En mars 2014, le fossile d'un étrange reptile aquatique, de près de trois mètres de long, était découvert en Chine. Sa dentition, faite de centaines de dents très pointues, intrigue les scientifiques, au point qu'ils l'ont baptisé en agrégeant les mots (en latin) dent, atypique et unique. La première hypothèse fut celle d'un organe de filtration pour retenir les petits animaux vivant dans le sable. En 2016, d'autres chercheurs en font un herbivore. Ce qui en ferait un pionnier...

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    Article initial paru le 27 mars 2014, mis à jour le 10 février 2017

    Le reptile découvert en Chine vivait il y a environ 240 millions d'années. Long de trois mètres, il possédait un rostre vertical lui donnant un aspect tout à fait inhabituel et, surtout, une dentition très particulière dont les chercheurs débattent encore.

    Les faits : une nouvelle créature originale découverte en Chine

    Des paléontologuespaléontologues décrivent dans Naturwissenschaften un nouvel animal fossile découvert dans le sud-ouest de la Chine. Cette créature avait un aspect plutôt effrayant : elle possédait des centaines de dents en aiguille et un rostre vertical. L'espèce appelée Atopodentatus unicus vivait au Trias moyen et a été trouvée dans la faune de Luoping, datée du Trias et située dans la province du Yunnan.

    La faune de Luoping est exceptionnellement bien conservée et comprend une grande diversité d'animaux marins : des arthropodesarthropodes (crustacéscrustacés, limules, etc.), poissonspoissons, reptilesreptiles, bivalvesbivalves, gastéropodesgastéropodes, bélemnites, ammonitesammonites, échinodermeséchinodermes, brachiopodesbrachiopodes, foraminifèresforaminifères, etc.

    Représentation d’<em>Atopodentatus unicus</em>, le fossile découvert en Chine. Sa bouche est tout à fait particulière et ses dents, très nombreuses, servaient probablement de filtre. Au second plan, un individu est représenté en train de chercher des petits animaux dans le sable. Mais il ne s'agit que d'une hypothèse. © Nobu Tamura, cc by nc nd 3.0

    Représentation d’Atopodentatus unicus, le fossile découvert en Chine. Sa bouche est tout à fait particulière et ses dents, très nombreuses, servaient probablement de filtre. Au second plan, un individu est représenté en train de chercher des petits animaux dans le sable. Mais il ne s'agit que d'une hypothèse. © Nobu Tamura, cc by nc nd 3.0

    Atopodentatus unicus est un sauroptérygien, un groupe de reptiles aquatiques qui descendent d'ancêtres terrestres. Très présents durant le Mésozoïque, ou ère secondaireère secondaire, ils se sont éteints au moment de la crise K/T, comme tant d'autres espèces, dont les dinosauresdinosaures. Le squelette du fossile que les chercheurs ont découvert était quasiment complet et mesurait environ 2,75 mètres du museau à la queue. La morphologiemorphologie du nouveau fossile ne ressemble à aucune autre espèce de reptile connue à ce jour.

    Décryptage : un reptile atypique par sa dentition

    Dans leur article, les chercheurs expliquent qu'ils ont nommé ce reptile Atopodentatus unicus à partir du latin atopo en raison de sa dentition atypique et dentatus pour « dent ». Le terme unicus souligne sa morphologie unique à ce jour.

    La région de Luoping (en rose), où ont été trouvés les restes d’un reptile atypique, se trouve dans le sud de la Chine (représentée en haut à gauche), dans la province du Yunnan (ici en gris clair). En jaune, la préfecture de Qujing. © Croquant, Wikimedia Commons, cc by sa 3.0

    La région de Luoping (en rose), où ont été trouvés les restes d’un reptile atypique, se trouve dans le sud de la Chine (représentée en haut à gauche), dans la province du Yunnan (ici en gris clair). En jaune, la préfecture de Qujing. © Croquant, Wikimedia Commons, cc by sa 3.0

    Le fossile découvert près du village de Daozi (Dawazi) appartient aux diapsides. D'après les scientifiques, c'était probablement un animal aquatique ou semi-aquatique. Les principales caractéristiques qui le rendent si original sont donc son rostre vertical et sa dentition.

    En effet, le rostre, ou « museau » de l'animal, se courbe fortement vers le bas, et de façon verticale. De plus, l'extrémité antérieure de la mandibulemandibule (l'os de la mâchoire) s'étend à la fois dorsalement et ventralement pour former une structure qui évoque une pelle. La spécialisation des mâchoires et de la dentition indique que le reptile se serait adapté à une alimentation trouvée au fond des mers.

    No panic : des dents incapables de mâcher

    La dentition du fossile forme une sorte de barrière, qui rappelle un peigne. Elle compte entre 175 et 190 dents délicates dans chaque branche des mâchoires supérieure et inférieure. Certaines dents ressemblent à des aiguilles et d'autres à des lames. Au centre de la mâchoire du haut qui porteporte une fissure palatine, les dents sont organisées verticalement en 35 arrangements.

    Tous les cher'cheurs sont d'accord : cette dentition était trop fine et fragile pour permettre de s'attaquer à de grosses proies. D'après les auteurs de la première description, elle devait servir à filtrer les vers marins et autres petits animaux des fonds océaniques. La forme inhabituelle de la mandibule en forme de pelle permettait probablement de ramasser la nourriture que les dents devaient ensuite filtrer.

    Une autre équipe, en mai 2016, diffusait dans Science une explication toute différente : A. unicus était un herbivoreherbivore. Sa dentition lui aurait servi à arracher les alguesalgues poussant sur le fond. Si l'hypothèse est vraie, elle ferait de cet animal le plus ancien reptile marin herbivore connu.