Le succès reproductif de truites d’élevage relâchées dans la nature est nettement moins élevé que celui des animaux sauvages. La raison en est incertaine mais cette observation mérite d’être prise en compte dans les stratégies de repeuplement.

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    A l’écloserie de South Santiam, une truite arc-en-ciel mâle va bientôt pouvoir frayer. © Hitoshi Araki

    A l’écloserie de South Santiam, une truite arc-en-ciel mâle va bientôt pouvoir frayer. © Hitoshi Araki

    Sur la rivière Hood, dans l'Oregon, Hitoshi Araki, du département de zoologie, a patiemment pêché les truites arc-en-ciel. Parmi elles se trouvaient les enfants et petits-enfants de truites qu'il a sans doute connues quand elles vivaient leur jeunesse dans l'écloserie de South Santiam, dépendant du Département de la pêche et de la vie sauvage de l'Etat d'Oregon. Ces poissons, à l'état sauvage, migrent entre la rivière et l'océan pour se reproduire. A l'instar des saumonssaumons, ces truites remontent la rivière d'où elles sont nées pour venir y pondre.

    Une fois ses truites anesthésiées, le chercheur leur a prélevé un peu de chair dont il a analysé l'ADNADN, qu'il a ensuite comparé à celui des poissons des générations précédentes et sortis de l'écloserie. Après plusieurs années de ce labeur, Hitoshi Araki a pu évaluer le succès reproductif de ces animaux d'élevage qui, après avoir été lâchés, sont allés se mélanger aux populations naturelles.

    Une truite qui vient d’être pêchée a été anesthésiée. Les chercheurs vont y prélever un échantillon de tissus avant de la relâcher. © Hitoshi Araki

    Une truite qui vient d’être pêchée a été anesthésiée. Les chercheurs vont y prélever un échantillon de tissus avant de la relâcher. © Hitoshi Araki

    Repeuplement moins efficace

    D'après ses résultats, publiés dans Science, les truites issues de l'élevage font pâle figure en comparaison des animaux nés dans la nature : leur succès reproductif est inférieur de 40 %. L'explication serait génétiquegénétique. Dans un milieu aussi protégé, les poissons présentant des mutations qui, dans la nature, les auraient fait mourir ou auraient réduit leur capacité à se reproduire, mènent au contraire une vie normale et assurent leur descendance. Au bout de plusieurs générations, les populations d'élevage deviennent ainsi un peu moins bien adaptées aux conditions de vie dans la nature. Lâchés dans la nature et confrontés à un milieu plus difficile et à la compétition de leurs congénères sauvages, ces animaux ont une survie plus réduite et un nombre de descendants plus faible. L'hypothèse est classique mais l'équipe américaine en a fait ici une démonstration expérimentale.

    Le résultat est également important pour les stratégies de repeuplement. Lorsqu'il s'agit de regarnir des populations naturelles en danger - ce qui est pratiqué avec la truite arc-en-ciel dans l'Oregon -, il faut sans doute tenir compte du fait que l'on envoie dans la nature des animaux à la capacité de survie notablement plus faible que les espècesespèces sauvages.