Suite à l’arrêt du tabac, il est rare de ne pas récupérer quelques kilos. Pourquoi ? Des chercheurs suisses incriminent la flore intestinale. Sa composition changerait radicalement une fois la dernière cigarette éteinte, ce qui conduirait à une augmentation de la fabrication des graisses.

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    On ne cesse d'entendre parler des méfaits du tabac. L'institut de veille sanitaireinstitut de veille sanitaire (InVS) a récemment publié un rapport alarmant sur la situation française où une personne sur trois fume, et 200 en meurent chaque jour. Les statistiques mondiales ne sont pas meilleures. Selon l'Organisation mondiale de la santéOrganisation mondiale de la santé (OMS), un individu succombe toutes les six secondes à cause du tabac, ce qui correspond à près de 15.000 décès quotidiens.

    Face à ce constat catastrophique, de nombreux accros essaient d'en finir avec leur addiction. Divers moyens existent pour les soutenir dans cette démarche courageuse et difficile. Entre volonté, substituts nicotiniques, hypnose et cigarette électronique, le choix est délicat. Mais le jeu en vaut la chandelle. Une fois les désagréments du sevrage derrière eux, les anciens fumeurs se sentent en général beaucoup mieux. Le sommeil devient plus profond, l'odorat plus sensible, les cheveux plus souples, le teint plus hâlé...

    Fumer nuit vraiment à la santé. On ne compte plus les nombreux effets négatifs que la fumée a sur l’organisme : cancers, baisse de la fertilité, accidents vasculaires, mort subite du nourrisson… Il est très difficile mais nécessaire d’arrêter de fumer pour en réduire le risque. © Marcell Dietl, FlickR, cc by sa 2.0

    Fumer nuit vraiment à la santé. On ne compte plus les nombreux effets négatifs que la fumée a sur l’organisme : cancers, baisse de la fertilité, accidents vasculaires, mort subite du nourrisson… Il est très difficile mais nécessaire d’arrêter de fumer pour en réduire le risque. © Marcell Dietl, FlickR, cc by sa 2.0

    Plus de deux kilos sans manger plus

    Il y a cependant un point noir pour les ex-fumeurs. Avec l'arrêt du tabac, il n'est pas rare de récupérer quelques kilogrammeskilogrammes superflus. La prise de poids est de 2,8 kg en moyenne chez les hommes et de 3,8 kg environ chez les femmes. Les raisons de cette augmentation pondérale ne sont pas claires. On entend souvent dire que les grignotages qui se multiplient lors du sevrage sont les responsables. Mais qu'en est-il vraiment ?

    Des chercheurs suisses de l'hôpital universitaire de Zurich se sont intéressés à cette problématique. Ils se sont penchés sur le rôle des microbesmicrobes de l'intestin dans ce phénomène. Plusieurs travaux ont en effet montré que la flore intestinale pouvait influencer le métabolisme et qu'elle contrôlait certaines pathologiespathologies comme l'obésité et le diabète. Leurs résultats, publiés dans la revue Plos One, incriminent également les microbes digestifs dans la prise de poids suite à l'interruption du tabac.

    Les bactéries en partie responsables de la prise de poids

    Pour cette étude, les auteurs ont sélectionné 15 personnes : 5 fumeuses,  5 désireuses d'en finir avec le tabac et 5 non-fumeuses. L'expérience s'est déroulée sur neuf semaines dont une avant l'arrêt et huit après. Pendant cette période, les participants avaient des visites médicales régulières au cours desquelles ils devaient remettre des échantillons de leurs selles. Ils devaient également maintenir leur régime alimentaire et ne pas se laisser tenter par les grignotages. Un seul des participants n'a pas pu s'y tenir.

    Les microbes se développent par milliards dans le système digestif. Ils peuvent influencer le métabolisme et la prise de poids. Lorsqu’une personne arrête de fumer, la composition de sa flore intestinale change ce qui entraîne une augmentation pondérale. © adonofrio, Flickr, cc by 2.0

    Les microbes se développent par milliards dans le système digestif. Ils peuvent influencer le métabolisme et la prise de poids. Lorsqu’une personne arrête de fumer, la composition de sa flore intestinale change ce qui entraîne une augmentation pondérale. © adonofrio, Flickr, cc by 2.0

    À la fin de l'expérience, les anciens fumeurs avaient gagné en moyenne 2,3 kg sans manger davantage. En analysant leurs échantillons fécaux, les scientifiques se sont rendu compte que leur flore intestinaleflore intestinale avait radicalement changé et était devenue beaucoup plus diversifée. « Nous avons également noté une augmentation de certains phila comme ceux des FirmicutesFirmicutes et des Actinobacteria et une diminution de ceux des Bacteroidetes et des Proteobacteria suite à l'arrêt du tabac » expliquent les chercheurs.

    Cette étude montre une fois de plus l'influence de la flore intestinale sur la physiologie humaine. Selon les auteurs, le nouvel écosystèmeécosystème qui se forme après l'arrêt du tabac digère plus efficacement les aliments. « Moins de déchetsdéchets mais plus de graisses sont fabriquées ce qui conduit à la prise de poids », ajoutent-ils. Quand on arrête de fumer, il semble donc difficile de ne pas grossir. Cependant, en évitant de trop manger, on peut limiter les dégâts. Les avantages de l'arrêt de la cigarette restent beaucoup plus importants que ce désagrément.