Dans le sud du désert libyen, 20 corps d’hommes, de femmes et d’enfants ont été découverts. Ils ont été enterrés à l’âge de pierre. Des œuvres rupestres et d’autres découvertes montrent en outre que la culture du peuple s’est adaptée au climat au fil des millénaires…

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    Le désert du Sahara est rempli de trésors archéologiques. Il existe en particulier une longue tradition de l'archéologie funéraire dans le Tadrart Acacus et ses environs, une désertique à la frontière entre la Libye et l'Algérie, dans le Sahara central. Des restes humains, des tombes, des monuments en pierre et des surfaces aménagées ont été retrouvés dans les montagnes, le long des vallées des oueds et dans les mers de sable. Mais souvent, l'état de conservation des découvertes est très mauvais, si bien qu'il est difficile de les dater ou d'en apprendre quoi que ce soit.

    Le squelette d'une femme découverte dans la zone funéraire, un abri de roche dédié aux femmes et enfants. Elle avait entre 30 et 40 ans lorsqu'elle est morte. © R. Castelli

    Le squelette d'une femme découverte dans la zone funéraire, un abri de roche dédié aux femmes et enfants. Elle avait entre 30 et 40 ans lorsqu'elle est morte. © R. Castelli

    Dans le sud de cette région, dans le cadre du Wadi Takarkori Project, des archéologues de la Sapienza Università di Roma ont récemment mis au jour 20 squelettes. Les corps de 15 femmes et enfants ont été découverts enterrés dans un abri de roche, une zone bien démarquée du reste du site. Autour, les corps de cinq hommes et juvéniles ont été retrouvés sous des empilements de pierres, les tumulus. La datation des os a révélé que ces corps ont été enterrés voilà 4.200 à 8.000 ans, c'est-à-dire à l'âge de pierreâge de pierre.

    Durant cette période de la préhistoire, le désert du Sahara était couvert de broussailles et avait même quelques parcelles bien vertes. À l'âge de pierre, l'Homme commence à créer des outils dans ce matériaumatériau. Le bois et les os étaient également utilisés, mais le silex était travaillé, taillé pour fabriquer des objets coupants. Les manifestations d'art rupestre découvert alentour montrent d'anciens élevages de bétail, tels que des vaches, qui exigent beaucoup d'eau. Les archéologues ont en outre découvert des huttes, des os d'animaux, et des pots avec des traces des premiers produits laitiers fermentés en Afrique.

    La vue d'un des tumulus, sous lesquels les hommes et les juvéniles ont été découverts. © M. A. Tafuri

    La vue d'un des tumulus, sous lesquels les hommes et les juvéniles ont été découverts. © M. A. Tafuri

    Le peuple s’adapte au climat

    La découverte de ces corps montre que la culture a évolué avec le climat au fil des millénaires. Les femmes et enfants ont été enterrés voilà 5.600 à 7.300 ans. Les hommes et les juvéniles ont été enterrés dans les tumulustumulus voilà 4.200 ans, lorsque la région est devenue plus aride. En effet, la conservation des œuvres rupestres confirme l'état plus sec. Les peintres ont commencé à représenter des chèvres, qui ont besoin de beaucoup moins d'eau que les vaches. L'étude détaillée des découvertes est publiée dans le numéro du mois de mars du Journal of Anthropological Archaeology.

    L'abri de roche funéraire schématisé. Les corps représentés sont les principaux excavés. Il s'agit de femmes et d'enfants. Dans l'encart à gauche, une vue à plus grande échelle. Le demi-cercle T1 désigne l’emplacement d'un des tumulus découverts. © F. Del Fattore, M. Gallinaro

    L'abri de roche funéraire schématisé. Les corps représentés sont les principaux excavés. Il s'agit de femmes et d'enfants. Dans l'encart à gauche, une vue à plus grande échelle. Le demi-cercle T1 désigne l’emplacement d'un des tumulus découverts. © F. Del Fattore, M. Gallinaro

    Ce lieu de sépulturesépulture est unique, car il a été utilisé pendant des millénaires. « Ce devait être un lieu de mémoire », commente Anne Tafuri, coauteure de la publication. Génération après génération, les Hommes ont enterré leurs proches dans ce lieu. Si l'on en croit les archéologues du site, toute cette région est recouverte de vestiges archéologiques de la sorte. Les scientifiques souhaiteraient protéger cette zone d'étude. Proche de la frontière entre la Libye et le Niger, elle est très fréquentée par des groupes armés.