Les réserves marines seraient, outre des outils de conservation, un moyen de gestion efficace des ressources halieutiques (poissons, mollusques, etc.). « Cela semble vraiment évident, mais cela n’avait jamais été testé » indique Peter Raimondi, co-auteur de l’étude. C’est désormais chose faite par le projet Pangas, qui associe chercheurs et communautés de pêcheurs mexicains.

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    Suivi sous-marin des poissons d'une réserve marine. © Robert Schwemmer/NOAA

    Suivi sous-marin des poissons d'une réserve marine. © Robert Schwemmer/NOAA

    Les réserves marines sont des zones maritimes consacrées à la préservation des écosystèmes, à la conservation des espèces et au maintien des ressources halieutiques. Le degré de protection de ces zones peut aller de l'interdiction la plus stricte à l'autorisation d'exploitation des ressources sous certaines conditions. Prises séparément, ces zones concernent plutôt les espèces sédentaires, aux déplacements limités, que les grands nageurs comme les thons.

    Une étude récente du projet Pangas sur le réseau de réserves marines de Puerto Penasco, établi en 2002 dans le Golfe de Californie, au nord-ouest du Mexique, vient de valider un concept clef de ces réserves marines : la colonisation des zones exploitées par la progéniture née dans les zones protégées. « Nous avons créé un modèle pour prévoir la dispersion des larves hors des réserves, et les résultats obtenus se sont révélés complètement en accord avec nos prédictions » souligne Peter Raimondi, professeur d'écologieécologie de l'UCSC (Université de Californie - Santa-Cruz). La densité des juvéniles en aval des réserves a en effet triplé en deux ans selon les observations réalisées in situ.

    Cliquer pour agrandir. Localisation des réserves marines, des zones suivies et des courants locaux du Golfe de Californie. © Richard Cudney-Bueno <em>et al.</em>

    Cliquer pour agrandir. Localisation des réserves marines, des zones suivies et des courants locaux du Golfe de Californie. © Richard Cudney-Bueno et al.

    Passer entre les mailles du filet

    Le professeur d'écologie de l'UCSC Mark Carr explique ces résultats par la possibilité offerte aux poissonspoissons adultes de grandir sans être pêchés. « Quand vous avez une population protégée, vous obtenez non seulement des réactions en chaîneréactions en chaîne quand les poissons sortent de la réserves et sont pêchés, mais vous avez aussi un impact majeur sur la production de larve. Les poissons plus gros, plus âgés présents dans la réserve produisent une grande quantité de larves qui renfloue les populations de poissons extérieures. » La règlementation des pêchespêches impose en effet, pour protéger les jeunes et le renouvellement des populations, une taille minimale d'exploitation des individus. Hélas, cela condamne généralement les femelles les plus âgées et les plus grosses, importantes dans le maintien des populations, car capables de produire de plus grandes quantités de larves.

    Le succès écologique et économique de ce réseau de réserves, créé et géré collectivement par les pêcheurs locaux en réaction à la diminution des prises, a malheureusement été détruit du fait de même de sa réussite, lorsque les braconniers en ont eu ventvent. Selon Richard Cudney-Bueno, co-fondateur du projet Pangas, « l'ensemble du système a été balayé par la destruction de la structure sociale », ce qui montre que si un contrôle local des ressources peut fonctionner, il doit être soutenu plus fortement par les gouvernements.

    Depuis, le succès de ce projet a été reconnu et le gouvernement mexicain y a apporté son soutien. Il a notamment créé des zones de pêche exclusives réservées aux coopératives avec une valeur légale. Pangas travaille maintenant avec le gouvernement mexicain pour établir des plans de gestion pour une série d'espèces et le principe des réserves marines est adopté dans d'autres zones du golfe. A plus grande échelle, ce sont les aires marines protégées qui se développent partout dans le monde sur le même principe, désormais validé expérimentalement.

    Les chercheurs souhaitent aller plus loin et «  identifier réellement quels aspects des réserves sont importants pour influencer les effets positifs » constatés systématiquement dans les suivis des zones protégées.