En analysant les variations annuelles des précipitations en Méditerranée orientale au cours des derniers millénaires, une équipe américano-israélienne a découvert que la chute de l’influence de l’empire romain et byzantin dans cette région est curieusement concomitante d’une décroissance des précipitations.

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    Une vue du spectromètre de masse du Wisconsin Secondary Ion Mass Spectrometer LaboratoryCrédit : University of Wisconsin-Madison

    Une vue du spectromètre de masse du Wisconsin Secondary Ion Mass Spectrometer LaboratoryCrédit : University of Wisconsin-Madison

    Les stalagmites présentes dans les grottes sont d’excellentes mémoires du climat et en particulier des variations du taux de précipitation lorsque l'on sait correctement lire et interpréter les archives géochimiques qu'elles contiennent.
    En effet, l'eau s'infiltrant dans les grottes et déposant lentement des couches de calcite emporte aussi avec elle des isotopes de l’oxygène ainsi que des impuretés sous forme de matièrematière organique contenant des isotopesisotopes du carbonecarbone. En utilisant les techniques de la géochimie isotopique, on peut alors en déduire l'époque à laquelle ces couches de calcite se sont déposées, ainsi que l'intensité des précipitations et leurs températures.

    La coupe de la stalagmite de la grotte Soreq. Crédit : <em>University of Wisconsin-Madison</em>

    La coupe de la stalagmite de la grotte Soreq. Crédit : University of Wisconsin-Madison

    Un groupe de chercheurs américains de l'université de Wisconsin-Madison, menée par le professeur John Valley et son thésard Ian Orland, a entrepris avec des collègues israéliens d'analyser une coupe d'une stalagmite présente dans une célèbre grotte proche de Jérusalem, la grotte Soreq.

    Des siècles de sécheresse

    En utilisant la microsonde à ionsions du Wisconsin Secondary-Ion Mass-Spectrometer laboratory, ces chercheurs ont effectué une série d'analyses sur des portions très faiblement espacées de la coupe de la stalagmite. A chaque fois, une région de seulement une centième de millimètre était échantillonnée ce qui a permis de suivre les variations du climat, et même des saisons, à l'échelle de l'année.

    A leur surprise, les chercheurs ont découvert que pendant une période s'étendant en gros de l'an 100 à l'an 700 après Jésus-Christ, le climat de la région de Jérusalem, et donc de la Méditerranée orientale, était devenu de plus en plus sec avec des chutes abruptes des précipitations autour des années 100 et 400 après J-C. Or, c'est précisément pendant cette période que les empires romain et byzantin voient l'amorce de leur déclin et surtout la chute de leur influence dans cette région de la Méditerranée.

    John Valley (gauche) et Ian Orland (droite). Crédit : <em>University of Wisconsin-Madison-Bryce Richte</em>

    John Valley (gauche) et Ian Orland (droite). Crédit : University of Wisconsin-Madison-Bryce Richte

    Il est bien sûr difficile de savoir s'il s'agit d'une simple coïncidence ou si un lien de causalité existe. De plus, même si un tel lien existe, il ne saurait expliquer à lui seul la chute de ces empires. Mais la question mérite d'être examinée de plus près.

    Les chercheurs eux-mêmes continuent leur plongée dans le passé climatique enregistré finement dans la grotte Soreq. La stalagmite étudiée leur permettait déjà de lire les archives climatiques sur la période s'étendant de 200 avant J-C à 1100 après J-C mais ils peuvent faire beaucoup mieux car la grotte a au moins 185.000 ans. En particulier, il serait au plus haut point intéressant de corréler les enregistrements climatiques de la grotte avec ceux des glaces en AntarctiqueAntarctique et au Groenland.