Si la salamandre peut régénérer ses membres manquants ou ses organes détruits, c’est grâce à ses macrophages. Ces cellules immunitaires jouent un rôle indispensable dans le processus de régénération, dont les scientifiques espèrent s’inspirer pour l’appliquer en thérapeutique humaine.

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    Mieux que la queue du lézard, la salamandre. Cet amphibienamphibien, dont le nom regroupe plusieurs espècesespèces, possède une capacité unique chez les vertébrés : celle de pouvoir régénérer intégralement ses membres amputés ou ses organes partiellement détruits. Une propriété exceptionnelle qui, évidemment, intéresse les scientifiques au plus haut point, pour essayer d'appliquer ce processus à des patients humains.

    Beaucoup de chercheurs pensent d'ailleurs que cette capacité est intrinsèque à tous les vertébrésvertébrés, mais qu'elle se trouve inactivée chez la quasi-totalité d'entre eux. C'est pourquoi ils continuent leurs efforts pour découvrir le bouton « On » que nous posséderions en nous.

    Nous en sommes encore loin. Pour l'heure, les biologistes tentent encore de comprendre par quels mécanismes la salamandre réalise cet exploit. De nouvelles informations, émanant de l'institut australien de Médecine régénérative de l'université Monash de Melbourne, pourraient bien indiquer la direction à suivre. Dans l'édition du 20 mai des Pnas, James Godwin et ses confrères ont démontré le rôle crucial des macrophages dans le phénomène de régénération.

    Les macrophages sont des cellules du système immunitaire impliquées dans plusieurs fonctions de défense de l'organisme, aussi bien chez les salamandres que chez les êtres humains. Mais chez ces amphibiens, elles contrôlent aussi le processus de régénération. © Obli, Wikipédia, cc by sa 2.0

    Les macrophages sont des cellules du système immunitaire impliquées dans plusieurs fonctions de défense de l'organisme, aussi bien chez les salamandres que chez les êtres humains. Mais chez ces amphibiens, elles contrôlent aussi le processus de régénération. © Obli, Wikipédia, cc by sa 2.0

    La salamandre, modèle biologique de choix

    Les macrophages sont des cellules immunitaires présentes aussi bien chez les amphibiens que chez les mammifèresmammifères. Celles-ci interviennent après une blessure, atteignant massivement la région abîmée en deux ou trois jours. Sur place, elles phagocytent les éléments étrangers qui subsistent, et envoient des signaux inflammatoires suivis de signaux anti-inflammatoires pour favoriser la cicatrisation. Du moins, cela se produit ainsi chez les mammifères.

    Cette recherche sur l'axolotl (Ambystoma mexicanum), une salamandre aquatique, révèle quelques différences. Chez cette espèce, les populations de macrophages atteignent leur nombre maximal entre quatre et six jours après l'amputation. Avant cela, les signaux inflammatoires et anti-inflammatoires sont détectés simultanément dès le lendemain de la blessure.

    Pour déterminer l'implication exacte de ces cellules de l’immunité, les auteurs ont détruit tout ou partie des macrophages de leurs amphibiens, à l'aide d'une substance qui lyse (destruction de la membrane plasmiquemembrane plasmique) ou abîme spécifiquement ces cellules. Ainsi, certains animaux se trouvaient complètement dépourvus de macrophages, et d'autres en avaient beaucoup moins que la normale. Les processus de régénération pouvaient alors être observés.

    La régénération passe bien par les macrophages

    Lorsque ces populations cellulaires ont complètement disparu, le membre amputé ne repousse pas, mais se contente seulement de cicatriser. En revanche, lorsqu'il reste quelques macrophages à l'axolotl, la patte finit par réapparaître. Cependant, la performance demande plus de temps qu'en situation naturelle.

    Une fois les concentrations en macrophages rétablies, les animaux ont de nouveau été amputés, sans traitement particulier. Cette fois, tout s'est passé normalement, et les membres manquants ont pu être reconstruits à l'identique par l'amphibien. Ces résultats soulignent donc le rôle fondamental des macrophages dans les processus de régénération.

    Mais quels sont-ils ? La question demeure. L'enquête sera poursuivie en ce sens. À terme, les auteurs espèrent pouvoir se servir de ces mécanismes pour aider à la régénération des moelles épinières abîmées, au traitement de lésions cérébrales et de maladies hépatiques ou cardiaques. Ils pourraient aussi être utiles pour favoriser la cicatrisation après des opérations chirurgicales lourdes. Une chose est sûre : une telle prouesse médicale ne pourra pas s'effectuer demain. Mais si elle avait lieu prochainement, le jury du Nobel trouverait-il pertinent de récompenser toutes les salamandres pour leur contribution majeure à la médecine humaine ?