Le chercheur états-unien William Gause et ses collaborateurs pensent que l’on peut entraîner son système immunitaire pour éviter les maladies auto-immunes inflammatoires grâce à une thérapie… de vers parasites. Des arguments supplémentaires en faveur de l’hypothèse hygiéniste.

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    Une petite cure de vers parasites pour soulager une maladie auto-immune ? L'hypothèse est peu ragoûtante, mais il se pourrait qu'elle soit vraiment utile. © James Gathany, CDC

    Une petite cure de vers parasites pour soulager une maladie auto-immune ? L'hypothèse est peu ragoûtante, mais il se pourrait qu'elle soit vraiment utile. © James Gathany, CDC

    À une époque pas si reculée, la plupart des Hommes étaient infestés de vers parasites. Les soldats de la troisième croisade en hébergeaient, tout comme Richard III, le célèbre roi d'Angleterre, tué dans un combat pour conserver son trône en 1485. Aujourd'hui, ces helminthes, terme générique qui regroupe tous ces invités indésirables, sévissent toujours, mais principalement dans les pays en voie de développement.

    Ces millénaires de lutte et de coévolution semblent toujours marqués en nous, d'après William Gause, chercheur à la Rutgers New Jersey Medical School. Dans un article d'opinion coécrit avec deux autres scientifiques dans la revue Nature Reviews Immunology, il explique que nous pourrions développer des maladies auto-immunes justement parce que nous ne sommes plus parasités par les helminthes. Et donc qu'une petite thérapie à l'aide de ces vers pourrait nous aider à combattre diabète de type 1, maladies chroniques inflammatoires intestinales, voire des troubles cardiovasculaires, métaboliques ou allergiques.

    En effet, ces scientifiques expliquent qu'en réaction à ces hôtes indésirables, l'organisme humain a développé une réponse immunitaire particulière, appelée immunité de type 2. Suite aux dégâts causés par le passage des helminthes, le corps cherche à cicatriser rapidement le tissu abîmé et déploie des composés réparateurs, mais qui bloquent des processus inflammatoires, ce qui amplifie les dommages et est parfois à l'origine de maladies auto-immunes.

    Les helminthes comprennent une grande diversité biologique de vers parasites, comme ce schistosome, à l'origine de la bilharziose, maladie entraînant près de 300.000 décès chaque année. © David Williams, <em>Illinois State University</em>, Wikimédia Commons, DP

    Les helminthes comprennent une grande diversité biologique de vers parasites, comme ce schistosome, à l'origine de la bilharziose, maladie entraînant près de 300.000 décès chaque année. © David Williams, Illinois State University, Wikimédia Commons, DP

    Les vers : thérapie d’avenir contre les maladies auto-immunes

    Ces chercheurs préconisent donc l'exploitation des propriétés bénéfiques de ces vers ou de certains de leurs sous-produits, dans le but d'entraîner les systèmes immunitaires qui se dirigent vers les cellules de son hôte à discriminer l'étranger du soi. Voilà une piste thérapeutique à creuser contre les maladies auto-immunes.

    À vrai dire, elle a déjà été testée chez l'animal, avec un certain succès. William Gause avait déjà pris part à cette étude publiée dans Nature Medicine. Des souris parasitées par des vers durant deux semaines ont présenté la réponse immunitaire attendue : augmentation des lymphocytes T auxiliaires, sécrétant dans le milieu des interleukines 4, 10 et 17 réduisant l'inflammationinflammation et favorisant la croissance tissulaire.

    Pour les auteurs, il s'agit là d'arguments en plus en faveur de l'hypothèse hygiéniste. Celle-ci explique le nombre croissant de maladies auto-immunes ou d'allergiesallergies par le manque d'exposition aux microbesmicrobes du fait des antibiotiquesantibiotiques et des règles d'hygiène. Si bien que le système immunitairesystème immunitaire se détourne partiellement de sa fonction primaire, à savoir combattre les corps étrangers, et s'en prend aux tissus de l'organisme. William Gause en est certain : si l'on parvient à contrôler les propriétés thérapeutiques fournies par les helminthes, ce compromis entre aseptisation des milieux et maladies auto-immunes inflammatoires n'aura plus de raison d'être. L'avenir nous le confirmera peut-être.