Depuis longtemps, dans les îles Salomon, des habitants parlent de l’existence de vika, un rat géant vivant dans les arbres. Intrigué, un spécialiste des mammifères a finalement pu en débusquer un. Voici à quoi il ressemble et comment il a été découvert.

au sommaire


    Cela faisait des années que Tyrone Lavery, spécialiste des mammifères, le recherchait. Sa persévérance a fini par payer. La nouvelle espèce, qu'il décrit dans la revue Journal of Mammalogy, s'appelle Uromys vika, en référence à vika, nom donné à cet animal par la population de l'île de Vangunu, dans l'archipel des Salomon.

    Tout commence en 2010, lors du premier séjour du mammalogiste dans ces îles. Alors postdoc au Field Museum de Chicago, celui-ci entendit parler de l'existence de rats géants vivant dans les arbres et qui seraient capables d'ouvrir les noix de coco avec leurs dents. Piqué par la curiosité, il se mit immédiatement en quête de cet animal chanté dans les cultures locales. En outre, pour lui et ses collègues, il s'agissait de faire vite car la déforestationdéforestation réduit un peu plus d'année en année les chances de rencontrer la créature et, avec elle, d'autres nouvelles espèces insulaires.

    Individu trouvé après la chute d’un arbre abattu. Blessé, il n’a pas survécu. La déforestation met en danger d’extinction cette espèce unique au monde. © Tyrone Lavery, <em>The Field Museum</em>

    Individu trouvé après la chute d’un arbre abattu. Blessé, il n’a pas survécu. La déforestation met en danger d’extinction cette espèce unique au monde. © Tyrone Lavery, The Field Museum

    Une espèce de rats qu'on ne trouve nulle part ailleurs

    Le chercheur n'était pas le premier à s'être mis sur les traces de ce rat géant mais, au fil des décennies, beaucoup de ses collègues, revenus bredouilles, ont renoncé. Lui-même n'était pas loin de le faire aussi d'ailleurs : « J'ai commencé à me demander s'il s'agissait vraiment d'une espèce distincte ou si les gens appelaient simplement vika les rats noirs [Rattus rattus s'est répandu dans les îles avec les colons, NDLRNDLR] ».

    Puis, un premier rat fut aperçu fin 2015, alors qu'il sortait, blessé, d'un arbre abattu. « Dès que j'ai examiné le spécimen [l'animal est mort de ses blessures, NDLR], je savais que c'était quelque chose de différent, raconte-t-il. Il n'y a que huit espèces connues de rats indigènesindigènes aux îles Salomon et en regardant les traits de son crânecrâne, je pouvais en exclure plusieurs ». Plus tard, la comparaison de son ADNADN avec ceux d'autres rats a confirmé qu'il s'agissait bien d'une nouvelle espèce. C'est le premier spécimen découvert sur les îles Salomon en quatre-vingts ans.

    Uromys vika peut mesurer jusqu'à 50 cm de long et peser un kilogrammekilogramme. C'est surtout dans la canopéecanopée qu'il évolue -- ce qui le rendait difficile à débusquer. Comme beaucoup d'autres animaux vivant dans ces îles (plus de la moitié, en fait), ce rat, à la belle fourrure fauve, est unique au monde. Ses ancêtres ont probablement dérivé jusqu'à cette île ; il s'est ensuite distingué des autres rats restés sur les continents.

    Des sabots ? Non, des noix de coco percées par le rat <em>vika </em>avec ses dents. Le rongeur en est très friand. © Tyrone Lavery, <em>The Field Museum</em>

    Des sabots ? Non, des noix de coco percées par le rat vika avec ses dents. Le rongeur en est très friand. © Tyrone Lavery, The Field Museum

    Vika est en danger critique d'extinction

    À peine identifié, vika est déjà classé parmi les espèces en danger critique d’extinction en raison de la destruction (rapide) de son habitat, la forêt. Avec cette recherche, Tyrone Lavery espère trouver de nouveaux soutiens pour développer l'aire de conservation de Zaira et préserver ce rat. « Trouver un nouveau mammifère est vraiment rare. Il n'y en a probablement que quelques dizaines de découverts chaque année », commente le mammalogiste, très fier d'en avoir documenté un.