il ne subsiste plus que dans la limite orientale de son ancienne aire de distributionaire de distribution

    Les auteurs israéliens, français et allemands de l'article paru dans Nature Communications font également remarquer la grande capacité d'adaptation (résiliencerésilience) montrée par cette espèce. Ainsi elle est capable de survivre aux grands changements climatiqueschangements climatiques et environnementaux du QuaternaireQuaternaire, et même à la forte dégradation de l’habitat liée aux activités humaines au cours des dernières décennies.