Tout comme l’Homme, les chimpanzés auraient également recours à des médiateurs pour mettre fin à des conflits, dans l’intérêt de la communauté. Ce rôle est réservé aux individus, mâles ou femelles, ayant le plus d’autorité. Leurs interventions dépendraient du nombre de belligérants et de l’importance des démonstrations d’agressivité. Chaque nouvelle découverte nous rappelle à quel point nous sommes proches l'un de l'autre.   

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    Les chimpanzés font l'objet de nombreuses études comportementales. À chaque publication de résultats, ils se rapprochent un peu plus de nous. Car oui, il semblerait que nous ne partagions pas seulement 96 % de notre ADN. Leurs agissements sont parfois fort semblables aux nôtres. Ils posséderaient un embryonembryon de culture, transmettant des informations à leurs descendants. Ils sont également capables de rire, y compris pour ne pas vexer le narrateur d'une blague peu intéressante.

    Nous savons depuis longtemps qu'ils emploient des outils, au moins 39 pour être précis. Face au désarroi d'un de leurs partenaires, ils sont capables de fournir une aide ciblée et adaptée, par exemple en tendant le bon outil, uniquement si leur congénère en fait la demande. En cas de danger, ils préviennent les autres individus du groupe, mais seulement ceux qui ne se sont aperçus de rien. Ils sont donc capables d'analyser des situations vécues par d'autres membres du groupe et font preuve d'altruisme.

    Comme dans toutes communautés, humaines ou animales, des conflits peuvent apparaître entre des cohabitants pour plusieurs raisons : accès à une ressource, reproduction, perturbations extérieures ou changements hiérarchiques. Une fois encore, les chimpanzés ont trouvé une parade. Des individus autoritaires peuvent agir comme de véritables médiateurs impartiaux et user de différentes stratégies pour maintenir la cohésion sociale au sein du groupe. Le nom de ce comportement prosocial : le policing. Claudia Rudolf von Rohr, de l'université de Zurich, a publié un article à ce sujet dans la revue Plos One.

    Chaque famille de chimpanzé est placée sous l'autorité d'un mâle alpha. La position hiérarchique n'est pas liée à la taille. Chaque individu peut changer de niveau social grâce à son intelligence et en gagnant la confiance des autres. Les médiateurs, de rangs élevés, sont donc des singes reconnus et respectés par la communauté. © Claudia Rudolf von Rohr

    Chaque famille de chimpanzé est placée sous l'autorité d'un mâle alpha. La position hiérarchique n'est pas liée à la taille. Chaque individu peut changer de niveau social grâce à son intelligence et en gagnant la confiance des autres. Les médiateurs, de rangs élevés, sont donc des singes reconnus et respectés par la communauté. © Claudia Rudolf von Rohr

    Les chimpanzés ont aussi leur police

    Les résultats de cette étude s'appuient sur l'observation de quatre groupes de Pan troglodytesPan troglodytes au sein des zoos de Gossau, Basel, Chester et Arnhem (Suisse).

    Le groupe de Gossau est composé de 11 individus dont 2 mâles adultes. Durant les expériences, il a été perturbé par l'arrivée de 3 nouvelles femelles adultes. Cette introduction à engendré une instabilité au sein du groupe. Une inversion du rang des mâles adultes a alors amplifié le problème. Plus de 400 conflits ont été observés. Dans 15 % des cas, ils ont donné lieu à l'intervention d'un arbitre, en l'occurrence un mâle alpha (rang le plus élevé). Les intervenants n'ont jamais montré de parti pris. Ils semblent agir dans l'intérêt de la communauté. Leurs actions ont soit été passives (une présence imposante), soit actives (interpositions entre deux protagonistes, par exemple). Elles ont permis de mettre fin à 87 % des querelles assez rapidement.

    Les observations menées sur les trois autres groupes ont confirmé les résultats de Gossau et apporté quelques éclaircissements supplémentaires. Tous les chimpanzés ne peuvent pas être médiateurs. Ce rôle semble majoritairement réservé aux singes de rangs élevés (alpha ou bêtabêta), indépendamment du sexe ! Des femelles « gradées » sont en effet intervenues pour mettre fin à des conflits dans le zoo de Chestel. Les arbitres sont également plus prompts à intervenir lorsque le nombre ou l'agressivité des belligérants augmentent. L'importance de leurs réponses est d'ailleurs liée à ces deux paramètres. Finalement, les interventions ont indifféremment eu lieu pour réconcilier des mâles ou des femelles entre eux, ou pour mettre fin à des disputes entre des individus des deux sexes.

    Ces nouvelles données confirment des observations antérieures faites par d'autres scientifiques, mais jamais approfondies. Les chimpanzés partageraient donc un nouveau point commun avec nous, l'utilisation de policiers pour préserver les intérêts de la communauté.