En ce jour de réveillon, le choix du vin sera l'objet de réflexions, voire de débats. Sur la question du bien-fondé de la coutume consistant à bannir le vin rouge pour accompagner poissons et fruits de mer, un étude de 2009 avait apporté un argument fort. Oui, expliquaient ces chercheurs, cette orthodoxie gastronomique s'appuie sur une caractéristique physiologique, cachée dans nos papilles. La clé ? La teneur en fer...

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    Article publié le 24 octobre 2009

    Face à un plat de poisson, certains bannissent le vin rouge. D'autres déplorent ce maniérisme et affirment au contraire qu'il n'y a pas d'incompatibilité stricte. Le débat anime parfois des dîners en ville et il fallait peut-être ne pas être Français pour étudier le phénomène d'une manière scientifique. Des Japonais l'ont fait et concluent que les deux camps ont à peu près raison...

    Plus précisément, la plupart des vins rouges ne conviennent pas et la majorité des blancs (secs, bien sûr, mais c'est une autre histoire) se marieront avec bonheur. Conclusion pratique : le choix le moins risqué est bien le blanc, sauf expériences préalables.

    Les scientifiques en question (Takayuki Tamura, Kiyoshi Taniguchi, Yumiko Suzuki, Toshiyuki Okubo, Ryoji Takata et Tomonori Konno, l'histoire retiendra peut-être ces noms) ne travaillent pas dans un centre de recherche mais pour une entreprise japonaise, Mercian, productrice de vins et d'alcools. Leurs résultats viennent d'être publiés dans une revue scientifique, le Journal of Agricultural and Food Chemistry.

    L'équipe a commencé par une série de tests gustatifsgustatifs, avec, entre autres, des plats de coquilles Saint-Jacques (parce que ce mollusquemollusque a un goût prononcé) accompagnés de vins blancs (26 différents) et rouges (38). Les chercheurs ont ensuite analysé tous les breuvages pour déterminer les caractéristiques des vins que les goûteurs avaient appréciés après ce fruit de mer.

    Du vin rouge avec de la langouste : une aberration. © J. L. Goudet, Futura

    Du vin rouge avec de la langouste : une aberration. © J. L. Goudet, Futura

    Le fer, un composant ignoré de l'arôme

    La différence observée tenait à un seul paramètre : la quantité de fer. Au-dessus de 2 milligrammes par litre, le vin bu derrière la coquille Saint-Jacques produit une mauvaise saveur. Les chercheurs japonais ont voulu vérifier en trempant ces mollusques dans les différents vins. Ils ont effectivement constaté par eux-mêmes qu'une désagréable odeur finit par se dégager quand le vin contient beaucoup de fer.

    « Nous avons été surpris, avoue Takayuki Tamura. Nous pensions que la raison tenait plutôt aux quantités de dioxyde de soufre ou de polyphénolspolyphénols» On sait que la teneur en fer varie en fonction du sol, du cépage et de la méthode de vinification (les cuves métalliques peuvent en ajouter) et les vins rouges en contiennent davantage que les blancs. Mais le fait que ce métal prenne part à la valeur gustative du vin est en effet plutôt surprenant. Par quel effet chimique le fer génère-t-il un goût particulier ? Les œnologuesœnologues de Mercian l'ignorent mais suspectent une réaction avec les acides grasacides gras insaturés.

    Ils concluent également que, indépendamment de sa teneur en fer, le vin rouge, avec son goût plus fort, tend à écraser les fines saveurs de la chair de poissonpoisson, de mollusques ou de crustacéscrustacés. Mais cela, beaucoup le savaient déjà...