La sensation d’une présence invisible a été reproduite dans le cadre d’une expérience scientifique. Cette impression émanerait d’une altération des signaux cérébraux dits sensimoteurs. Cette meilleure compréhension du phénomène ouvre des pistes de soin aux patients atteints de troubles neurologiques ou psychiatriques et souffrants de ce genre d’expérience.

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    L'expérience fantomatique est passée au crible des scientifiques. Et rationalisée. Des chercheurs de l'École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), en Suisse, ont effectivement réussi à recréer en laboratoire la sensation d'une présence invisible sur une douzaine de volontaires.

    Ces derniers sont invités, yeuxyeux bandés, à mouvoir devant eux leur index encapsulé dans un manchon relié à un robotrobot. L'ordinateurordinateur reproduit tout d'abord à l'identique les gestes du sujet humain de telle sorte qu'un bras informatique lui touche le dosdos de façon synchronesynchrone (voir la vidéo). La sensation ressentie ? Se toucher soi-même dans le dos... « Pour le cerveau, il y a un conflit spatial », analyse Olaf Blanke, directeur du centre de neuroprothèses de l'EPFL et auteur principal de l'article paru dans Current Biology. « Un mouvementmouvement effectué devant soi ne doit pas se traduire par une sensation dans le dos. Mais ce conflit, il le résout. »

    Dans un second temps, les mouvements reproduits artificiellement sont légèrement désynchronisés de sorte que le dos du sujet est titillé avec une demi-seconde de retard par rapport à sa propre gestuelle. Cette fois, plusieurs témoignent d'une impression d’être touchées par une ou plusieurs autres personnes, à des degrés divers de gène, allant jusqu'à demander l'arrêt de l'expérience. Rapidement, ils ne ressentent alors plus rien d'étrange.

    Le thème des morts revenant hanter les vivants est aussi ancien qu’universel. Le <em>bâ</em> égyptien (âme) représenté avec un corps d’oiseaux possède la faculté de continuer à vivre sur Terre et de faire souffrir ceux qui ont commis le mal envers le défunt. © <em>The Egyptian Book of the Dead : The Book of Going Forth by Day</em> par James Wasserman <em>et al.</em>

    Le thème des morts revenant hanter les vivants est aussi ancien qu’universel. Le égyptien (âme) représenté avec un corps d’oiseaux possède la faculté de continuer à vivre sur Terre et de faire souffrir ceux qui ont commis le mal envers le défunt. © The Egyptian Book of the Dead : The Book of Going Forth by Day par James Wasserman et al.

    La technique robotique pourrait soulager des malades

    Pour les chercheurs, ces résultats s'expliquent par une perturbation du mécanisme de perception spatio-temporelle des individus. Elle génère alors une difficulté à conjuguer différents sens pour établir une perception cohérente et unitaire de leur propre corps.

    En effet, le cerveau possède plusieurs représentations du corps humain. En temps normal, il les rassemble en une perception unitaire de chaque individu. Mais en cas de dysfonctionnement, « une deuxième représentation de notre corps est parfois induite et n'est pas ressentie comme "moi" mais comme autrui, comme une présence », explique Giulio Rognini, coauteur de l'étude et chercheur en neurosciences cognitives à l'EPFL.

    Pour savoir quelles parties du cerveau fonctionnent mal, les chercheurs se sont penchés sur celui de douze épileptiques. Ces patients ont le profil, avec ceux atteints de schizophrénie ou de fortes migraines, pour vivre de telles expériences fantomatiques. L'imagerie à résonancerésonance magnétique a montré des lésions encéphaliques dans trois régions impliquées dans la conscience de soi, le mouvement et la position, à savoir les cortex insulairecortex insulaire, pariéto-frontalfrontal et temporo-pariétal. Ces lésions pourraient donc être responsables de ce type d'illusion. Les chercheurs envisagent à présent d'adapter leur robot chatouilleur pour aider ces patients à se libérer de sensations de présence en corrigeant certaines discordancesdiscordances qu'ils subiraient.