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    Bleu égyptien, bleu de cobalt, smalt, bleu outremer ou encore bleu d'anthraquinone : le bleu se décline sous différentes nuances, toutes aussi surprenantes les unes que les autres.

    Tasses en porcelaine, décor bleu. © PandaBearPhotographyWales, Pixabay, DP

    Tasses en porcelaine, décor bleu. © PandaBearPhotographyWales, Pixabay, DP
    Image du site Futura Sciences

    La couleur bleue est utilisée dans toutes ses nuances en porcelaine. Ici, le bleu de Delft. © DR

    Le bleu égyptien

    Le bleu égyptien correspond au produit de la cuisson :

    • en atmosphèreatmosphère oxydante ;
    • entre 870 et 1.100 °C, température de stabilité de la cuprorivaïte ;
    • dans des fours de potier ;
    • pendant plusieurs heures ;
    • de mélanges de silicesilice, quartzquartz et/ou tridymite ;
    • de produits calcairescalcaires ;
    • de cuivre ;
    • d'un fondant, le natron (carbonate de sodium naturel). L'augmentation de la proportion de fondant fait croître la quantité de phase amorpheamorphe.

    C'est sans doute le premier colorant synthétique, utilisé il y a 4.500 ans. Il s'agit d'un silicatesilicate double de calcium et de cuivre : cuprorivaïte (CaCuSi4O10).

    Cuprorivaïte ou bleu égyptien inclus dans de l'enduit. © DR

    Cuprorivaïte ou bleu égyptien inclus dans de l'enduit. © DR

    L'intensité des bleus est variable. Le pigment est broyé et étendu sur les sarcophages ou les mursmurs. L'intensité du broyage donne des tons différents de bleus, et les artistes l'ont bien compris. Le pigment fondu donne une sorte d'émailémail vitreux qui permettent la taille des tesselles pour la mosaîque...

    Le vert égyptien, caractérisé par une phase amorphe majoritaire donnant sa couleurcouleur turquoise au pigment et emprisonnant des cristaux de parawollastonite (CaSiO3) et des restes siliceux (quartz, et/ou -tridymite ou cristobalite-), est obtenu par cuisson oxydante entre 900 °C et 1.150 °C d'un mélange enrichi en calcium et en fondant (7 % au minimum) et appauvri en cuivre.

    Les matériaux de base sont les mêmes que pour le bleu : l'apport de cuivre peut se faire avec des résidus de bronzebronze ou de cuivre qui seront identifiés par les restes détectés en analyse, la silice provient du sablesable et le calcium des roches calcaires. Le fondant sodique peut être issu du natron ou de cendres végétales. Les variations chromatiques sont maîtrisées à la fois par la cuisson, en jouant sur la température, mais également par le biais du broyage.

    Le bleu de Prusse, ou bleu de Berlin

    Il fut découvert en 1704 à Berlin par Heinrich Diesbach et Johann Conrad Dippel. Il est produit par réaction de la potasse sur du sulfate de ferfer. Il parvient à supplanter l'indigo à la fin du XIXe siècle, malgré une résistancerésistance médiocre à la lumièrelumière. Il s'agit essentiellement de ferro-cyanure ferrique. Ce bleu fut découvert par hasard suite à une erreur du marchand qui fournissait Diesbach : la potasse qu'il lui avait livrée avait été calcinée préalablement avec du sang, ce qui avait fourni l'azoteazote, nécessaire au cyanure ! Cette recette demeura longtemps secrète.

    Le bleu de cobalt

    Ils sont vraiment coûteux ! Composition typique : oxyde de cobalt + oxyde d'aluminiumoxyde d'aluminium ou aluminate de cobalt. Au XVe siècle ou peut-être au XVIe, on a utilisé de manière mineure la première synthèse : le smalt (voir ci-dessous).

    Verre teinté avec du bleu de cobalt. © Adrian Pingstone

    Verre teinté avec du bleu de cobalt. © Adrian Pingstone

    Le cobalt oxydé étant l'un des plus puissants siccatif pour la peinture à l'huile, cette couleur risque fortement de créer craquelures, plissements et autres accidentsaccidents.

    Comme dans le cas du bleu outremer, la synthèse de cette couleur a fait l'objet d'un concours organisé par la Société d'Encouragement pour l'Industrie Nationale : il fallait un bleu autorisant davantage d'emplois que le smalt. C'est Thénard, en 1802, qui le remporta.

    Le smalt ou smalte

    C'est une synthèse à base de cobalt. Les auteurs évoquent son emploi tantôt au XVe siècle, tantôt au XVIe. On peut dire, d'une certaine manière, qu'il revêt deux formes dès cette époque :

    • oxyde pour la verrerie à base de phosphate ou de chlorure de cobalt ;
    • c'est un pigment pour la peinture, créé d'après un verre teinté avec cet oxyde, qu'on le broyait. Au XVIIe siècle, l'aspect miroitant du smalt était exploité pour orner les métauxmétaux. Aujourd'hui, cet aspect est absent à cause d'un broyage beaucoup trop fin, trop parfait, lui conférant une grande banalité. Le terme smalt signifie émail en francique.
    Bleu céruléen RVB. © DR

    Bleu céruléen RVB. © DR

    Le bleu caeruleum

    Le céruléum - orthographe contemporaine habituelle - ou cæruleum - à l'ancienne, du latin cælum, ciel - ou bleu céruléen est un stannate de cobalt (oxyde d'étainétain SnO3 + cobalt + H2O + ...). Contenant du cobalt, il est extrêmement coûteux. Permanent, couvrant, plutôt lumineux mais subtil, rompu, un peu grisâtre, il constitue bizarrement un standard des bleus chauds recommandé comme substitut d'un cyan primaire. Ses imitations (des phtalocyanines), très répandues à cause du coût élevé de l'original, sont souvent grossières.

    Le bleu outremer, une couleur profonde

    En 1826, à Lyon, Jean-Baptiste Guimet, industriel jette des notes, presque semblables aux formules d'un potier ou d'un verrier et ces mots : « on obtient un assez beau bleu ». À Tübingen, Christian Gottlob Gmelin, professeur de chimiechimie, a créé avec un four, un peu d'argileargile, de la soude caustiquesoude caustique, du soufresoufre et du charboncharbon, une substance que beaucoup, en Europe, cherchent à synthétiser depuis que la Société d'Encouragement pour l'Industrie Nationale a créé un concours en 1824 : le lapis-lazuli ou outremer.

    Le bleu outremer est probablement l'une des couleurs les plus envoûtantes. © DR

    Le bleu outremer est probablement l'une des couleurs les plus envoûtantes. © DR

    Goethe s'intéresse en 1787 aux dépôts qui se forment sur les parois des fours à chauxchaux de la région de Palerme, en Sicile et il suggère l'utilisation de cette couleur comme substitut du lapis mais il ignore que ce n'est rien d'autre qu'une variété de lapis ! Il faudra 1806 pour que Désormes et Clément fournissent la composition du lapis-lazuli : un thiosulfate d'aluminosilicate de sodium.

    SiliciumSilicium, aluminium, sodium, calcium et soufre sont des éléments très courants, il faut les assembler et une course s'engage... Tout le monde est conscient de l'importance de la découverte du procédé. L'enjeu est international. C'est en 1828 que deux chercheurs fixent le procédé.

    Guimet, déjà riche industriel, crée une usine à Fleurieux sur Saône où il mourra en 1871. Sa fortune permettra à son fils Emile de constituer le Musée Guimet (Paris, 1885). Goethe, Désormes, Clément, Vauquelin, Gmelin et Guimet ont-ils été inspirés par une ancienne attirance pour cette pierre...

    De nos jours, il s'agit essentiellement de colorants de synthèse de chimie organique avec brevets.

    E130 Bleu d'Anthraquinone :

    • Couleur bleue artificielle ;
    • Aliments : pâtisserie ;
    • Possibles effets secondaires : Potentiel cancérigène. Il produit les allergiesallergies et les us en quelques minutes. Dangereux.

    Le bleu d'anthraquinone

    Anthracène oxydé, l'anthraquinone donne notamment différents rouges et bleus. Comme souvent lorsqu'il s'agit de pigments organiques, quelques variations permettent d'obtenir des résultats très différents. Une anthraquinone bleue obtenue avec deux monomèresmonomères azotés. Une anthraquinone rouge obtenue avec deux monomères azotés également, mais de manière différente.

    Anthraquinone bleue et rouge formules. © DR

    Anthraquinone bleue et rouge formules. © DR

    Ces pigments sont assez transparentstransparents. Leur permanence n'est pas excellente. Aussi, certains fabricants proposent des alizarines synthétiques composées de dihydroxyantraquinone, et d'autres versions plus permanentes à base de quinacridone. Le bleu d'anthraquinone foncé n'est autre que le bleu d'indanthrène, sorte de substitut du principe colorant de l'indigo.

    Les autres colorants bleus alimentaires

    E131 Bleu breveté V :

    • Couleur bleue de synthèse artificielle ;
    • Aliments : pâtisserie, recouvrement de sucresucre, boissons, sucreries ;
    • Possibles effets secondaires : Il peut provoquer des allergies, urticaireurticaire. Cancérigène.

    E132 Indigotine (l'indigo synthétique est le bleu d'aniline) :

    • Couleur bleue artificielle ;
    • Aliments : recouvrements de sucre, boissons, sucreries ;
    • Possibles effets secondaires : Aucun, mais n'est pas non plus utile.

    E133 Bleu brillant FCF :

    • Couleur bleue artificielle ;
    • Aliments : légumes anglais en conserve ;
    • Possibles effets secondaires : à hautes doses, il peut s'accumuler dans les reinsreins et les veines lymphatiques. À éviter.
    Tableau des bleus alimentaires. © DR

    Tableau des bleus alimentaires. © DR