Près de 30 ans après la découverte du virus du Sida, un espoir de vaccin est en train d’émerger grâce à des recherches menées aux Etats-Unis. Deux anticorps seraient capables d'empêcher l’infection de cellules humaines par 90% des souches du VIH.

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    Les pics à la surface du virus du Sida sont constituées de glycoprotéines virales, comme gp120. Crédits DR

    Les pics à la surface du virus du Sida sont constituées de glycoprotéines virales, comme gp120. Crédits DR

    Plus de 25 millions de morts et 33 millions de personnes porteuses du virus : le virus du Sida, ou VIH, est responsable d'une pandémie mondiale débutée il y a une trentaine d'années. Ses propriétés font de ce virus une entité impossible à éradiquer à partir du moment où elle a envahi les cellules cibles. Le seul moyen de lutte consiste alors en la protection face à l'infection. Des solutions préventives existent comme le port du préservatif, la surveillance du sang transfusé... mais les contaminationscontaminations se multiplient chaque année, notamment dans les pays pauvres. La protection suprême, le vaccin contre le VIH, semblait jusqu'à présent impensable. Pourtant, deux publications dans le journal Science laissent envisager d'heureuses perspectives.

    La difficulté dans la recherche d'un vaccinvaccin contre le VIH consiste en la variabilité du virus : il est capable de muter très rapidement et donc d'échapper au système immunitairesystème immunitaire. C'est aussi pour cette raison que de multiples souches du virus existent aux quatre coins du monde. Pour réussir l'identification d'anticorpsanticorps capables de cibler plusieurs souches, les chercheurs ont mis au point une nouvelle technique, basée sur les propriétés biologiques du virus.

    Les particules du VIH sont contenues dans une enveloppe où sont ancrées certaines protéinesprotéines virales, les fameux pics à la surface du virus. La glycoprotéineglycoprotéine gp120 est l'une d'elles et sert à la fixation du virus sur le récepteur des cellules humaines, nommé CD4. L'interaction gp120-CD4 est donc essentielle à l'infection et son inhibitioninhibition permettrait de lutter contre les néo-infections.

    Deux équipes de recherche de l'Institut national américain des allergies et des maladies infectieuses (NIAID) ont construit une version modifiée de la protéine gp120 comportant des traits communs à toutes les souches. Ils ont ensuite fait réagir cette protéine avec des lymphocyteslymphocytes B (cellules immunitaires sécrétrices d'anticorps) extraits du sang d'un patient porteur du VIH. Les lymphocytes B activés par la protéine gp120 modifiée ont été individualisés, afin d'en déterminer les anticorps spécifiques qu'ils sécrétaient.

    Structure tridimensionnelle de l'interaction entre l'anticorps VRC01 (bleu et vert), et le virus du Sida (rouge et gris). Cette structure permettra aux chercheurs d'identifier la zone importante impliquée dans l'interaction entre les deux molécules. © NIAID VRC / <em>Science</em>

    Structure tridimensionnelle de l'interaction entre l'anticorps VRC01 (bleu et vert), et le virus du Sida (rouge et gris). Cette structure permettra aux chercheurs d'identifier la zone importante impliquée dans l'interaction entre les deux molécules. © NIAID VRC / Science

    Neuf souches sur dix reconnues et attaquées

    Deux anticorps neutralisants, nommés VRC01 et VRC02, du nom du centre de recherche des vaccins (VRC), ont ainsi été identifiés. Ces anticorps seraient capables d'empêcher la fixation sur les cellules humaines de 90% des souches virales testées ! C'est la première fois que des anticorps dirigés contre le VIH atteignent un tel score et avec une telle efficacité.

    D'autre part, et point important, l'anticorps VRC01 ne se fixe pas sur les cellules humaines, ce qui n'aurait pas permis sa production par le système immunitaire, éliminant toute cause possible de réaction auto-immune.

    Ces résultats sont très encourageants mais d'autres données sont nécessaires à la conception d'un vaccin. La structure moléculaire de l'interaction entre VRC01 et le VIH, également résolue, complète les premiers résultats. Cette image en trois dimensions permet aux chercheurs de bien visualiser l'interaction entre le virus et l'anticorps et de savoir précisément quelles zones sont impliquées dans la rencontre des deux partenaires. Ces informations permettent d'imaginer une moléculemolécule capable de mimer la partie précise du virus impliquée dans l'interaction, et qui pourrait activer spécifiquement le système immunitaire, ce sur quoi les chercheurs travaillent actuellement.

    Les deux publications complémentaires ouvrent donc la voie vers un potentiel vaccin contre le VIH. Même si de précédents essais de vaccins contre le VIH donnaient finalement des résultats modestes, rien n'empêche d'être optimiste cette fois-ci.