Une enzyme, la PKMzeta, joue un rôle clé dans la persistance des douleurs chroniques, comme viennent de le montrer des chercheurs canadiens. Lorsqu’elle est inhibée, l’hypersensibilité à la souffrance devient beaucoup moins intense. À l’avenir, PKMzeta pourrait constituer une cible privilégiée pour la mise au point de nouvelles thérapies.

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    La douleur chronique n'est pas toujours considérée comme une maladie en soi, mais plutôt comme un symptôme. Elle implique pourtant l'excès de synthèse de l'enzyme PKMzeta, la mémoire du système nerveux de la douleur. © Deborah Leigh, Flickr, cc by nc 2.0

    La douleur chronique n'est pas toujours considérée comme une maladie en soi, mais plutôt comme un symptôme. Elle implique pourtant l'excès de synthèse de l'enzyme PKMzeta, la mémoire du système nerveux de la douleur. © Deborah Leigh, Flickr, cc by nc 2.0

    Les douleurs chroniques relèvent parfois de l'insupportable. On les considère comme telles lorsqu'elles persistent plus de trois mois. Pour certains, la sensibilité est si forte que le moindre contact avec des vêtements cause d'effroyables souffrances. Pour d'autres, chaque pas devient un fardeau. Leurs origines sont nombreuses : lésion d'un nerf (suite à une opération par exemple), arthrite, certaines pathologies...

    En réalité, le système nerveux garde en mémoire les traces des douleurs. L'exemple le plus troublant est celui des membres fantômes, quand un individu perçoit encore (et en souffre parfois) une jambe ou un bras qui a pourtant été amputé. Lors de travaux récents, il a été montré qu'une enzymeenzyme, la PKMzeta (une isoforme de la protéine kinase C), renforçait la connexion entre neuronesneurones.

    De nouvelles précisions viennent d'être apportées par des chercheurs de l'université McGill (Canada). À la lumièrelumière de leurs travaux, publiés dans Molecular Pain, on constate qu'une sensation de douleur augmente la concentration en PKMzeta dans le système nerveux centralsystème nerveux central et qu'elle persiste, contribuant à l'effet mémoire.

    Inhiber PKMzeta pour affecter la mémoire de la douleur

    L'enzyme a été inhibée au niveau neuronal chez des rats. Les chercheurs stimulaient la patte arrière des rongeursrongeurs avec de la capsaïcinecapsaïcine, un composé actif du piment qui au contact de la peau devient irritant.  L'hypersensibilité caractéristique des douleurs chroniques avait disparu. La mémoire neuronale a ainsi été (au moins partiellement) effacée, diminuant la souffrance mais renforçant en parallèle la sensation de toucher.

    L'enzyme PKMzeta renforce les connexions entre neurones et induit la persistance de la mémoire liée à la souffrance, la cause des douleurs chroniques. © Rebecca-Lee, Flickr, cc by nc nd 2.0

    L'enzyme PKMzeta renforce les connexions entre neurones et induit la persistance de la mémoire liée à la souffrance, la cause des douleurs chroniques. © Rebecca-Lee, Flickr, cc by nc nd 2.0

    Habituellement, les thérapiesthérapies utilisées contre les douleurs chroniques s'attaquent à la région d'où provient le mal en réduisant l'inflammationinflammation, ou alors stimulent la production de molécules analgésiques voire en produisent directement.

    « C'est la première fois que nous pouvons concevoir des médicaments qui cibleraient la mémoire laissée par la douleur pour réduire l'hypersensibilité, commente Terence Coderre, co-auteur de l'étude. Nous pensons que cette découverte ouvre un boulevard qui pourrait offrir de nouveaux espoirs pour traiter les douleurs chroniques. »

    Les médicaments actuels ne traitent malheureusement qu'une petite partie de la souffrance (environ 10 à 20 %). Il est donc important d'en mettre au point des plus efficaces. Cette piste prometteuse ouvre ainsi des perspectives intéressantes. Mais il faudra en premier lieu s'assurer que l'inhibitioninhibition de la PKMzeta n'aura pas de conséquences plus lourdes pour les patients.