Une étude menée au sein de l'équipe mixte Inserm-CEA « Imagerie Cérébrale en Psychiatrie » au Service Hospitalier Frédéric Joliot (en collaboration avec le Centre de Recherche en Neuropsychologie et Cognition (CERNEC) et l'Université de Montréal) révèle une incapacité des autistes à activer les aires cérébrales spécifiques de la reconnaissance de la voix humaine. Ces résultats étayent l'hypothèse selon laquelle les difficultés des autistes seraient liées à un déficit de la perception des stimuli sociaux. Le détail de cette étude est publié dans le numéro d'août de la revue Nature Neuroscience.

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    Autiste sur un cheval (crédit : www.quebecweb.com)

    Autiste sur un cheval (crédit : www.quebecweb.com)

    La voix humaine est riche en informations verbales mais aussi non-verbales : elle constitue un véritable "visage auditif" que nous savons interpréter. Nos capacités à percevoir ces informations vocales jouent un rôle crucial dans nos interactions sociales. De plus, une équipe de chercheurs a mis en évidence, par l'imagerie cérébrale fonctionnelle, que la perception vocale implique des régions corticales spécifiques appelées "aires de la voix", situées chez la plupart des individus le long du sillon temporaltemporal supérieur.

    L'autisme est une pathologie sévère du développement de l'enfant qui se caractérise par des difficultés dans les interactions sociales. Des études comportementales ont permis d'observer également un déficit dans la perception de la voix humaine. Afin de préciser les bases cérébrales de cette pathologie, les chercheurs de l'équipe mixte Inserm-Cea ont étudié par imagerie fonctionnelle (IRM fonctionnelleIRM fonctionnelle) comment le cerveau des sujets autistes adultes perçoit la voix humaine par rapport à d'autres sons. Pour cela, l'activité cérébrale de cinq adultes atteints d'autisme et de huit volontaires sains a été enregistrée alors qu'ils écoutaient des séquences de sons alternant la voix humaine (parole, cri, rire, pleur, chantchant) et d'autres types de sons non vocaux (animaux, cloches, instruments de musique, voituresvoitures etc...).

    Les résultats obtenus révèlent chez les autistes une absence d'activation de l'aire spécifique de la perception de la voix ("aire de la voix"). Chez ces sujets, les aires cérébrales activées sont exactement les mêmes, qu'il s'agisse de voix humaines ou de sons non vocaux. Aucune activation cérébrale spécifique d'une reconnaissance de la voix humaine n'a pu être mise en évidence. Par ailleurs, à la question « qu'avez-vous entendu pendant l'examen ? », les autistes ne rapportent que 8,5% de sons vocaux contre 51,2% pour les témoins, confirmant leur faible capacité à reconnaître des voix humaines.

    De précédentes études dans le domaine visuel en IRM fonctionnelle avaient déjà révélé chez les autistes une absence d'activation de l'aire spécialisée dans le traitement des visages. Cette étude sur la voix, stimulus auditif riche en informations sur l'identité et l'état émotionnel de l'interlocuteur, met cette fois en évidence un trouble de la perception sociale dans le domaine auditif.

    Ces anomalies du traitement de la voix et des visages suggèrent que les difficultés des autistes à comprendre l'état émotionnel d'autrui et à interagir avec lui pourraient être liées à un déficit de la perception des stimuli sociaux. Ces résultats en imagerie fonctionnelle apportent de nouvelles perspectives pour comprendre les perturbations des interactions sociales dans l'autisme. Enfin, la mise en évidence de ces déficits perceptifs pourrait permettre l'élaboration de stratégies de rééducation visant à induire un traitement spécifique des informations vocales et faciales, traitement qui semble ne pas s'être développé spontanément chez l'autiste.