Un passereau utilise différents sons qu'il combine de plusieurs manières pour envoyer des messages à ses congénères. La complexité est faible mais offre un nouvel éclairage sur les origines du langage humain.

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    Combiner des sons pour créer des signaux significatifs n'est pas l'apanage des êtres humains, les pomatostomes à calotte marron le font aussi. © Ron Knight, Wikimedia Commons, 2.0

    Combiner des sons pour créer des signaux significatifs n'est pas l'apanage des êtres humains, les pomatostomes à calotte marron le font aussi. © Ron Knight, Wikimedia Commons, 2.0

    L'Homme n'est pas le seul à combiner des éléments acoustiques pour construire un message. Un passereaupassereau, vivant en Australie, en est capable aussi. Le sujet de l'étude, parue dans Plos Biology, est le pomatostome à calotte marron (Pomatostomus ruficeps), petit oiseau des régions australiennes arides. Cette espèce ne chante pas, mais émet des appels discrets constitués de petits sons distincts les uns des autres.

    « Nous pensons que ces oiseaux peuvent choisir de réorganiser les sons pour créer un nouveau sens car combiner deux sons existants est plus rapide que de les faire évoluer en un seul et nouveau son », explique Andrew Russell, chercheur à l'université d'Exeter, en Angleterre, et coauteur de l'article.

    Très bavards, les pomatostomes à calotte marron ont des vocalises territoriales stridentes, irrégulières, mais mélodieuses. © Pookie Fugglestein, Wikimedia Commons, domaine public

    Très bavards, les pomatostomes à calotte marron ont des vocalises territoriales stridentes, irrégulières, mais mélodieuses. © Pookie Fugglestein, Wikimedia Commons, domaine public

    Comme l'être humain, le pomatostome recourt à des phonèmes

    Pour le savoir, l'équipe a mené plusieurs tests. Dans la nature, les oiseaux associent différemment deux sons distincts, nommés A et B, suivant leur comportement : en vol, ils émettent un appel AB et lorsqu'ils nourrissent leur progéniture au nid, ils utilisent la composition BAB.

    En les exposant à des appels enregistrés, les oiseaux se montrent capables de les discriminer. La preuve en est donnée par leur réaction : à l'écoute d'un son BAB, ils se tournent vers leur nid, alors qu'ils surveillent l'arrivée potentielle d'oiseaux en vol quand ils entendent « AB ». En outre, les individus réagissent de la même manière lorsqu'ils perçoivent des compositions BAB fabriquées par les scientifiques à partir des compositions naturelles AB et vice-versa.

    Pour les auteurs de l'expérience, il s'agit de la première preuve scientifique selon laquelle la capacité à générer un nouveau message à partir de la réorganisation d'éléments n'est pas le propre de l'Homme. On sait toutefois depuis 2009 que des singes cercopithèques utilisent une syntaxe pour grouper des sons dont chacun a le sens d'un mot (voir Des primates inventent la syntaxe).

    Chez le passereau, le son B serait l'élément différenciateur entre le sens du vol et celui de l'alimentation, un peu comme la lettre « z » distingue les mots « zapper » et « happer ». En linguistique, cet élément s'appelle un phonèmephonème. Ce petit oiseau en utiliserait une quinzaine pour interagir avec ses congénères.

    Bien que cette structuration de phonèmes reste très simple, elle pourrait aider à comprendre comment l'aptitude à générer un nouveau sens a pu évoluer vers notre langage chez nos ancêtres hominidéshominidés, concluent les chercheurs, les premières formes de phonèmes structurés ayant peut-être originellement pris une forme similaire à celle des passereaux.