L'imperméabilisation des sols et la construction de routes ne seraient pas propices à l’installation de nids de bourdons Bombus vosnesenskii en Californie, un fait problématique puisque ces insectes sont de grands pollinisateurs. Heureusement, son goût pour la diversité florale pourrait changer la donne.

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    Le bourdon à face jaune Bombus vosnesenskii mesure 1 à 2 cm de long. Ses colonies se développent sous terre au printemps. Elles sont créées par les reines qui ont survécu à l'hiver. © Shalene Jha, université du Texas à Austin

    Le bourdon à face jaune Bombus vosnesenskii mesure 1 à 2 cm de long. Ses colonies se développent sous terre au printemps. Elles sont créées par les reines qui ont survécu à l'hiver. © Shalene Jha, université du Texas à Austin

    Les abeilles et les bourdons, en tant qu'insectes pollinisateurs, sont nécessaires au bon fonctionnement de notre agriculture. Ils interviendraient à hauteur de 200 milliards de dollars dans l'économie mondiale de cette filière. Seulement voilà, leurs populations sont en plein déclin. L'utilisation de plusieurs insecticides suscite déjà de nombreuses polémiques car ils seraient partiellement responsables du mal touchant ces arthropodes. Un autre facteur est peut-être trop négligé dans les discussions : nous modifions sans cesse notre environnement et donc les milieux de vie de ces animaux.

    Nos paysages sont par exemple de plus en plus recouverts par des surfaces imperméabilisées, que ce soit par des constructionsconstructions ou des routes, tandis que de nombreuses pratiques agricoles ont favorisé le développement de monocultures. Quels impacts ces facteurs peuvent-ils avoir sur les pollinisateurs, notamment sur leur nidification et leurs explorations ? Pour répondre à cette question, Shalene Jha et Claire Kremen de l'université du Texas à Austin se sont intéressées au cas du bourdon à face jaune Bombus vosnesenskii, une espèceespèce construisant ses nids sous terreterre

    Près de 105 individus ont été récoltés sur chacun des 8 sites ayant fait l'objet d'attentions. Ils étaient situés à plus de 3 km les uns des autres autour de la baie de San Francisco, au sein d'une région contenant à la fois des zones agricoles et des zones fortement urbanisées. Pour chaque individu, 13 séquences de microsatellites ont été recherchées dans l'ADN prélevé dans l'une de leurs pattes, l'objectif étant de comprendre les liens de parenté unissant les insectes capturés. Une fois cette opération réalisée, il devient possible de déterminer le nombre de nids se trouvant sur chaque zone expérimentale et les distances parcourues par les insectes durant leurs explorations. Résultat : les sites bordés dans un rayon de 250 m par des terrains urbanisés contiennent moins de nids ! Ce fait était attendu... à l'inverse du second résultat présenté dans la revue Pnas

    Les bourdons, comme ce <em>Bombus vosnesenskii</em>, sont de très bons pollinisateurs. Ils sont en effet plus gros et plus lourds que les abeilles et peuvent donc transporter plus de pollen. Par ailleurs, ces insectes font également mieux « vibrer » les fleurs, ce qui leur permet d’extraire une plus grande quantité de matière nutritive. © wrygrass2, Flickr, cc by nc sa 2.0

    Les bourdons, comme ce Bombus vosnesenskii, sont de très bons pollinisateurs. Ils sont en effet plus gros et plus lourds que les abeilles et peuvent donc transporter plus de pollen. Par ailleurs, ces insectes font également mieux « vibrer » les fleurs, ce qui leur permet d’extraire une plus grande quantité de matière nutritive. © wrygrass2, Flickr, cc by nc sa 2.0

    Pour certains bourdons, la diversité prime sur la quantité

    Certains bourdons ont en effet parcouru des distances record et insoupçonnées durant leurs explorations, puisqu'ils se sont parfois aventurés à plus de 2.700 m de leur colonie. Étonnamment, la composition des milieux situés à 250 m ou à 2 km du nid incriminé n'explique pas ce chiffre. Selon les données, les bourdons seraient plutôt disposés à s'éloigner davantage de leur reine pour aller butiner dans des zones présentant un grand nombre d'essences florales. Ces insectes sont donc attirés par la diversité en fleurs, et non par la densité d'un site donné ! La présence de paysages « plus homogènes » favoriserait également les longues explorations. 

    Par conséquent, des actions simples permettraient de faciliter le travail de ces insectes, crucial pour notre système alimentaire. Les agriculteurs pourraient par exemple faire revenir ces animaux au sein de leurs cultures en les diversifiant et en les bordant de haieshaies ou de prairies riches en diverses essences florales. Les centres urbains ont également un rôle à jouer, puisqu'ils pourraient augmenter le nombre d'espèces végétales à fleurs plantées au sein de leurs parcs intraurbains et périurbains, ainsi que dans des zones fraîchement réhabilitées, ce qui faciliterait le déplacement de ces insectes. Enfin, la bétonisation des sols devrait être réduite, puisqu'elle limite l'implantation des colonies de Bombus vosnesenskii.