Vous aimez le chant des cigales et des sauterelles qui berce vos étés ? Sachez qu'il y a 165 millions d'années, certains orthoptères, comme Archaboilus musicus, chantaient déjà pour attirer leur partenaire sexuel, comme le prouvent des fossiles très bien conservés. Et les biologistes sont parvenus à reconstituer leur chanson...

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    Que faisiez-vous il y a 165 millions d'années ? « Je chantais, ne vous déplaise ». Au Jurassique, déjà, les insectes chantaient. Ce n'était pas des cigales comme dans la fable, mais de proches parents des grillons et des sauterellessauterelles, dont un spécimen fossile a été découvert en excellent état. Si bon qu'il a été possible de reconstituer les sons qu'émettait cet hexapode, apportant de nouvelles informations sur l'évolution de la communication acoustique chez les insectes.

    Le fossile retrouvé appartient à un orthoptère de la famille des Haglidés, désormais éteinte, mais dont les plus proches parents actuels sont les Tettigonidés, des sauterelles à longues antennes (ce sont les sauterelles au sens strict). Il a été découvert dans les roches du Jurassique moyen de la formation de Jiulongshan, en Chine. L'holotype se résume à une paire d'ailes antérieures dont le fossile est très bien conservé, comme l'expliquent les auteurs dans Pnas.

    Archaboilus musicus pratiquait la stridulation

    Pour ces chercheurs de l'Université normale de la capitale (Pékin), il s'agit d'une nouvelle espèceespèce, qu'ils ont baptisée Archaboilus musicus, vivant il y a 165 millions d'années. Un nom d'espèce qui fait référence aux sons produits par l'animal.


    Reconstitution du chant de l'orthoptère Archaboilus musicus, nouvelle espèce d'Haglidé, qui vivait il y a 165 millions d'années dans les forêts de conifères du Jurassique. © Gu et al. 2012, Nature Geoscience

    Car la découverte ne s'arrête pas là. À l'instar des membres de la famille des Tettigonidés, A. musicus était un fervent musicien, comme l'indiquent les caractéristiques physiquesphysiques de ses ailes. En effet, ce sont bien les ailes des orthoptères qui leur permettent d'émettre des sons. Elles disposent d'une veine dentée (la râpe stridulatoire) et d'un grattoir (le plectrum). Pour produire un son, l'insecte frappe l'un des plectrums sur les dents de la râpe. C'est la stridulation.

    Un chant adapté à la vie nocturne et aux forêts du Jurassique

    Les fossiles de A. musicus indiquent la présence de ces caractéristiques. En les comparant avec celles de 59 espèces d'orthoptères vivants, les chercheurs ont pu établir que cet insecte émettait des sons sur une seule fréquence et très longs. Un son particulier, produit par des ailes identiques alors que chez certaines espèces, c'est toujours l'une qui frotte l'autre (les deux n'ayant pas les mêmes caractéristiques). Ce qui permet également d'affirmer que cette symétrie - tout comme le son qui en découle - est un caractère ancestralcaractère ancestral.

    Ce son correspond d'ailleurs parfaitement avec l'habitat de l'animal qui avait été reconstitué au cours de travaux antérieurs : une forêt de conifères. Grâce à cette communication, les mâles pouvaient donc être entendus par les femelles sur de longues distances. Mais également par leurs prédateurs, auxquels ils échappaient probablement en étant actifs la nuit uniquement, tout comme leurs parents proches qui vivent actuellement.