Des chercheurs américains ont obtenu des cellules souches pluripotentes induites à partir de cellules adultes de peau. Si cette avancée confirmait sa faisabilité, elle permettrait de ne pas employer d'embryons, dont l'utilisation dans la médecine régénératrice pose des questions éthiques. L'objectif des chercheurs est d'obtenir de telles cellules souches pour développer le clonage thérapeutique, c'est-à-dire à la réparation d'un organe.

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    La découverte des chercheurs américains pourrait représenter une avancée de plus pour la médecine régénératrice. © Olivier Le Queinec /shutterstock.com

    La découverte des chercheurs américains pourrait représenter une avancée de plus pour la médecine régénératrice. © Olivier Le Queinec /shutterstock.com

    Une équipe américaine a réussi à obtenir des cellules souches humaines pluripotentes en reprogrammant des cellules adultes de peau à partir d'ovocytes, une percée scientifique, même si les cellules ainsi créées sont génétiquement anormales.

    Les cellules souches embryonnaires humaines sont dites pluripotentes car elles sont capables de donner naissance à tous les types de cellules de l'organisme (du cœur, du cerveau, du sang...), ce qui en fait un enjeu essentiel de la médecine régénératrice.

    Mais leur origine - les embryons sur lesquels elles sont prélevées sont détruits - se heurte à des considérations éthiques. D'où l'intérêt à chercher à produire des cellules souches avec le même potentiel, mais sans utiliser des embryons.

    Cette recherche reste entachée par l'imposture du chercheur sud-coréen Hwang Woo-suk. Il avait faussement prétendu en 2004 avoir créé les premières cellules souches dérivées d'un embryon humain cloné. Depuis, Yamanaka et Thomson sont parvenus en 2007 à reprogrammer des cellules de peau, obtenant des cellules souches pluripotentes induites (iPS). Cette méthode a suscité un vif engouement mais a rapidement montré ses limites.

    L'équipe de Scott Noggle et Dieter Egli (New York Stem Cell Foundation Laboratory), dont les travaux sont publiés mercredi par la revue scientifique Nature, a utilisé une variante de la technique bien connue de clonage dite de transfert nucléaire, qui avait permis la naissance en 1996 de la brebis Dolly.

    Vers le clonage thérapeutique sans embryon ?

    Schématiquement, la méthode consiste à remplacer le noyau (qui contient le génome de la cellule) d'un ovocyte (ou ovuleovule) non fécondé, par le noyau d'une cellule adulte du corps (cellule somatiquecellule somatique), par exemple une cellule de peau.

    L'objectif des scientifiques, chez l'Homme, n'est pas d'obtenir un embryon (clonage reproductif), mais des cellules souches porteuses du génome d'un patient, donc susceptibles d'être utilisées pour réparer un organe déficient (clonage thérapeutique), sans rejet par l'organisme.

    Pour obtenir des cellules souches pluripotentes à partir de cellules adultes de peau, on remplace le noyau d'un ovocyte non fécondé par le noyau de la cellule adulte de peau. Sur ce schéma, une cellule animale eucaryote typique : 1. nucléole 2. noyau 3. ribosome 4. vésicule 5. ergastoplasme 6. appareil de Golgi 7. cytosquelette 8. réticulum endoplasmique lisse 9. mitochondrie 10. vacuole 11. cytosol 12. lysosome 13. centriole © MesserWoland et Szczepan 1990, Wikipédia CC by sa 3.0

    Pour obtenir des cellules souches pluripotentes à partir de cellules adultes de peau, on remplace le noyau d'un ovocyte non fécondé par le noyau de la cellule adulte de peau. Sur ce schéma, une cellule animale eucaryote typique : 1. nucléole 2. noyau 3. ribosome 4. vésicule 5. ergastoplasme 6. appareil de Golgi 7. cytosquelette 8. réticulum endoplasmique lisse 9. mitochondrie 10. vacuole 11. cytosol 12. lysosome 13. centriole © MesserWoland et Szczepan 1990, Wikipédia CC by sa 3.0

    Mais les chercheurs ont montré que les ovocytes humains ainsi manipulés ne se développaient pas jusqu'au stade du blastocysteblastocyste, premier stade de développement de l'embryon, où sont prélevées les cellules souches embryonnairescellules souches embryonnaires.

    Pour contourner cet obstacle, l'équipe de Noggle et Egli a introduit dans un ovocyte humain le noyau d'une cellule de peau d'un donneur adulte, tout en conservant le noyau de l'ovocyte. Ce procédé a permis le développement de cellules reprogrammées jusqu'au stade du blastocyste, mais celles-ci avaient trois copies du génome, au lieu de deux. Les chercheurs ont néanmoins pu en dériver deux lignées de cellules souches pluripotentescellules souches pluripotentes. Selon les chercheurs, ces résultats « démontrent la faisabilité de la reprogrammation de cellules somatiques à partir d'ovocytes humains ».

    Cette approche « a encore du chemin à faire », commente la revue Nature dans un éditorial. « On ne sait pas comment des cellules triploïdes se comporteraient dans les tissus. Personne ne les considèrerait comme thérapeutiques à ce stade », ajoute-t-elle. Les auteurs de l'étude sont néanmoins confiants de parvenir à produire une lignée de cellules souches à partir d'un embryon cloné diploïdediploïde, génétiquement normal, comme Hwang Woo-Suk avait prétendu l'avoir fait.

    La revue Nature souligne que l'équipe de Scott Noggle et Dieter Egli n'emploie pas le terme de clonage, hautement sujet à controverse.