Les capacités intellectuelles des corvidés ne sont plus à prouver. Mais jusqu’où peuvent-ils aller ? Très loin apparemment, à en croire cette vidéo dans laquelle on peut voir un corbeau résoudre un problème complexe qui exige huit étapes.

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    Il s'appelle 007. S'il ne travaille pas pour les services secrets et qu'on ne lui a pas conféré le permis de tuer de James Bond, il partage néanmoins son ingéniosité. De qui parle-t-on ? D'un corbeau calédonien, hébergé et entraîné depuis trois mois à l'université d’Auckland, sous la direction du biologiste Alex Taylor.

    On connaît depuis Konrad LorenzKonrad Lorenz la perspicacité et l'intelligenceintelligence des corvidés, une famille d'oiseaux composée des corbeaux, des corneilles, des choucas, des pies ou des geais. De nombreuses recherches démontrent même qu'ils résolvent des tâches que la plupart des mammifères ne parviennent pas à comprendre, et sur lesquelles butent des enfants de trois et quatre ans. La pie, par exemple, se reconnaît dans un miroirmiroir, et corbeaux et corneilles savent utiliser des outils, entre autres performances. Les éthologues ont donc souvent de bonnes surprises avec ces volatiles à la mauvaise réputation.

    Cette fois, le défi proposé à 007 et filmé par la BBC relève presque de l'exploit. Il s'agit d'un des problèmes les plus complexes jamais soumis à un animal non humain. Pour obtenir son petit bout de viande alléchant, le corbeau devra suivre huit étapes dans un ordre bien précis. D'ordinaire, les tests ne se limitent qu'à l'enchaînement de quatre ou cinq actions. On passe donc à l'étape supérieure.


    Cette vidéo, en anglais, met en image la performance réussie par 007, le corbeau calédonien. Impressionnant ! © BBC, YouTube

    Une première mondiale

    Dans sa volière, l'oiseau dispose d'une brindille accrochée à un bout de ficelle, de trois cages avec des pierres, d'une structure en plexiglas dans laquelle se trouve une autre brindille, plus longue et initialement inaccessible, et enfin la boîte contenant la nourriture. C'est, selon le narrateur, la première fois que 007 est confronté à une telle situation, bien qu'il connaisse chaque objet individuellement.

    Après un instant d'observation, le corbeau tire sur la corde pour la remonter et récupérer la première brindille, courte, avec laquelle il essaie de récupérer le morceau de viande. Mais elle n'est pas suffisamment longue pour lui permettre de tirer vers elle sa friandise. Il faut opérer différemment. Il se dirige alors vers la première cage, et à l'aide de son bâton rapproche le premier caillou, que l'oiseau ramasse et met de côté. Même chose pour la deuxième pierre. Après ce qui semble être un court instant de réflexion, c'est l'illumination.

    Le corbeau 007 récupère le premier caillou et le place dans le dispositif où se trouve la seconde brindille. C'est la quatrième étape. Il récupère la troisième pierre et la dépose également au bon endroit. Puis il retourne chercher le caillou restant et fait de même. Sous le poids, le plateau penche, le long bâtonnetbâtonnet tombe et arrive à la portée du bec du corbeau calédonien. Celui-ci le récupère et file l'essayer sur la première boîte, qui contient la nourriture. Cette fois, il dispose du bon outil pour amener à lui le morceau de viande. Le voilà récompensée de ses efforts mentaux. Une première mondiale. Le tout en environ deux minutes et demie.

    007, la corneille savante

    Évidemment, l'oiseau ne partait pas de zéro et n'a pas eu à comprendre tous les mécanismes en un instant. Il était familiarisé à l'utilisation de la brindille, réflexe assez naturel chez les corvidés, et avait été entraîné à déposer les pierres pour faire basculer le compartiment contenant la grande brindille. Cependant, cet exercice n'avait jamais été pratiqué tel quel, avec toutes les étapes nécessaires simultanément. Il lui a donc fallu utiliser ses expériences passées pour imaginer la solution au problème auquel il était confronté.


    Au sommet d’un toit enneigé, une corneille dévale la pente sur un bout de plastique. Une malencontreuse expérience ? À priori non, puisque l’oiseau remonte son support au sommet et tente une deuxième glissade. © Hugo Meilleur, YouTube

    Pour l'anecdote, 007 ne passera pas sa vie en laboratoire. À la suite de cette expérience réussie, ses geôliers l'ont libéré et rendu à la vie sauvage. Peut-être savaient-ils qu'il aurait de toute façon découvert un moyen de s'échapper... Car les corvidés ne manquent pas d'imagination. La preuve avec l'autre vidéo ci-dessus, plus ancienne, qui montre qu'ils aiment s'amuser, de la même façon que nous : en faisant de la luge.