Jean-Louis Étienne nous a accordé un entretien exclusif, dont voici la suite. Selon lui, le principal défi actuel est la gestion de nos ressources en énergie. Un chantier colossal.

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    Observateur privilégié, Jean-Louis Étienne, vulgarisateur aguerri et parrain de Futura, revient sur les questions environnementales préoccupantes. La lutte contre le réchauffement climatique est indispensable mais la priorité est à la transition énergétique, estime-t-il. Et, pour convaincre, il ne faut pas de grands discours mais de l'action et porter ses efforts sur « sa sphère d'influence ». Cultiver notre jardin, en somme...

    Futura : Au point où nous en sommes, ne vaut-il pas mieux s'adapter que lutter contre le réchauffement climatique ?

    Jean-Louis ÉtienneJean-Louis Étienne : Il faut bien sûr faire les deux. Comme je le disais lors de notre précédent entretien, nous en sommes aux premières confirmations. Sur les côtes, par exemple, les falaises reculent. Il faut bien que les habitations s'installent plus loin. Notre adaptation ne concerne pas que le réchauffement climatique. Le gros chantier est celui de la transition énergétique.

    Aujourd'hui, on parle beaucoup moins du « peak oil » car on va chercher des hydrocarbureshydrocarbures de plus en plus loin. Mais il faut s'en occuper aujourd'hui car l'inertieinertie de cette industrie et de tout ce qu'il y a derrière est énorme. Il faudra beaucoup de temps.

    En tant qu'explorateur, je suis un gros consommateur d'énergieénergie. J'en connais la valeur. L'énergie, c'est la vie. Aujourd'hui, dans les pays développés, on ne la mesure plus. Cet appareil consomme-t-il 500 W ou 2 kW ? Quelle énergie représente un plein d'essence ? La plupart des gens l'ignorent.

    Jean-Louis Étienne en 2010 dans la nacelle du <em><a href="//www.futura-sciences.com/planete/actualites/climatologie-jean-louis-etienne-route-ballon-pole-nord-23288/" title="Jean-Louis Etienne en route - et en ballon - pour le pôle nord" target="_blank">Generali Arctic Observer</a></em>, une rozière, c'est-à-dire un ballon gonflé à l'air chaud mais dont l'enveloppe embarque aussi un volume d'hélium. Photographié ici au Spitzberg, il s'apprête alors à traverser l'Arctique vers la Sibérie en passant par le pôle Nord. © Jean-Louis Étienne

    Jean-Louis Étienne en 2010 dans la nacelle du Generali Arctic Observer, une rozière, c'est-à-dire un ballon gonflé à l'air chaud mais dont l'enveloppe embarque aussi un volume d'hélium. Photographié ici au Spitzberg, il s'apprête alors à traverser l'Arctique vers la Sibérie en passant par le pôle Nord. © Jean-Louis Étienne

    Les Hommes courent après le temps solaire

    Vous plaidez pour les énergies renouvelables ?

    Jean-Louis Étienne : Bien sûr, il faut multiplier les capteurscapteurs. Vous remarquerez que nous courons après le temps solairetemps solaire. Les énergies fossiles, c'est une fabrication de 250 millions d'années. Aujourd'hui, on veut la récupérer après un temps très court par l'intermédiaire de l'eau ou du vent, voire instantanément avec des cellules solaires. Et désormais, avec Iter et la fusionfusion thermonucléaire, on cherche à court-circuiter le temps solaire... Ce projet semble cher, bien sûr, mais, finalement, c'est le budget des JO de Londres [2012, NDLRNDLR].

    Pensez-vous que la prise de conscience progresse ?

    Jean-Louis Étienne : L'accord de Paris, avec 195 pays signataires, est un très bon départ. Mais la COP de Marrakech n'a pas donné grand-chose. Il ne faudrait pas que le soufflé retombe. Pourtant, nous avons beaucoup de possibilités. Des satellites surveillent la TerreTerre très efficacement pour mesurer les émissionsémissions locales de gaz carboniquegaz carbonique. On sait où et comment agir.

    Les grands mots ne servent à rien…

    En Europe, notamment en France par exemple, nous avons une énorme ressource avec l'éolien offshoreoffshore. Dommage, vraiment, qu'il y ait toujours une association pour faire reculer ce genre de projets... C'est un gâchis.

    Pour être efficace dans nos explications, il faut exercer notre persuasion sur sa zone d'influence, personnelle, familiale ou professionnelle. Les grands mots ne servent à rien...