On le savait, les apprentissages commencent bien avant la naissance, lorsque les bébés baignent encore dans le liquide amniotique. Une nouvelle étude montre qu’ils sont capables de se souvenir des sons entendus lors de la vie utérine, au moins jusqu'à quatre mois après la naissance.


au sommaire


    Quand un bébé vient au monde, on a souvent l'impression qu'il ne sait rien faire, ou presque, et qu'il a tout à apprendre. En réalité, les fœtus commencent déjà leurs apprentissages bien avant la naissance. Des études ont par exemple montré qu'ils s'entraînaient aux grimaces in utero afin d'être les plus expressifs possible dans le monde extérieur.

    Dans le ventre de leurs mères, les bébés peuvent percevoir les sons. Mais sont-ils capables de s'en souvenir à la naissance ? Cette question passionne les scientifiques depuis de nombreuses années, et les preuves de l'existence d'une mémoire in utero s'accumulent. En 1988 déjà, une étude suggérait que les nouveau-nés étaient capables de reconnaître la mélodie de la chanson favorite de leur mère. Des travaux ont également montré qu'ils se familiarisaient avec les sons de la langue de leurs parents au cours du développement embryonnaire.

    L'électroencéphalographie (EEG) est une méthode d’exploration cérébrale qui mesure l’activité électrique du cerveau grâce à des électrodes placées sur le crâne. © CDaisyM, Flickr, cc by nc nd 2.0
    L'électroencéphalographie (EEG) est une méthode d’exploration cérébrale qui mesure l’activité électrique du cerveau grâce à des électrodes placées sur le crâne. © CDaisyM, Flickr, cc by nc nd 2.0

    Des chercheurs finlandais de l'université d'Helsinki sont particulièrement intéressés par cette thématique. En observant directement l'activité cérébrale, ils ont récemment montré que les nouveau-nés pouvaient se rappeler de sons entendus in utero. Dans une nouvelle étude, publiée dans la revue Plos One, ils ont voulu aller un peu plus loin et savoir si cette mémoire fœtale pouvait perdurer dans le temps. « Nous savions que les bébés étaient capables de se souvenir des sons entendus dans le ventre, mais nous ignorions pour combien de temps », explique Eino Partanen, le principal auteur de ces travaux.

    La mémoire de la vie utérine dure au moins quatre mois

    Pour ce faire, les chercheurs ont recruté 24 femmes enceintes au troisième trimestre de leur grossesse. Ils ont demandé à la moitié d'entre elles d'écouter cinq fois par semaine un CDCD contenant plusieurs mélodies infantiles simples, parmi lesquelles se trouvait la célèbre berceuse Ah ! Vous dirais-je maman. Au total, les candidates ont joué le CD entre 46 et 64 fois, et ont entendu la chanson en moyenne 171 fois (elle figurait trois fois sur l'album). Après l'accouchement, les mamans devaient détruire le disque et ne plus faire entendre la mélodie à leurs bébés.

    Juste après la naissance et quatre mois plus tard, les scientifiques ont fait écouter une version un peu modifiée de la berceuse aux enfants, et ont observé leur activité cérébrale par électroencéphalographie. Plus précisément, ils ont mesuré le potentiel évoqué, c'est-à-dire la modification du potentiel électrique produite par le système nerveux en réponse à la mélodie.

    Leurs résultats montrent que chez les nourrissons bercés in utero par la comptine, le cerveaucerveau s'active plus intensément que chez les autres. Cet effet dépend du nombre d'écoutes : plus les bébés ont entendu la chanson souvent et plus le signal nerveux est important. Mais surtout, les chercheurs ont mis en évidence que même quatre mois après la naissance, la mémoire de la berceuse était toujours là. « Ces résultats révèlent que les bébés sont capables d'apprendre très tôt, et que ces apprentissages restent dans le cerveau pendant longtemps », conclut Eino Partanen.