Le premier superprédateur marin du Mésozoïque vient d’être décrit. Grâce à ses dents tranchantes, l’ichtyosaure Thalattoarchon saurophagis ne devait pas craindre des animaux aussi grands que lui. Petit détail supplémentaire, mais qui a son importance : ce reptile marin mesurait au minimum 8,6 m de long.

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    Thalattoarchon saurophagis, dont la cavité orbitale et certaines dents sont visibles sur cette photographie, occupait une position dans les chaînes alimentaires du Mésozoïque similaire à celle des actuels orques et requins blancs. © John Weinstein, The Field Museum, Chicago

    Thalattoarchon saurophagis, dont la cavité orbitale et certaines dents sont visibles sur cette photographie, occupait une position dans les chaînes alimentaires du Mésozoïque similaire à celle des actuels orques et requins blancs. © John Weinstein, The Field Museum, Chicago

    Les superprédateurs ne manquaient pas dans les océans du Jurassique et du Crétacé. Certains crocodiles marins, mais aussi des pliosaures, des plésiosaures, des mosasaures ou encore quelques requins, pouvaient en effet s'en prendre à des proies présentant une taille semblable ou supérieure à la leur. Un groupe animal qui dominait également les chaînes alimentaires de l'époque manque dans cette liste : les ichtyosaures. Ces reptilesreptiles marins, mais d'origine terrestre, ont une longue histoire puisqu'ils peuplèrent les océans durant 160 millions d'années. Le dernier d'entre eux se serait cependant éteint 90 millions d'années avant la crise du Crétacé-Tertiaire qui sonna le glas des dinosauresdinosaures.  

    Les restes d'un nouvel ichtyosaure, l'un des tout premiers, ont été découverts en 1998 par Jim Holstein dans les montagnes Augusta (formation géologique de Favret) situées dans le Nevada (États-Unis). Ce n'est cependant qu'en 2008 qu'il fut financièrement possible de les extraire de leur gangue de pierre. Leurs secrets viennent d'être dévoilés dans la revue Pnas par une équipe américano-germanique menée par Nadia Fröbisch (Leibniz Institute for Research on Evolution and Biodiversity, Allemagne). L'animal exhumé serait au premier superprédateur marin connu du MésozoïqueMésozoïque, puisqu'il a vécu voilà 244 millions d'années !

    Gros plan sur les dents de la mâchoire inférieure de l'ichtyosaure <em>Thalattoarchon saurophagis. </em>Il a fallu trois semaines pour extraire le fossile de la roche. Il a ensuite été transporté par hélicoptère puis par camion jusqu'au <em>Field Museum</em> de Chicago. © Nicole Klein, université de Bonn, Allemagne

    Gros plan sur les dents de la mâchoire inférieure de l'ichtyosaure Thalattoarchon saurophagis. Il a fallu trois semaines pour extraire le fossile de la roche. Il a ensuite été transporté par hélicoptère puis par camion jusqu'au Field Museum de Chicago. © Nicole Klein, université de Bonn, Allemagne

    Un crâne massif et des dents tranchantes

    Le squelette se compose d'un crânecrâne pourvu de sa mâchoire (seul le bout du museau manque), d'une colonne vertébralecolonne vertébrale complète et de quelques éléments de la ceinture pelvienneceinture pelvienne et des nageoires postérieures. Thalattoarchon saurophagis, littéralement le roi des mers mangeur de lézards, mesurait de son vivant plus de 8,6 m de long, ce qui fait de lui l'un des plus grands ichtyosaures connus des TriasTrias inférieur et moyen. La morphologiemorphologie de ses dents a été utilisée pour caractériser ses habitudes de vie ainsi que son comportement alimentaire. Elles sont larges (2 à 3 cm), comprimées latéralement, portées par une puissante mâchoire et, surtout, dominées par deux arêtes tranchantes.  

    Thalattoarchon saurophagis aurait vécu quatre millions d'années après la recolonisation avérée des océans par les reptiles, sur la base de traces fossilesfossiles, et huit millions d'années après la crise biologique du Permien-Trias. Pour rappel, cette période d'extinction vit disparaître entre 80 et 96 % des espècesespèces marines. L'apparition aussi rapide d'un superprédateur après un tel événement dévastateur pour la biodiversitébiodiversité démontre que les écosystèmesécosystèmes marins ont récupéré plus rapidement que leurs homologues terrestres. Ils avaient en effet plus de 10 millions d'années d'avance sur leurs concurrents, les dinosaures étant apparus voilà 230 millions d'années. 

    Ainsi, grâce à Thalattoarchon saurophagis, la dynamique évolutive de nos océans s'éclaire un peu plus. Peut-être de quoi anticiper l'avenir... puisque l'Homme causerait actuellement, selon certains, une nouvelle extinction de masse