Une affaire d’agneau fluorescent hybridé avec une méduse et parti par erreur pour un abattoir fait actuellement grand bruit. Mais à part un acte de malveillance et des procédures à revoir à l’Inra, il n’y a guère de raisons de s’inquiéter…

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    Révélée par Le Parisien, la nouvelle a surpris. Un agneau de l'Inra, génétiquement modifié, se serait retrouvé à l'abattoir et un particulier en aurait acheté la viande pour la consommer. L'animal portait un gène codant pour une protéine fluorescente issue de méduseméduse. On peut se demander pourquoi les scientifiques s'amusent à de telles hybridationshybridations...

    Il faut remonter à l'attribution du prix Nobel 2008 de chimiechimie à Osamu Shimomura, Roger Tsien et Martin Chalfie pour comprendre l'intérêt scientifique d'une telle incorporation. Il s'agit de modifier le génome d'un animal en ajoutant un gène codant pour une protéine fluorescente, la GFP, (Green Fluorescent ProteinGreen Fluorescent Protein) issue de la méduse Aequorea victoria ou bien dsRed (Red-fluorescent protein), venue d'un corail. Les lecteurs intéressés pourront retrouver cette histoire, de 1960 à 1995, dans notre article  GFP : le Nobel de chimie 2008 pour une protéine fluorescente.

    L'idée n'est bien sûr pas de retrouver plus facilement des animaux d'élevage égarés la nuit dans les pâturages mais d'adjoindre au gène d'une protéine à laquelle on s'intéresse celui de cette GFP ou de cette dsRed. Les cellules qui fabriqueront cette protéine deviendront ainsi fluorescentes et visibles sous un certain éclairage (ultravioletultraviolet ou bleu). De multiples expériences utilisent depuis cette sorte de coloration génétique, principalement en recherche médicale. En 2013, comme nous l'avions relaté, une équipe uruguayenne avait déjà annoncé la naissance de moutons fluorescents.

    Deux souris qui portent un gène codant pour une protéine fluorescente entourent une souris non transgénique. © Moen <em>et al.</em>, BMC cancer

    Deux souris qui portent un gène codant pour une protéine fluorescente entourent une souris non transgénique. © Moen et al., BMC cancer

    Pas de risque sanitaire connu pour ce mouton transgénique

    Selon Le Parisien, l'agnelle du scandale, dénommée Rubis, est née au printemps 2014 d'une brebis, Émeraude, qui portait le gène de la GFP. L'Inra (Institut national de la recherche agronomique) l'utilisait pour des expérimentations en cardiologie humaine pour étudier « la greffe de cellules pour restaurer une fonction cardiaque défaillante suite à un infarctus du myocardeinfarctus du myocarde ». Émeraude a transmis à sa descendance ce gène de méduse et notamment à Rubis. C'est à la suite d'un acte de malveillance, explique le journal, que la jeune Rubis, qui vivait à Bressonvilliers, dans l'Essonne, a été conduite dans un abattoir et que la viande a été vendue à un « particulier francilien » en octobre 2014.

    Dans le cas de ce type de vente, les impératifs de traçabilitétraçabilité sont moindres que dans le cas des circuits classiques de l'alimentation, si bien que l'acheteur de ce mouton OGM n'est pas connu. Dans un communiqué de presse, l'Inra indique avoir porté plainte. Si l'affaire est malheureuse, le risque sanitaire est nul explique l'institut : « Cette agnelle appartenait, au titre de la réglementation en vigueur, aux organismes génétiquement modifiésorganismes génétiquement modifiés du groupe I, "dont le risque pour la santé humaine et pour l'environnement est nul ou négligeable". L'unité de recherche qui pilotait ce projet scientifique bénéficiait d'un agrément ». Les consommateurs de cette agnelle ne deviendront donc pas fluorescents et cette GFP n'a aucune toxicitétoxicité. Sans doute, en revanche, l'incident incitera-t-il à verrouiller quelques procédures...