L'étude menée par Françoise Clavel-Chapelon (Inserm-Institut Gustave Roussy) et son équipe sur près de 60 000 femmes met en évidence que la consommation élevée de bêtacarotène – c'est-à-dire la prise de compléments alimentaires de béta-carotène au moins 3 fois par semaine, ajoutée à la prise alimentaire – est associée à un risque accru de cancers liés au tabac chez les fumeuses.

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    Bêta-carotène et risque de cancer : un paradoxe, selon que vous fumez ou non

    Bêta-carotène et risque de cancer : un paradoxe, selon que vous fumez ou non

    À l'inverse, le risque de ces cancers décroît avec la consommation croissante de bêtabêta-carotène chez les non-fumeuses. Ces résultats sont publiés dans le numéro du 21 septembre 2005 du Journal of the National Cancer Institute.

    Depuis 1990, Françoise Clavel-Chapelon coordonne le suivi de la cohorte prospective E3N, qui permet l'étude des facteurs de risque de cancer parmi une population de près de 100000 femmes. Son équipe s'est en particulier intéressée à la relation entre consommation de bêta-carotène et risque de cancers liés au tabac. Jusqu'à présent, certaines études avaient mis en évidence une diminution du risque de cancer associée à la consommation de bêta-carotène, tandis que des études expérimentales suggéraient que des doses élevées de cet antioxydantantioxydant (fournies par des compléments), pourraient être associées à une augmentation du risque de cancer du poumon et de cancers digestifs chez les fumeurs.

    Afin d'approfondir l'étude des relations entre bêta-carotène et risque de cancers liés au tabac, les chercheurs ont analysé les données concernant 59 910 femmes. Suivies depuis 1990, ces femmes livrent régulièrement par auto-questionnaires des informations extrêmement précises sur leur mode de vie et leur état de santé. En utilisant l'information des questionnaires adressés en 1994 à ces femmes, les chercheurs ont collecté des informations sur l'alimentation, la prise de compléments alimentaires et le statut tabagique. Les femmes ont été réparties en quatre groupes, selon leur consommation en bêta-carotène : 3 groupes de consommation alimentaire croissante (le premier étant considéré comme à consommation faible) et un 4ème groupe qui prenait, en plus de sa consommation alimentaire, une supplémentation (groupe considéré comme à consommation élevée). Ces femmes ont été suivies sur une duréedurée médiane de 7,4 ans. Au cours de ce suivi, 700 femmes ont vu se développer un cancer lié au tabac.

    L'équipe de l'Inserm montre que chez les femmes n'ayant jamais fumé, la consommation croissante de bêta-carotène est inversement associée au risque de survenue d'un cancer lié au tabac. A l'inverse, chez les femmes ayant fumé au cours de leur vie - qu'elles aient arrêté ou non-, le risque de cancer est maximal chez celles ayant la consommation la plus élevée de bêta-carotène.

    Dans la population des quelque 60000 femmes suivies, les auteurs ont calculé le risque absolu de cancer sur 10 ans. En cas de consommation faible de bêta-carotène, il était voisin de 180 cas pour 10 000 femmes, que les femmes soient fumeuses ou non. ; En cas de consommation élevée de bêta-carotène, il était seulement de 81,7 cas pour 10 000 femmes chez les nonfumeuses, alors que chez les fumeuses, il s'élevait à 368,3 cas pour 10 000.

    « Bien que le bêta-carotène soit susceptible d'être co-carcinogènecarcinogène, on ne peut cependant recommander aux fumeurs d'éviter de consommer des aliments riches en bêta-carotène comme les fruits et les légumes, dans lesquels d'autres composants pourraient s'opposer à l'interaction potentiellement délétère entre le bêta-carotène et le tabac », soulignent en conclusion les auteurs de cette étude.