Le premier a été lancé en 2003, le second en 2018. Ce sont les satellites ICESat. Aujourd’hui, les données qu’ils ont fournies au fil des années aux chercheurs de la Nasa donnent l’image la plus précise dont nous disposions de l’évolution des calottes glaciaires au cours des 16 dernières années.


au sommaire


    Avec le réchauffement climatique, les glaces des pôles fondent. Et aujourd'hui, grâce aux données des satellites ICESat (Ice, Cloud and land Elevation Satellite) -- ICESat, lancé en 2003, et ICESat-2, lancé en 2018 --, les chercheurs de la Nasa (États-Unis) nous proposent une image détaillée de la complexité avec laquelle les calottes du Groenland et de l'Antarctique ont évolué sur ces dernières années.

    En un an d’observation, vous n’allez rien apprendre. Aujourd’hui, nous avons 16 années de recul.

    « Si vous observez une calotte pendant un mois, ou même un an, vous n'allez rien apprendre sur l'effet que le changement climatiquechangement climatique produit sur elle. Mais nous disposons maintenant de données qui s'étalent sur 16 années. Nous pouvons nous montrer beaucoup plus confiants lorsque nous affirmons que les évolutions observées sont liées au changement climatique à long terme », remarque Ben Smith, un glaciologue de l'université de Washington dans un communiqué du Jet Propulsion Laboratory (NasaNasa).

    Globalement, les chercheurs notent que la fonte des glaces polaires est responsable, depuis 2003, d'une élévation du niveau de la mer de 14 millimètres. Soit un tiers de l'élévation totale sur la période. Plus précisément, sur les 16 années qui viennent de s'écouler, la calotte glaciairecalotte glaciaire du Groenland a perdu en moyenne 200 gigatonnes par an et celle de l'Antarctique, 118 gigatonnes. Un volumevolume qui impressionne encore plus lorsque l'on sait qu'une gigatonne peut remplir... 400.000 piscines olympiques !

    Des résultats qui semblent fiables tant la précision de l'altimètre laser de ICESat-2 est grande. Il donne en effet des variations de hauteur des glaces à moins de trois centimètres près. Cela combiné au fait que les chercheurs ont travaillé sur des dizaines de millions de sites pour lesquels ils disposaient de données à la fois de ICESat et de ICESat-2. Ils ont ainsi obtenu des valeurs précises des volumes de glaces perdus. Pour convertir ces volumes en massesmasses, les chercheurs se sont appuyés sur des modèles capables de déterminer les densités des calottes glaciaires.

    La fonte inquiétante des plates-formes glaciaires

    Leurs résultats confirment ceux déjà obtenus par le passé. Mais ils permettent surtout d'accéder à des détails plus fins. Ils montrent, par exemple, qu'en Antarctique, la calotte s'épaissit dans certaines régions intérieures. Grâce à une augmentation des chutes de neige. Malheureusement ce gain ne compense pas les pertes importantes observées sur les côtes, notamment dans l'Antarctique occidental. Des pertes dues au réchauffement de l'océan.

    Au Groenland, les glaciers côtiers tels que le Jakobshavn ou le Kangerdulgssuaq ont perdu entre quatre et six mètres d'épaisseur par an. Une conséquence à la fois de températures estivales plus chaudes et d'une érosion due au réchauffement de l'eau de l'océan.

    En Antarctique, les plates-formes glaciaires ont dangereusement fondu. © Nasa ICESat et ICESat-2
    En Antarctique, les plates-formes glaciaires ont dangereusement fondu. © Nasa ICESat et ICESat-2

    La haute résolutionrésolution d'ICESat-2 a aussi permis d'obtenir des mesures précises du niveau des plates-formes glaciaires qui flottent à l'extrémité des glaciers. Les pertes de masses les plus importantes ont été enregistrées en Antarctique occidental. Du côté des plateaux de glace Thwaites et Crosson qui ont perdu respectivement cinq et trois mètres de glace par an.

    La fontefonte de ces plates-formes glaciaires -- qui compte pour 30 % de la fonte totale de l'Antarctique -- n'entraîne pas d'élévation du niveau de la mer. Un peu comme un glaçon qui fond dans un verre ne le fait pas déborder. Mais elle met en danger la stabilité des glaciers et des calottes tout entières. « C'est comme un contrefortcontrefort architectural qui soutient une cathédrale, conclut Helen Amanda Fricker, une glaciologue de l'université de Californie toujours dans le même communiqué de la Nasa. Ces plates-formes maintiennent la couche de glace. Le simple fait de les amincir permet aux glaces terrestres d'atteindre la mer plus rapidement ». De quoi, cette fois, participer à l'élévation du niveau des eaux.


    Banquise arctique : le satellite IceSat met en évidence une fonte rapide

    Entre 2004 et 2008, la calotte polaire arctique a perdu, en hiver, 68 centimètres d'épaisseur. Pour la première fois, les glaces jeunes (formées dans l'année) sont plus étendues que les glaces multi-annuellesannuelles. C'est ce que vient de révéler le satellite IceSat, de la Nasa.

    Article de Jean-Luc GoudetJean-Luc Goudet paru le 08/07/2009

    Le satellite IceSat mesure précisément la hauteur de la glace par rapport au niveau de la mer (appelée ici <em>freeboard</em>), et peut détecter une variation de 1,5 cm par an. © N. Untersteiner / JPL / Nasa
    Le satellite IceSat mesure précisément la hauteur de la glace par rapport au niveau de la mer (appelée ici freeboard), et peut détecter une variation de 1,5 cm par an. © N. Untersteiner / JPL / Nasa

    Lancé en 2003, IceSat (Ice, Cloud and land Elevation Satellite) mesure en permanence, à l'aide de tirs laserlaser, la hauteur des nuagesnuages, le niveau de la mer et l'altitude des sols gelés. Par calcul, il est possible, notamment, de déterminer l'épaisseur de la banquisebanquise, cette couche de glace qui flotte sur l'océan.

    Au fil des années, les mesures de IceSat donnent une bonne idée de l'évolution de la banquise arctique, dont on sait que le minimum estival se réduit chaque année, au point d'envisager un jour une navigation régulière en été. On estime vraisemblable que l'océan Arctique soit un jour complètement libre de glace en été. Mais les dates annoncées varient... entre 2012 et 2100.

    Avec son rayon laser, IceSat mesure précisément la hauteur de la surface glacée ou enneigée par rapport au niveau de la mer (<em>sea surface</em>) et peut ainsi estimer le tirant d'air (<em>freeboard</em>), terme de marine désignant la hauteur des parties émergées d'un navire. Connaissant la densité de la glace et après estimation de l'épaisseur de neige accumulée (<em>snow</em>), il est possible, en appelant à l'aide Archimède et son principe, de déterminer l'épaisseur de la glace (<em>sea ice</em>). Cliquer sur l'image pour l'agrandir. © Ron Kwok/Nasa/JPL
    Avec son rayon laser, IceSat mesure précisément la hauteur de la surface glacée ou enneigée par rapport au niveau de la mer (sea surface) et peut ainsi estimer le tirant d'air (freeboard), terme de marine désignant la hauteur des parties émergées d'un navire. Connaissant la densité de la glace et après estimation de l'épaisseur de neige accumulée (snow), il est possible, en appelant à l'aide Archimède et son principe, de déterminer l'épaisseur de la glace (sea ice). Cliquer sur l'image pour l'agrandir. © Ron Kwok/Nasa/JPL

    17 centimètres par an

    Loin de ces supputations, IceSat, lui, mesure avec opiniâtreté la hauteur de la surface de glace, été comme hiver. Un bilan de quatre années de résultats, entre 2004 et 2008, vient d'être rendu public par la Nasa. Il confirme la réduction de la surface de la banquise, en été mais aussi en hiver. La couche de glace hivernale s'est amincie de 17 centimètres par an sur cette période, soit 68 centimètres en tout, pour une épaisseur moyenne d'environ 2,5 mètres.

    La dynamique annuelle est également modifiée. La banquise vit au rythme des saisonssaisons. Après les fontes de l'été et le minimum de septembre, de nouvelles glaces se forment durant l'hiver. Pendant les années d'observation de IceSat, la reconstitution hivernale n'a pas suffi à compenser les fontes estivales.

    Comparaison des épaisseurs de la banquise en hiver, en 2003 et en 2008 (cliquer pour agrandir). La couleur indique l'épaisseur, de bleu foncé pour 0 à 1 mètre jusqu'à blanc, pour plus de 4 mètres. On voit clairement apparaître en 2008 des zones de moins d'un mètre au centre de la banquise arctique.<br>© Nasa/JPL (montage Futura-Sciences)
    Comparaison des épaisseurs de la banquise en hiver, en 2003 et en 2008 (cliquer pour agrandir). La couleur indique l'épaisseur, de bleu foncé pour 0 à 1 mètre jusqu'à blanc, pour plus de 4 mètres. On voit clairement apparaître en 2008 des zones de moins d'un mètre au centre de la banquise arctique.
    © Nasa/JPL (montage Futura-Sciences)

    D'après les données déduites des observations, les glaces multi-annuelles, qui survivent à un ou plusieurs étés, sont pour la première fois moins étendues que les glaces formées au cours de l'hiver précédent. En 2003, les glaces multi-annuelles couvraient 1,54 million de kilomètres carrés et représentaient 62% du volume total de la banquise arctique. En 2008, la proportion est tombée à 32%.

    Pour l'océan mondial, la conséquence est la libération d'une plus grande quantité d'eau liquideliquide, qui tend à réchauffer encore les eaux polaires et qui pourrait modifier les courants (mais pas le niveau de la mer, rappelons-le, puisque la glace de la banquise est de l'eau de mer gelée).

    Pour les auteurs de l'étude, menée par Ron Kwok, cette fonte est attribuable au réchauffement de l'atmosphèreatmosphère et à des modifications de la circulation des glaces à la surface de l'océan.