Des fouilles archéologiques menées en Israël ont montré qu’il y a près de 14.000 ans, le peuple Natoufien enterrait déjà ses morts avec un tapis de plantes colorées et parfumées. Ce sont les plus vieilles traces attestant de l’utilisation de fleurs lors des cérémonies funéraires.

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    Le rapport qu'entretient l'Homme avec ses morts est l'une de ses particularités qui le distingue de l'animal. Une fois passé de vie à trépas, le corps du défunt suit un rituel précis, qui diffère selon les cultures, mais qui existe partout. Seuls les éléphants pourraient présenter un tel respect pour leurs congénères, certains signes attestant d'éléments relevant presque du rite.

    Dans notre espèceespèce, les fleurs multicolores et aux bonnes senteurs sont associées à des émotions positives. C'est probablement l'une des raisons qui nous pousse à venir déposer des gerbes sur les tombes de nos proches. Mais depuis quand ces plantes sont-elles associées aux morts ? Une question plus que difficile.

    Il y a peu, des scientifiques pensaient que l'on pouvait remonter 35.000 ans en arrière, dans des tombeaux néandertaliens. Mais les pollens retrouvés, qui faisaient office de révélateurs, ont semble-t-il été apportés par des rongeursrongeurs, et non déposés par les Hommes de l'époque.

    Encore une tombe à fleurir

    La réponse à cette question pourrait bien nous venir d'une culture ancestrale à laquelle on doit beaucoup : les Natoufiens. Ce peuple retrouvé au Proche-Orient et ayant vécu il y a environ 15.000 ans est le premier à prendre ses distances avec le mode de vie de chasseurs-cueilleurs et à prendre goût aux premières formes de sédentarisation. Ils sont parmi les premiers à fabriquer des meubles, cultiver l'orgeorge et le bléblé, domestiquer le loup, mais aussi à regrouper leurs morts dans des cimetières. Avant eux, on constatait uniquement de petits regroupements de tombes. Dans cette culture, elles se comptent en centaines.

    Dani Nadel et ses collègues de l'université d’Haïfa, en Israël, sont allés fouiller quatre de ces sites, au niveau de la grotte de Raqefet, sur le mont Carmel, qui surplombe la ville côtière. Depuis 2004, ils y ont exhumé 29 squelettes.

    Au fond de tombes comme celle-là, les auteurs ont trouvé dans le sol les marques laissées par des fleurs sur lesquelles étaient déposés les morts. © Nadel <em>et al.</em>, <em>Pnas</em>

    Au fond de tombes comme celle-là, les auteurs ont trouvé dans le sol les marques laissées par des fleurs sur lesquelles étaient déposés les morts. © Nadel et al.Pnas

    Leurs analyses, révélées dans les Pnas, mettent en évidence que les Natoufiens déposaient leurs cadavres sur un tapis de plantes colorées et odorantes. En effet, dans la terre boueuse retrouvée juste sous les cadavres, sont imprimés des motifs de tiges et de fleurs. Ces tiges ont une forme carrée, plutôt atypique, ce qui suggère qu'il devait s'agir de sauge ou d'autre lamiacées comme la menthe. Des plantes de la famille des scrophulariacées (comme le scrophulaire) auraient également pu être déposées. Les analyses des échantillons au microscope électroniquemicroscope électronique révèlent la présence de phytolithesphytolithes, de petits fossiles végétaux, confortant la thèse défendue.

    Des rites funéraires plus que millénaires

    Les corps auraient été enterrés dans ces tombes voilà 13.700 ans à 11.700 ans. Les scientifiques ignorent encore le sens exact que donnaient les Natoufiens à ces pratiques, mais ils suggèrent qu'elles pourraient être à l'origine de nos rituels funéraires actuels, puisque nous déposons toujours des fleurs sur les sépultures. Cependant, leurs rites diffèrent beaucoup des nôtres car des traces archéologiques montrent que les corps étaient exhumés plus tard et les crânescrânes retirés.

    Cette découverte suggère que les Natoufiens ont adopté un changement de réflexion autour de la mort. Cela concorde avec des résultats publiés en 2010 qui révélaient que ce peuple pratiquait de vraies cérémonies au moment de l'enterrement.