Voilà qui est fait, la goélette Tara a franchi le passage du Nord-Ouest, mais avec une aide extérieure. Les difficultés ne se sont pas présentées dans le détroit de Bellot, mais bien dans le canal du Prince-Régent qui lui fait suite. Un brise-glace canadien a dû y ouvrir une route, car la glace le recouvrait à 95 % sur plusieurs dizaines de kilomètres. Certes, un défi de Tara Ocean Polar Circle n’a pas été relevé, mais cela ne change rien au succès du programme scientifique.

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    Pour sortir du passage du Nord-Ouest, Tara a été escorté par le CCGS Louis S. St-Laurent. Avec son autonomie de 43.000 km, ce brise-glace canadien long de 120 m peut rester 205 jours en mer. © F. Aurat, Tara Expéditions

    Pour sortir du passage du Nord-Ouest, Tara a été escorté par le CCGS Louis S. St-Laurent. Avec son autonomie de 43.000 km, ce brise-glace canadien long de 120 m peut rester 205 jours en mer. © F. Aurat, Tara Expéditions

    Ce vendredi 27 septembre, la goélette Tara s'est engagée dans le détroit de Bellot (Canada) comme prévu. Il ne lui a fallu que 4 h pour franchir ce bras de mer long de 35 km, puisqu'il était finalement libre de glace. Pour pleinement profiter de ce moment de grâce, le capitaine Loïc Vallette et son équipage ont hissé les voiles, même si le vent ridait à peine la surface de l'eau.

    À la sortie de ce délicat passage, les scientifiques ont pris le temps de réaliser une nouvelle station de prélèvement avant que le bateau ne poursuive sa route en direction du nord-est, sur le canal du Prince-Régent. À cette occasion, la rosetterosette CTD a été immergée à 100 m de profondeur, puis remontée avant que deux traits de plancton ne soient réalisés plus en surface.

    La situation s'est ensuite compliquée sur le chemin vers la presqu'île de Brodeur, tôt le samedi matin. La goélette Tara cherchait alors à rejoindre le flanc ouest de ce site pour profiter d'un couloir libre de glace qui, d'après les dernières cartes, aurait permis à l'embarcation de rejoindre le détroit de Lancaster. Mais les choses se sont déroulées différemment. Dans la matinée, l'équipage a été contacté par radio par le Canadian Coast Guard Louis S. St Laurent, qui n'est autre qu'un brise-glace. Le commandant du navire rouge, marqué d'une feuille d'érable blanche sur sa cheminéecheminée, a alors précisé qu'il avait reçu l'ordre d'escorter la goélette afin de franchir un passage couvert à 95 % par de la glace (épaisseur de 15 cm).

    Le détroit de Bellot est bordé par des pentes abruptes montant jusqu'à 450 m d'altitude sur sa rive nord, et jusqu'à 750 m sur sa rive sud. © V. Hilaire, Tara Expéditions

    Le détroit de Bellot est bordé par des pentes abruptes montant jusqu'à 450 m d'altitude sur sa rive nord, et jusqu'à 750 m sur sa rive sud. © V. Hilaire, Tara Expéditions

    Un pari manqué, mais une étude inédite du plancton qui se poursuit

    Gardant une distance de sécurité de 800 m, Tara a donc pris le sillage du brise-glace sur plus de 50 miles (soit environ 80 km), pour finalement traverser la barrière de glace en une demi-journée. Il lui aurait fallu bien plus de temps et d'efforts sans ce « poisson-pilote ». Il s'agissait de la dernière difficulté du passage du Nord-Ouest. Il a donc été franchi avec succès, mais avec assistance sur la fin. Ainsi, l'expédition Tara Ocean Polar Circle a manqué à l'un de ses objectifs, qui était de faire le tour de l'Arctique sans aide extérieure.

    Cependant, cette déconvenue ne remet pas en cause sa mission principale : caractériser et étudier la biodiversitébiodiversité planctonique de l'Arctique. Puisqu'aucun hivernage n'est plus à craindre, les travaux scientifiques peuvent continuer comme prévu. Une station biologique longue était d'ailleurs en cours de préparation samedi soir dernier, une fois le brise-glace reparti vers d'autres missions de sécurisation, tandis que la goélette s'apprêtait à voguer pour deux jours dans le détroit de Lancaster. Elle rejoindra ensuite le village inuit d'Arctic Bay (690 habitants), avant de poursuivre sa route en direction du Groenland.