Comment l’Homme a-t-il pénétré en Europe ? Une partie de la réponse réside peut-être dans le site préhistorique dit de la carrière Thomas I, près de Casablanca au Maroc. Ce dernier vient de livrer une mandibule d’Homo erectus dont la première datation donne un âge d’au moins 500.000 ans.

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    Mandibule fossile humaine découverte le 15 mai 2008 sur le site de la carrière Thomas I à Casablanca. Crédit : Jean-Paul Raynal

    Mandibule fossile humaine découverte le 15 mai 2008 sur le site de la carrière Thomas I à Casablanca. Crédit : Jean-Paul Raynal

    Depuis plusieurs années, le site de la carrière Thomas attire l'attention des paléoanthropologues en raison de son importance pour la connaissance des premiers peuplements d'Afrique du Nord-Ouest. En effet, le peuplement de l'Europe du Sud par le genre Homo s'est peut-être partiellement produit via le Maroc et l'Espagne.

    Toutefois, pendant longtemps, alors que les premiers hominidés peuplent l'Afrique orientale, tel les australopithèques, s'aventurent vers l'Ouest jusqu'au Tchad et migrent en direction du Proche Orient, l'Afrique du Nord-Ouest semble un territoire inexploré par les ancêtres de l'humanité. Il semble que ce soit Homo erectus qui ait été le premier a l'arpenté il y a un million d'années, peut-être en traversant le Sahara.

    La carrière Thomas I au Maroc. Crédit : Archéo-Logis/CDERAD

    La carrière Thomas I au Maroc. Crédit : Archéo-Logis/CDERAD

    Le paysage de l'époque ressemblait à la savane avec des lacs sur les berges desquelles ont été retrouvés des outils en pierre taillée. Ceux que l'on a découverts dans la carrière Thomas sont caractéristiques de la civilisation de l'Acheuléen qui désigne à la fois une période du Paléolithique inférieur et l'industrie lithique propre à cette période. Les silex taillés de type biface en sont de célèbres exemples.

    Des gazelles et des hominidés au Maroc il y a un demi million d'années

    On ne retrouve pas que des outils dans la carrière Thomas et dès 1969 une hémi-mandibulemandibule d'Homo erectus y avait été découverte. Hélas, il n'avait pas été possible à l'époque de la relier à une date précise. Ce n'est plus le cas aujourd'hui grâce aux travaux d'une équipe franco-marocaine co-dirigée par Jean-Paul Raynal, directeur de recherche au CNRS et membre du laboratoire PACEA, qui vient de mettre au jour le 15 mai 2008 une mandibule complète d'Homo erectus.

    Cet os se trouvait sous une stratestrate qui contenait quatre dents d'Homo erectus (trois prémolaires et une incisive) dont l'une avait pu être datée. Son âge de 500.000 ans en fait l'un des plus anciens fossilesfossiles humains découverts au Maroc.

    Jean-Paul Raynal et le professeur Fatima-Zohra Sbihi-Alaoui de l'Institut National des Sciences de l'Archéologie et du Patrimoine (Rabat) dégageant la mandibule fossile. Crédit : Rosalia Gallotti
    Jean-Paul Raynal et le professeur Fatima-Zohra Sbihi-Alaoui de l'Institut National des Sciences de l'Archéologie et du Patrimoine (Rabat) dégageant la mandibule fossile. Crédit : Rosalia Gallotti

    La strate où les dents ont été retrouvées a aussi livré des restes d'animaux comme des babouins, des gazelles, des équidés, des rhinocérosrhinocéros, des éléphants et même des ours qui composaient vraisemblablement le menu de nos ancêtres.

    Notons toutefois que la morphologiemorphologie de la mandibule retrouvée diffère de celle d'une variété maghrébine d'Homo erectus appelée Homo mauritanicus, dont l'âge est estimé à 700.000 ans à partir du site de Tighenif en Algérie, lieu de sa découverte. Mentionnons aussi d'autres sites marocains ayant livré des restes paléoanthropologiques connus sous les noms d'hommes de Salé, d'El Hajeb et de Sidi Abderrahmane.