Certains reptiles marins, comme le pélamide bicolore, peuvent passer jusqu'à 95 % de leur vie sous l'eau. Pour s'alimenter ? Non. Pour des raisons stratégiques : la forme en « S » de leur plongée, avec des phases de montée progressive, révèle une subtile exploitation de la colonne d'eau à diverses fins physiologiques et écologiques. Les moyens modernes d'investigation ont percé ces secrets reptiliens...

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    Si le pélamide bicolore ou serpent marin à ventre jaune (Pelamis platurus) réalise des apnéesapnées, de 3 h 30 parfois, sur les fonds marins des océans Indien et Pacifique, ce n'est pas pour y chasser ses proies. Il s'agirait surtout pour l'animal de se prémunir de la fatigue occasionnée par la houle de surface, rapporte une étude parue dans le journal Animal Behaviour.

    Outre la quiétude des profondeurs, parfois de 50 mètres, le reptile aquatique apprécierait prendre des pauses dans des colonnes d'eau intermédiaires ; elles lui prodigueraient une protection vis-à-vis des prédateurs des étages supérieurs et inférieurs ainsi qu'un poste d'observation des petits poissons de surface qu'il chasse de jour. Enfin, stationner dans des eaux plus froides qu'en surface, avec selon les saisons jusqu'à 6 °C d'écart entre 0 et 25 mètres de profondeur, contribuerait à réduire ses dépenses énergétiques.

    La plongée des 90 espèces de serpents marins, ici le pélamide bicolore, est peu étudiée contrairement à celle des mammifères marins, tels les phoques ou les manchots, notamment parce qu'il reste difficile d'équiper d'enregistreurs ces petits animaux. © Carpenter0, domaine public

    La plongée des 90 espèces de serpents marins, ici le pélamide bicolore, est peu étudiée contrairement à celle des mammifères marins, tels les phoques ou les manchots, notamment parce qu'il reste difficile d'équiper d'enregistreurs ces petits animaux. © Carpenter0, domaine public

    La vie sous-marine des reptiles se révèle

    Ces hypothèses émanent des résultats de différents calculs réalisés par les biologistes Timothée Cook de l'université du Cap, en Afrique du Sud, et François Brischoux de l'université de La Rochelle, en France, à partir de données collectées par une équipe de scientifiques américains en 1986. Trente ans plus tard, au moyen des actuels outils méthodologiques et analytiques, les données ont permis la modélisationmodélisation de différent paramètres, comme le volumevolume d'airair dans les poumonspoumons du serpent ou la duréedurée de ses plongées. Elles ont aussi permis d'estimer les temps de surface, parfois d'une seconde, autorisant alors le renouvellement de l'air des poumons au cours d'une unique expiration et d'une seule inspiration, et parfois de plusieurs minutes, pour de probables épisodes d'approvisionnement en proies ou, en saison des pluies, en eau moins salée.

    Cette étude apporte un nouvel éclairage sur l'écologie de cette unique espèceespèce du genre Pelamis et sur son comportement sous-marinsous-marin jusqu'à présent méconnu. En outre, pour leurs auteurs, les résultats de ses plongées en forme de « S » enrichiront les connaissances de ce type de comportement observé chez d'autres reptiles, comme les tortues marines.