En cette fin du mois de janvier 2018, une quinzaine de départements sont placés en vigilance orange pour les crues et inondations. La Seine pourrait atteindre un niveau proche de celui de la crue de juin 2016 et de nombreuses rivières sont sorties de leur lit. Les inondations, qui causent de nombreux dégâts matériels et humains, sont-elles inévitables ? Pour prévenir ces catastrophes naturelles, il faut savoir respecter les cours d'eau. C'était tout l'objet d’un colloque, intitulé « vivre avec les crues », organisé en 2011 par le WWF. Selon l'ONG, il faut redonner de l'espace aux fleuves.

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    Article de Bruno Scala paru le 19 décembre 2011

    Le colloque « vivre avec les crues » s'est déroulé la semaine dernière à la maison de l'Unesco, à Paris. Organisé par le WWF, cet événement avait pour but de faire le point des connaissances sur les écosystèmes d'eau douce, dans le but de vivre avec, tout en atténuant les risques de crues et autres conséquences négatives.

    Suite aux inondations catastrophiques qui ont eu lieu au cours de l'année, le sujet apparaît comme particulièrement préoccupant. Il y a quelques mois, l'Asie du Sud-Est (et plus particulièrement la Thaïlande) était ravagée par une forte inondation dont le bilan humain s'est élevé à plus de 500 victimes. Au début de l'année, l'Australie était à son tour frappée par des pluies diluviennes, engendrant la mort d'une vingtaine de personnes au moins. À la même époque, environ 1.000 personnes mourraient à cause des inondations au Brésil.

    Respecter le lit du fleuve

    Comment éviter cela ? La meilleure façon d'anticiper les conséquences négatives des cours d'eau, selon les conclusions du colloque, c'est de leur rendre leur liberté. « Un fleuve, ce n'est pas seulement de l'eau qui coule dans un seul lit, rappelle le WWF dans un rapport sur le sujet. C'est un "lit mineur", où l'eau coule la plupart du temps, et un "lit majeurlit majeur", plus large, moins visible, qui va recevoir ses crues, petites ou grandes. »

    Les inondations sont toujours impressionnantes. Ici, la crue du Doubs en décembre 2010. © Dead.archer, Flickr, cc by nc nd 2.0

    Les inondations sont toujours impressionnantes. Ici, la crue du Doubs en décembre 2010. © Dead.archer, Flickr, cc by nc nd 2.0

    Le lit majeur, c'est globalement la zone qui permet de faire tampon lors d'une inondation. Lorsque le fleuve déborde, il sort de son lit mineur et occupe les plaines alluviales. La porositéporosité de ces terresterres autorise une absorptionabsorption très rapide de l'eau en surplus. La largeur de ce lit peut atteindre 25 km pour le Nille Nil.

    Or à notre époque, les lits mineurs des rivières sont souvent bordés de digues, les berges bétonnées de constructionsconstructions en tous genres qui ne remplissent pas aussi bien le rôle protecteur que les plaines alluviales. En France près de 10 % de la population vit sur des zones concernées par le risque d'inondation, d'après le WWF et l'Onu parle d'environ un milliard de personnes dans le monde.

    Inondations : 1,4 milliard d'euros par an en Europe

    En France, dans certaines régions, des usines qui se situaient sur des zones inondables ont été déplacées. Près de Grenoble, il est prévu de mettre au point un système permettant d'orienter les crues vers des zones tampons : forêts ou plaines alluviales.

    Selon le WWF, il faut cesser de croire qu'on peut maîtriser les crues. Non seulement, c'est impossible mais, en plus, les crues sont nécessaires au bien-être des écosystèmes entourant les fleuves. Elles alimentent les nappes alluviales, qui sont des sources d'eau bien plus pures que celle de la rivière puisqu'elles sont filtrées par le sol. En outre, les animaux, certains oiseaux notamment, ont besoin de l'espace assuré par le lit majeur, où ils nichent. 

    Le WWF rappelle que tous ces phénomènes sont des services écologiques assurés par le fleuve et qu'il faut en prendre soin pour en bénéficier. Des services écologiques gratuits qui contrastent fortement avec les pertes économiques engendrées par les crues. Selon le WWF, en Europe, les crues ont coûté 25 milliards d'euros entre 1988 et 2005, soit environ 1,4 milliard d'euros par an.