De multiples restes animaux ont été extraits d'une carrière le long de la Seine, associés à des centaines de restes d'outils, visiblement fabriqués sur place par des hommes de Néandertal, il y a 200.000 ans.

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    L'image que nous nous faisons des néandertaliens a beaucoup changé au fil du temps. Voici une « reconstruction », un technique devenue la spécialité d'Elisabeth Daynès, qui travaille avec des paléontologues. © Ph. Plailly / Eurelios

    L'image que nous nous faisons des néandertaliens a beaucoup changé au fil du temps. Voici une « reconstruction », un technique devenue la spécialité d'Elisabeth Daynès, qui travaille avec des paléontologues. © Ph. Plailly / Eurelios

    A Tourville-la-Rivière, en Seine-Maritime, à 14 kilomètres au sud de Rouen, l'Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap) travaille depuis quatre mois sur un site exceptionnel, où s'accumulent des ossements animaux très nombreux ainsi que des restes d'outils variés. En bordure de la Seine, au creux d'un étroit méandre virant devant Elbeuf, une carrière de sable et de graviers renfermait en effet un trésor, étalé sur environ un hectare, entre 1,5 et 2 mètres sous la surface.

    Les archéologues en ont dégagé une série d'ossements de nombreux mammifères, aurochs, cerfs, chevaux, fouines, lionslions, ours, panthères, putoisputois... En cette époque interglaciaire,  entre -130.000 et 350.000 ans, le climatclimat était tempéré dans la région. La Seine coulait alors à une hauteur plus élevée que celle de son lit actuel et formait déjà des méandres. Des alluvions se sont accumulées là et le fleuve déposait parfois à cet endroit des restes d'animaux dont il avait charrié les cadavres.

    Le site fait parler de lui surtout par les restes d'activité humaine qu'il recèle. Les archéologues n'ont découvert aucun ossement ni aucune trace d'habitation mais un véritable atelier de fabrication d'outils, comportant quelque 500 objets. Datés de 200.000 ans avant le présent, donc du Paléolithique, des silex taillés de multiples formes illustrent la taille de pierre selon la méthode Levallois.

    Des humains bien organisés

    Cette technique consiste à préparer d'abord un nucléus, forme particulière qui servira ensuite, par débitage, à obtenir une ou plusieurs pièces. Ces éclats deviendront, selon leurs formes, des pointes ou des lames, qui feront des couteaux tranchants ou des racloirs.

    Ces outils et cette datation désignent l'homme de Néandertal ou des pré-néandertaliens. Le site de Tourville-la-Rivière montre des accumulations d'outils qui font penser à une sorte d'atelier. En certains endroits se trouvent en effet concentrés des éclats. Dans ces postes de débitage des nucléus, ces humains ont fabriqué en série des outils qui ont servi ensuite à débiter les cadavres d'animaux déposés par le fleuve.

    Ce genre de découverte est très rare, l'ordinaire étant plutôt celui de silex isolés. La présence de ces outils en nombre mais aussi l'absence de traces d'habitations montrent que ces Néandertaliens vivaient ailleurs et venaient là régulièrement pour récupérer de la viande.

    Les fouilles sont aujourd'hui terminées et la société CBN (Carrières et Ballastières de Normandie) peut reprendre son travail. Les archéologues, eux, peuvent maintenant étudier en détail cette belle trouvaille.