Les récifs coralliens sont particulièrement sensibles à l’acidification des océans, et donc plus largement au changement climatique. Mais actuellement, c’est la déforestation qui les met directement à mal. Le lien de cause à effet n’est pas évident pour tous, pourtant il s’agit d’une préoccupation majeure dans la conservation des récifs.

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    L'île de Madagascar a perdu 90 % de sa couverture forestière originelle en 2.000 ans d'activités humaines. Malgré cela, elle reste une terre riche en biodiversité. Ainsi, depuis le début du XXIe siècle, plus de 600 nouvelles espèces y ont été recensées. Bien que Madagascar soit l'objet d'une haute surveillance environnementale, le problème de la déforestation n'est pas considéré comme urgent à résoudre sur l'île rouge.

    Les inquiétudes à l'égard de l'érosion des sols et à l'augmentation des sédiments dans les rivières sont pourtant croissantes. À Madagascar comme en Australie, les forêts régulent la quantité de sédiments drainés dans les rivières, et donc à terme dans les océans. En raison d'une déforestation intense qui fait ragerage depuis des décennies, les côtes de l'île sont de plus en plus submergées de sédiments. Les récifs coralliens voisins des embouchures des rivières en sont affectés.

    Les quatre bassins versants étudiés sont représentés en nuances de vert sur la carte, et les récifs coralliens en rose. Les photos a et b montrent les dégâts occasionnés par la déforestation, et les photos c et d l'état actuel de sédimentation des récifs. © Joseph Maina <em>et al.</em>,<em> Nature Communications</em>

    Les quatre bassins versants étudiés sont représentés en nuances de vert sur la carte, et les récifs coralliens en rose. Les photos a et b montrent les dégâts occasionnés par la déforestation, et les photos c et d l'état actuel de sédimentation des récifs. © Joseph Maina et al., Nature Communications

    La déforestation plus grave que le changement climatique

    Dans ce contexte, une équipe de recherche, menée par le biologiste Joseph Maina, s'est intéressée à l'évolution des effets de la déforestation face au changement climatique. Apportés par les rivières, les sédiments agissent dans l'océan comme un écran : la turbiditéturbidité de l'eau réduit l'apport de lumièrelumière et bloque le processus de photosynthèsephotosynthèse du phytoplancton. Les coraux sont alors moins nourris. Préserver les forêts protégera les récifs coralliensrécifs coralliens et d'après cette nouvelle étude, dont les résultats sont publiés dans les Nature Communications, cela deviendra un impératif à l'avenir en raison du changement climatiquechangement climatique.

    En effet, cette étude montre que d'ici 2090, la température moyenne de l'airair sur l'île de Madagascar devrait augmenter et le régime de précipitation considérablement diminuer. La combinaison de ces deux facteurs, entraînera la réduction des débitsdébits des rivières et devrait donc la réduire la charge de sédiments dans les océans. Mais il apparaît que l'érosion des sols et la déforestation contrebalanceront cette rétroaction positive du changement climatique.

    Des modèles climatiques dédiés à l’île de Madagascar

    L'équipe s'est focalisée sur quatre bassins versantsbassins versants, qui se situent au sud-ouest, à l'ouest, au nord-ouest et au nord-est de l'île. Ces derniers montrent déjà des signes évidents de surcharges sédimentaires, et sont suivis quotidiennement. Pour étudier l'évolution du débit fluvial des bassins pour les décennies à venir, les chercheurs ont utilisé deux modèles développés pour l'île de Madagascar : STREAM et N-SPECT.

    Ces modèles se basent sur les données actuelles de courantométrie et d'utilisation des sols pour modéliser son évolution, suivant le scénario considéré. L'équipe a soumis trois types de scénarios climatiques prévoyant des émissions de CO2 dans l'atmosphèreatmosphère de l'ordre de 550, 700 et 850 ppmppm pour 2100. Les modèles confrontent par ailleurs différentes évolutions de l'utilisation des terres.

    Reboiser est un impératif

    « Maîtriser l'affluence des sédiments dans les récifs coralliens est l'une des principales recommandations pour aider les coraux à survivre au réchauffement des océans et aux épisodes de blanchissement futurs, commente Joseph Maina. Nos résultats montrent clairement que la gestion de l'utilisation des terres est l'action politique la plus importante pour prévenir d'autres dommages et préserver l'écosystèmeécosystème récifal. »

    Si les coraux sont de toute façon grandement menacés par la pollution, l'acidification des océans et plus largement le changement climatique, il n'en reste pas moins que le reboisement est impératif pour leur conservation. Il faut l'envisager comme un outil de protection qui retarderait le déclin des massifs de corail.