Une molécule qui roule ! C'est ce qu'a réussi à construire et à photographier une équipe texane. Une étape de plus vers la conception de machines moléculaires.

au sommaire


    Franchement rudimentaire, la voiturevoiture microscopique construite par une équipe de la Rice University (Houston, Texas) n'a pas encore de carrosserie : ce n'est qu'un châssis tubulaire accroché à deux essieux, portant chacun une paire de roues sphériques, le tout ayant la forme d'un H. Mais cet engin ne mesure que 4 nanomètresnanomètres de long pour 3 de large, (1 nanomètre = 1 millionième de millimètre).

    Sur ses quatre roues en carbone, cette auto miniature avance paisiblement en roulant…

    Sur ses quatre roues en carbone, cette auto miniature avance paisiblement en roulant…

    Le châssis et les essieux sont constitués d'une moléculemolécule organique, dont l'équipe n'a pas précisé la nature. Les roues sont des fullerènesfullerènes, assemblages sphériques de 60 atomesatomes de carbonecarbone. Elles sont fixées aux essieux par une liaison chimiqueliaison chimique et l'ensemble constitue donc une seule grosse molécule.

    Et pourtant elle tourne

    Mais pourquoi appeler cela une voiture ? Parce que les roues tournent quand cette chose avance ! Les liaisons chimiques qui les lient aux essieux permettent en effet une libre rotation. Encore restait-il à prouver qu'elles tournent vraiment.

    C'est sur une route pavée d'or qu'ont eu lieu les essais. Ce métalmétal a été choisi pour minimiser les réactions entre les fullerènes et la surface. Même avec ce revêtement inerte, il faut chauffer à 200 °C pour que le micro-véhicule consente à avancer. Sur un sol froid plus froid, il reste collé. La chaleurchaleur finit par faire bouger ce prototype qui, hélas, ne dispose pas encore de moteur.

    En l'observant minute par minute, à l'aide d'un microscope à effet tunnel, les chercheurs ont pu déterminer que ce véhicule avançait bien dans une seule direction, celle de ses roues.

    Nettement moins belle qu'en image de synthèse, voici la première molécule à roues, saisie au microscope à effet tunnel. On n'en distingue que les quatre molécules de fullerènes.

    Nettement moins belle qu'en image de synthèse, voici la première molécule à roues, saisie au microscope à effet tunnel. On n'en distingue que les quatre molécules de fullerènes.

    Pour vérifier si les roues tournaient vraiment, les scientifiques l'ont tractée à l'aide du même microscope à effet tunnel. Celui-ci, en effet, comporte une pointe extraordinairement fine que l'on peut déplacer sur deux axes, dans le plan horizontal. En fonction microscope, cette pointe sert à mesurer sa hauteur par rapport à la surface (en détectant les électronsélectrons échappés de leurs atomes par effet tunnel) et, par balayage, à dessiner le profil de la zone "survolée". En jouant sur la charge électrique de la pointe, il est possible, à l'inverse, de tracter un atome ou une molécule fixé sur la surface.

    Comme sur une vraie voiture, les scientifiques ont observé que la force à appliquer pour faire bouger cette molécule à roues est bien plus faible quand on tire dans le bon sens. Donc, elles tournent !

    Emportée par son succès, l'équipe, qui travaille sur ce projet depuis huit ans, imagine maintenant faire porter une charge - atome ou molécule - à leur microscopique 4x44x4. Mais au fait, à quoi cela sert-il ? A progresser sur la voie de l'ingénierie moléculaire, à la manière des mécaniciens de la Renaissance, qui mettaient au point les premières machineries à engrenages...