L’animal le plus âgé de la planète vient encore de vieillir… même s’il est mort en 2006. En réalité, Ming avait 507 ans, et non 405 à 410 ans comme précédemment annoncé, lorsque des scientifiques l’ont malencontreusement tué en vue de l’analyser. À leur décharge, ils ne s’attendaient pas à faire une telle découverte avec cet Arctica islandica, un mollusque bivalve appelé cyprine en France.

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    Voici les coquilles de Ming, un mollusque bivalve mort à l'âge de 507 ans. Il mesurait 86,9 mm de long. © Université de Bangor

    Voici les coquilles de Ming, un mollusque bivalve mort à l'âge de 507 ans. Il mesurait 86,9 mm de long. © Université de Bangor

    Comme les arbres et leurs cernes, les mollusques enregistrent de leur vivant de précieuses informations dans leurs coquilles. L'une d'elles n'est autre que leur âge, qui se traduit par le nombre de stries, qui peut être déterminé sur ou à l'intérieur des coquilles (sclérochronologie). En 2006, c'est justement en réalisant ce type d'opération que des chercheurs britanniques ont découvert l'animal non colonial le plus âgé connu sur Terre : Ming. Cette cyprine Arctica islandica, un mollusque bivalve cousin de nos palourdes, a reçu le nom de la dynastie chinoise qui régnait à sa naissance... voilà 405 à 410 ans.

    Le comptage avait alors été réalisé sur la face interne des valves, à proximité de la charnière, ce qui explique l'erreur qui a été commise. En réalité, Ming avait 507 ans ! Le problème, c'est que l'âge avancé du mollusque a provoqué une compression des stries de croissance, ce qui a trompé les chercheurs durant leur première analyse. L'impair a été corrigé en comptant cette fois les stries de croissance sur la face externe des coquilles. Leur surface étant bien plus grande, les lignes sont mieux séparées.

    La nouvelle a été dévoilée par Paul Butler, un chercheur de l'université de Bangor (GallesGalles du Nord, Royaume-Uni) qui a participé à l'annonce trop empressée du premier record en 2007. Précisons tout de suite que des mesures complémentaires ont été réalisées pour valider le nouveau chiffre, comme une datation au carbone 14. Ainsi, ce résultat précis à un ou deux ans près est censé être définitif.

    Les bivalves <em>Arctica islandica</em> vivent dans les eaux froides de l'Atlantique. Ce sont des mollusques comestibles exploités commercialement. © ceridwen, geograph.org.uk, cc by sa 2.0

    Les bivalves Arctica islandica vivent dans les eaux froides de l'Atlantique. Ce sont des mollusques comestibles exploités commercialement. © ceridwen, geograph.org.uk, cc by sa 2.0

    Véritable record de longévité pour un animal ?

    Ming n'a malheureusement pas survécu aux analyses dont elle a fait l'objet en 2006, comme les 199 autres cyprines (ou quahogs nordiques au Canada) qui ont été prélevées avec lui en Islande durant une expédition océanographique. Pour leur défense, les scientifiques ne s'attendaient pas à trouver un animal aussi âgé dans leurs échantillons. Si la cyprine est morte en 2006, cela signifie qu'elle est née en 1499... donc à une époque où la dynastie Ming était déjà au pouvoir (1368-1644). Ouf, elle peut garder son nom ! Ainsi, cet animal a vu le jour durant le règne du roi français Louis XII et a connu 52 papes avant de trépasser.

    Le mollusque multicentenaire n'est plus, mais ses valves continuent de fournir de précieuses informations, notamment sur les conditions environnementales que Ming a connues durant sa vie. Grâce à la quantificationquantification des isotopesisotopes de l'oxygène présents dans chaque strie, les chercheurs peuvent par exemple définir la température de l’eau dans laquelle le mollusque a grandi durant une année donnée. Ses coquilles sont donc un précieux livre ouvert sur le passé pour les océanologues et les climatologuesclimatologues. D'autres disciplines s'intéressent également à Ming depuis 2006, car il s'agit d'expliquer son secret de longévité.

    Un point n'a pas changé depuis la publication du record sous-estimé : le débat qui l'entoure. Ming est-il l'animal le plus âgé connu, ce qui sous-entend colonial ou non ? En réalité, le record pourrait être détenu par des éponges de verre Hexactinellida de 15.000 ans, mais uniquement si l'on en croit des modélisationsmodélisations. Et que dire s'il s'avère que Turritopsis nutricula est effectivement une méduse immortelle ?