Racontez une bonne blague à un chimpanzé. S’il vous aime bien, il rira même s’il ne comprend pas votre humour. D’après l’équipe de biologistes qui vient de décrire ces observations, nos cousins utiliseraient le rire de la même manière pour les interactions sociales.

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    Deux chimpanzés en train de partager une bonne plaisanterie. © Université de Portsmouth

    Deux chimpanzés en train de partager une bonne plaisanterie. © Université de Portsmouth

    Le rire inextinguible qui nous entraîne dans des hoquetshoquets incontrôlables n'est pas le petit rire social, celui que nous produisons volontairement pour répondre à une vague plaisanterie d'un ami. Voilà un comportement bien humain, enfin pas tout à fait nous démontre Marina Davila-Ross, biologiste du comportement, spécialiste du rire chez les chimpanzés. Elle et son équipe du département de psychologie de l'Université de Portsmouth, l'ont retrouvé chez nos cousins en analysant près de 500 scènes filmées dans le sanctuaire Chimfunshi Wildlife Orphanage, en Zambie. Le communiqué du département de psychologie montre en vidéo deux chimpanzés en pleine crise de rire

    L'étude, publiée dans la revue Emotion, s'est attachée à étudier les différentes formes de rires, soit spontanés, soit en réponse aux rires des autres, sur cinquante-neuf animaux vivant en quatre groupes distincts. Et ce ne sont pas les mêmes. « Je ne m'attendais pas à trouver une telle différence entre les rires de réponse sociale et les rires spontanés », avoue Marina Davila-RossRoss. Comme chez les humains, les rires à vocation sociale sont plus courts que les rires spontanés et ont clairement pour but de favoriser les interactions sociales, explique la chercheuse.

    Marina Davila-Ross en bonne compagnie. © Université de Portsmouth

    Marina Davila-Ross en bonne compagnie. © Université de Portsmouth

    Renforcement des liens sociaux

    D'autres différences sont rapportées par cette étude, assez originale semble-t-il. D'un groupe à l'autre, l'usage du rire social n'est pas tout à fait le même, rapportent les biologistes. Il diffère aussi pour les nouveaux arrivants. « Ma plus grande surprise, note Marina Davila-Ross, a été de constater que les chimpanzés dans un nouveau groupe miment beaucoup plus souvent les comportements des autres que ceux qui vivent dans un groupe où tout le monde se connaît. Cela suggère que le rire mimétique renforce les liens sociaux. » L'équipe remarque que les singes ne se contentent pas de reproduire exactement le rire de l'autre. La réponse est plus complexe que ce que l'on pensait jusque-là.

    Mimer l'autre et rire sont donc des comportements qui semblent similaires entre les humains et les grands singes. « Il y a 5 millions d'années, explique Marina Davila-Ross, les ancêtres des singes et des Hommes ont dû commencer à produire des rires comme réponse sociale non-agressive. Depuis, la capacité à contrôler le rire  a dû s'améliorer considérablement, corollaire des avantages adaptatifs qu'il représente, ce qui explique pourquoi le rire est devenu chez l'Homme un outil sophistiqué et à usages multiples de coopération et de communication sociales. »